Conditions de réalisation des études, détresse psychologique, intention d'abandonner le programme et stratégies de soutien durant la formation infirmière : une étude en deux phases auprès d'une population étudiante de deux milieux d'enseignement supérieur du Québec

« La détresse psychologique et l'intention d'abandonner le programme sont répandues chez les personnes étudiantes du domaine infirmier. Les conditions de réalisation des études, soit les stresseurs psychosociaux et les difficultés de conciliation études-travail-vie personnelle, pourraient y contribuer. Cette recherche en deux phases auprès de personnes étudiantes du domaine infirmier (cégep et université), visait à : 1) Estimer la prévalence des conditions de réalisation des études, de détresse psychologique et d'intention d'abandonner le programme ; 2) Examiner les associations entre les conditions de réalisation des études et a. la détresse psychologique ; b. l'intention d'abandonner le programme 3) Explorer les stratégies de soutien pour améliorer les conditions de réalisation des études en réunissant les perspectives des personnes concernées. Les modèles théoriques de Karasek (1979) et de Siegrist (1996) encadrent cette recherche. Dans la phase quantitative, 230 personnes ont complété un questionnaire afin d'estimer les prévalences (objectif 1). Des modèles de Poisson robuste ont été construits pour examiner les associations entre les variables (objectif 2). Les efforts élevés, les difficultés de conciliation, le surinvestissement et la détresse psychologique étaient fréquents (49,5-84,7 %). Le surinvestissement et les difficultés de conciliation étaient associés à la détresse psychologique (rapport de prévalence ajusté (RPA) 2,10 ; intervalle de confiance à 95 % (IC) 1,15-3,84 et RPA 2,32 IC 1,24-4,32). Le déséquilibre efforts-reconnaissance et les difficultés de conciliation étaient associés à l'intention d'abandonner le programme (RPA 2,32 IC 1,09-4,94 et RPA 2,40 IC 1,05-5,45). Dans la phase qualitative (objectif 3), deux entretiens de groupe ont été menés dans chaque milieu ciblé auprès des personnes étudiantes (6) et de membres du personnel (10). L'analyse thématique de Paillé et Mucchielli (2016) a permis de faire émerger une catégorie de stratégies de soutien commune aux deux milieux, « favoriser la conciliation études-travail-vie personnelle », et deux autres catégories, soit « soutenir la poursuite aux études collégiales » et « faciliter la transition entre le DEC et le BAC ». Cette étude suggère l'importance d'évaluer les conditions de réalisation des études et d'impliquer les parties prenantes pour élaborer des stratégies de soutien pouvant améliorer ces conditions de réalisation des études.-- Mot(s) clé(s) en français : sciences infirmières, stresseurs psychosociaux des études, demandes-latitude-soutien, déséquilibre efforts-reconnaissance, conciliation études-travail-vie personnelle, détresse psychologique, intention d'abandonner le programme, poursuite des études, stratégies de soutien. »-- « Psychological distress and intention to leave the program are common among nursing students. The academic conditions, namely psychosocial stressors and school-work-life conflicts could contribute to this. This two-phase research with nursing (Cegep and university) aimed to 1) Estimate the prevalence of academic conditions, psychological distress, and intention to leave the program; 2) Examine the associations between academic conditions and a. psychological distress; b. intention to leave the program 3) Explore support strategies to improve the academic conditions by bringing together the perspectives of those concerned. The theoretical models of Karasek (1979) and Siegrist (1996) guided this research. In the quantitative phase, 230 people completed a questionnaire to estimate prevalences (objective 1). Robust Poisson models were constructed to examine the associations between the variables (objective 2). High effort, school-work-life conflicts, overcommitment and psychological distress were frequent (49.5-84.7%). Overcommitment and school-work-life conflicts were associated with psychological distress (adjusted prevalence ratio (APR) 2.10; 95% confidence interval (CI) 1.15-3.84 and APR 2.32 CI 1.24-4.32). Effort-reward imbalance and school-work-life conflicts were associated with intention to drop out of the program (RPA 2.32 CI 1.09-4.94 and RPA 2.40 CI 1.05-5.45). In the qualitative phase (objective 3), two group interviews were conducted in each targeted nursing school with students (6) and staff members (10). The thematic analysis by Paillé and Mucchielli (2016) allowed to identify a category of support strategies common to both settings, "promote school-work-life balance", and two other categories, namely "support the pursuit of college studies" and "facilitate the transition between the DEC and the BAC". This study suggests the importance of assessing the academic conditions and involving stakeholders to develop support strategies to improve these academic conditions.-- Mot(s) clé(s) en anglais : nursing sciences, academic psychosocial stressors, demands-control-support, effort-reward imbalance, psychological distress, school-work-life balance, intention to leave the program, pursuit of studies, support strategies. »-

Stresseurs psychosociaux académiques et détresse psychologique durant la formation infirmière

Introduction : La détresse psychologique est fréquente chez la population étudiante universitaire. Sa prévalence s’élève entre 26,6% et 65,3% chez des étudiant·es du domaine infirmier de divers pays pendant la pandémie de COVID-19. Les stresseurs psychosociaux académiques, parmi lesquels figurent la surcharge de travail et le manque de soutien social, semblent nuire à la santé mentale. Davantage d’études sont requises pour comprendre cette association, notamment en contexte de pandémie. Objectifs : Cette étude a été menée auprès d’étudiant·es du domaine infirmier du Québec durant la pandémie de COVID-19. Elle visait à 1) examiner la prévalence d’exposition aux stresseurs psychosociaux académiques et de détresse psychologique; 2) évaluer les associations entre les stresseurs psychosociaux académiques et la détresse psychologique. Méthode : Cette étude s’appuyait sur un devis corrélationnel transversal. Les données ont été collectées au moyen d’un questionnaire en ligne auto-administré auprès de 230 étudiant·es du domaine infirmier. Des modèles de régression Poisson robustes ont permis d’évaluer si les stresseurs (demandes psychologiques élevées, latitude décisionnelle faible, soutien social faible, reconnaissance faible, surinvestissement) accroissent la prévalence de la détresse psychologique (Kessler-6, où un résultat ≥7/24 correspond à une détresse psychologique élevée ou très élevée). Résultats : La détresse psychologique touchait 77% des étudiant·es. L’exposition était plus importante pour les demandes psychologiques élevées (75,65%) et le surinvestissement (53,91%). Après ajustement, seul le surinvestissement augmentait la prévalence de la détresse psychologique (RP : 1,91; IC95% 1,05-3,47). Discussion et conclusion : Les résultats s’alignent à ceux de recherches précédentes. Le surinvestissement est une caractéristique personnelle, mais il est possible qu’il soit encouragé par une surcharge de travail. Les résultats suggèrent que le surinvestissement ait un impact néfaste sur la santé mentale étudiante.Introduction : La détresse psychologique est fréquente chez la population étudiante universitaire. Sa prévalence s’élève entre 26,6% et 65,3% chez des étudiant·es du domaine infirmier de divers pays pendant la pandémie de COVID-19. Les stresseurs psychosociaux académiques, parmi lesquels figurent la surcharge de travail et le manque de soutien social, semblent nuire à la santé mentale. Davantage d’études sont requises pour comprendre cette association, notamment en contexte de pandémie. Objectifs : Cette étude a été menée auprès d’étudiant·es du domaine infirmier du Québec durant la pandémie de COVID-19. Elle visait à 1) examiner la prévalence d’exposition aux stresseurs psychosociaux académiques et de détresse psychologique; 2) évaluer les associations entre les stresseurs psychosociaux académiques et la détresse psychologique. Méthode : Cette étude s’appuyait sur un devis corrélationnel transversal. Les données ont été collectées au moyen d’un questionnaire en ligne auto-administré auprès de 230 étudiant·es du domaine infirmier. Des modèles de régression Poisson robustes ont permis d’évaluer si les stresseurs (demandes psychologiques élevées, latitude décisionnelle faible, soutien social faible, reconnaissance faible, surinvestissement) accroissent la prévalence de la détresse psychologique (Kessler-6, où un résultat ≥7/24 correspond à une détresse psychologique élevée ou très élevée). Résultats : La détresse psychologique touchait 77% des étudiant·es. L’exposition était plus importante pour les demandes psychologiques élevées (75,65%) et le surinvestissement (53,91%). Après ajustement, seul le surinvestissement augmentait la prévalence de la détresse psychologique (RP : 1,91; IC95% 1,05-3,47). Discussion et conclusion : Les résultats s’alignent à ceux de recherches précédentes. Le surinvestissement est une caractéristique personnelle, mais il est possible qu’il soit encouragé par une surcharge de travail. Les résultats suggèrent que le surinvestissement ait un impact néfaste sur la santé mentale étudiante