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Samuel Beckett's maternal passion or hysteria at work in company/compagnie
Alors quâil nâavait quâune vingtaine dâannĂ©e, Beckett traduisait un texte dâAragon et Breton dans lequel les deux auteurs estimaient que lâhystĂ©rie est « peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un moyen suprĂȘme dâexpression ». Ă peu prĂšs Ă la mĂȘme Ă©poque, durant sa psychanalyse avec Bion, Ă©taient revenus au jeune Ă©crivain des souvenirs de son sĂ©jour dans le ventre maternel. La douleur et le sentiment dâimpuissance associĂ©s Ă ces souvenirs intra-utĂ©rins furent encore ravivĂ©s par la confĂ©rence que donna Jung en 1935, et Ă laquelle Beckett assista, au sujet dâune jeune fille que le psychanalyste ne pouvait guĂ©rir car elle nâĂ©tait jamais tout Ă fait nĂ©e. Lâauteure montre que lâĂ©criture bilingue permit vraisemblablement Ă Beckett de supporter cet Ă©tat dâextrĂȘme anxiĂ©tĂ©. Le systĂšme complexe de rĂ©Ă©criture dans lâautre langue que Beckett mit peu Ă peu au point au cours de sa carriĂšre devint ainsi son propre « moyen suprĂȘme dâexpression », mode qui a Ă voir avec lâhystĂ©rie. Pour ce faire, Pascale Sardin analyse Company/Compagnie, nouvelle bilingue Ă©crite Ă la fin des annĂ©es soixante-dix. Comme Pas, dont il est proche, ce long poĂšme thĂ©Ăątral met en scĂšne le lien mortifĂšre mĂšre-enfant qui prend sa source dans lâutĂ©rus. Il sâagit en effet dâun texte hystĂ©rique, tant du point de vue du fond que de la forme, en ce quâil sâappuie sur une sĂ©rie des tropes dissociatifs. Company/Compagnie peut Ă©galement ĂȘtre considĂ©rĂ© comme lâapothĂ©ose du processus auto-traductif beckettien dans lequel une langue ne cesse dâĂȘtre contaminĂ©e par lâautre. Ainsi, lâeffet de mal-diction inhĂ©rent Ă ce double texte en particulier, et Ă lâĂ©criture beckettienne en gĂ©nĂ©ral, pourrait venir de la malĂ©diction dâĂȘtre nĂ© dâun ventre ou dâune matrice mortifĂšres
« Trouble dans le genre » â de la traduction anglo-amĂ©ricaine de LâEnfant de sable de Tahar Ben Jelloun
Tahar Ben Jelloun, les langues, la traduction et la culture Tahar Ben Jelloun est trĂšs vraisemblablement lâun des Ă©crivains de la francophonie les plus traduits dans le monde. Marocain dâorigine, et philosophe de formation, il quitte sa terre natale en 1971 quand lâenseignement de la philosophie est arabisĂ©. Il sâinstalle alors Ă Paris oĂč il poursuit des Ă©tudes de troisiĂšme cycle en psychologie et se lance dans le journalisme. Sa langue maternelle est lâarabe, et comme de nombreux Marocains d..
âWriting without shameâ: the issue of female sexuality in the Anglo-American translations of Passion simple, LâĂvĂ©nement and LâOccupation by Annie Ernaux
Cet article prend le parti dâĂ©tudier le rendu du discours sur la sexualitĂ© dans Passion simple et LâOccupation et celui sur la procrĂ©ation dans LâĂvĂ©nement dans les traductions anglo-amĂ©ricaines de ces trois textes. Annie Ernaux conçoit lâĂ©criture comme une activitĂ© politique destinĂ©e, entre autres tĂąches, Ă dĂ©noncer la domination masculine. Ce travail passe par lâinscription textuelle de la sexualitĂ© et de la corporalitĂ© fĂ©minines. Il sâagit en effet pour lâauteure de sâapproprier la libertĂ© dâĂ©crire « sans honte » et de transgresser une loi du silence imposĂ©e par la sociĂ©tĂ©. Lâeffort dâobjectivation qui caractĂ©rise lâĂ©criture ernausienne sâappuie sur un style dĂ©pourvu de mĂ©taphores et marquĂ© par de nombreuses rĂ©pĂ©titions. On constate une simplification des enjeux textuels assortie dâune accentuation des prĂ©jugĂ©s Ă lâencontre des femmes dans les traductions Ă©tudiĂ©es. Les raisons derriĂšre ces modifications sont analysĂ©es.This article focuses on the rendering of the discourse on sexuality in Passion simple and LâOccupation and that on procreation in Happening in the Anglo-American translations of these three texts. Annie Ernaux conceives writing as a political activity, one of whose aim is to denounce male domination by means of the textual inscription of feminine sexuality and of female corporality. Indeed the author-narrator wishes to write âwithout shameâ in order to break a code of silence imposed by society. The effort to objectify the discourse on the body which characterizes Ernauxâs writing is based on a style devoid of metaphors and marked by numerous repetitions. These textual stakes are simplified in the translation, while the prejudices against women are slightly intensified. Reasons for these modifications are analysed
Exil et Ă©migration avant et aprĂšs 1945: remise en cause du lien identitaire
International audienceno abstrac
Samuel Beckett et la passion maternelle ou lâhystĂ©rie Ă lâĆuvre
LaurĂ©at du prix Nobel de littĂ©rature en 1969, Samuel Beckett (nĂ© Ă Dublin en 1906 et mort Ă Paris en 1989), certainement le plus français des Ă©crivains irlandais, a modifiĂ© notre façon dâenvisager lâart de raconter des histoires, et celui de montrer les corps au thĂ©Ăątre. Ce petit livre revient sur sa carriĂšre Ă©tonnante comme romancier et dramaturge, mais aussi comme essayiste, traducteur et auto-traducteur, et sur une Ćuvre qui a jalonnĂ© toutes les grandes crises du XXe siĂšcle. Il prend le parti de suivre au plus prĂšs lâimaginaire dâun auteur rĂ©putĂ© difficile, depuis ses romans les plus foisonnants Ă©crits dans le sillage de Joyce, jusquâaux textes trĂšs austĂšres et minimalistes des derniĂšres dĂ©cennies.Sardin Pascale. Samuel Beckett et la passion maternelle ou lâhystĂ©rie Ă lâĆuvre. Bordeaux : Presses Unversitaires de Bordeaux, 2009. 134 p. (Couleurs anglaises, 7
Barbara Bray traductrice de Marguerite Duras au prisme du fonds John Calder de la Lilly Library. Lâexemple de The Sailor from Gibraltar
Entre 1957 et 2008, la traductrice anglaise Barbara Bray (1924-2010) traduisit environ quatre-vingts textes â romans, piĂšces, essais â du français vers lâanglais. Elle collabora avec de grands noms du thĂ©Ăątre et du cinĂ©ma comme Harold Pinter, Joseph Losey ou Samuel Beckett. Elle est encore aujourdâhui lâune des principales voix anglophones de Marguerite Duras, dont elle commença Ă traduire les textes en 1958. Or, malgrĂ© ces collaborations remarquables, et si le nom de Barbara Bray est connu dans les cercles beckettiens, pinteriens ou durassiens, son travail en tant que tel est peu Ă©tudiĂ©. Il sâagit, pour rendre visible ce travail, et ainsi comprendre la contribution de Bray Ă la « rĂ©publique mondiale des lettres » (Casanova), de constituer une « archive de traducteur » (GuzmĂĄn) vue comme un ensemble hĂ©tĂ©roclite de textes comprenant des traductions, tĂ©moignages, paratextes, manuscrits et inĂ©dits de nature diverse comme des lettres, notes ou contrats. Dans le cas de Bray, parmi cette archive, se trouve le fonds de lâĂ©diteur britannique John Calder conservĂ© Ă la Lilly Library Ă Bloomington dans lâIndiana aux Ătats-Unis. Nous nous penchons ici sur le roman Le Marin de Gibraltar de Duras paru en 1952 en France et traduit en anglais par Bray en 1966 pour coĂŻncider avec la sortie en 1967 du film de Tony Richardson avec Jeanne Moreau. Pour ce texte, le fonds comporte le translatorâs manuscript, deux sĂ©ries dâĂ©preuves, ainsi que la correspondance entre Bray et Calder. Ces documents rĂ©vĂšlent le rĂŽle clĂ© jouĂ© par la traductrice comme intermĂ©diaire entre Marguerite Duras et son Ă©diteur anglais, ainsi que le contexte agonistique et de nĂ©gociation permanente qui a entourĂ© tout le travail Ă©ditorial en amont de la publication du roman en langue anglaise. Le dĂ©pouillement des variantes prĂ©sentes dans ces documents permet en outre dâĂ©clairer la visĂ©e traductive (Berman) de Bray et le travail stylistique mis en oeuvre pour rendre au mieux la musicalitĂ© de lâĂ©criture de Duras.Between 1957 and 2008, the British translator Barbara Bray (1924-2010) translated some eighty texts â novels, plays, essays â from French into English. She collaborated with great playwrights and filmmakers like Harold Pinter, Joseph Losey, and Samuel Beckett. She is still one of the main English voices of Marguerite Duras, whose texts she began to translate in 1958. Yet, despite such remarkable collaborations, and while Barbara Brayâs name is known amongst specialists of Beckett, Pinter or Duras, her work as such has been overlooked. In order to make it visible and measure Brayâs contribution to the âworld republic of lettersâ (Casanova), it is necessary to constitute a âtranslatorâs archiveâ (GuzmĂĄn), seen as a heterogeneous set of texts made up of translations, testimonies, paratexts, manuscripts, and unpublished material of various kinds such as letters, notes or contracts. In Brayâs case, the papers of the British publisher John Calder, which are held at the Lilly Library in Bloomington, Indiana, USA, are an important element. This article focuses on Le Marin de Gibraltar published by Duras in 1952 in France and translated into English by Bray in 1966 to coincide with the 1967 release of Tony Richardsonâs film starring Jeanne Moreau. The Calder and Boyars collection comprises the translatorâs manuscript, two sets of proofs, and the correspondence between Bray and Calder. These documents reveal the key role played by the translator as an intermediary between Duras and her English publisher, as well as the agonistic context and the many negotiations that took place during the editorial process prior to the publication of the novel in English. The analysis of the variants present in these documents also sheds light on Brayâs translatory project (Berman) and on her attempts to transpose the musicality of Durasâs writing
Présentation
La recherche de constantes, que ce soit dans la pratique traductive ou dans lâobservation des textes traduits, est un dĂ©nominateur commun de la rĂ©flexion sur la traduction. DĂšs la Renaissance, traducteurs et thĂ©oriciens de la traduction, sâappuyant sur lâobservation de textes traduits, cherchent Ă Ă©dicter des principes traductifs. En 1540, Ătienne Dolet publie sa ManiĂšre de bien traduire dâune langue en aultre oĂč il fait part de cinq rĂšgles prescriptives, dont trois concernent la maniĂšre dâĂ©c..
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