88 research outputs found

    La rumeur du cachet au Burundi (1960-1961)

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    Au Burundi, dans l’effervescence politique suscitĂ©e par la transition vers l’indĂ©pendance, les rumeurs ont constituĂ© un support privilĂ©giĂ© de l’information et de la propagande. À travers l’exemple de l’une de ces rumeurs, dite « du cachet », bien documentĂ©e par les sources orales et Ă©crites, cet article propose d’explorer les imaginaires et les reprĂ©sentations populaires convoquĂ©es pour dire la politique dans le dĂ©bat public que la dĂ©colonisation a ouvert au pluralisme partisan. Les dĂ©clinaisons chronologiques, territoriales et Ă©vĂ©nementielles de cette rumeur permettent d’éclairer de maniĂšre originale les tensions et les enjeux politiques de la pĂ©riode. Non seulement elles mettent au jour les croyances de l’occulte et les ressorts de la fidĂ©litĂ© monarchique qui dynamisaient alors la vie politique, mais encore elles dĂ©voilent les processus diffĂ©renciĂ©s de la structuration des audiences publiques et les recodages locaux de la rĂ©organisation des pouvoirs qui ont accompagnĂ© les bouleversements politiques du dĂ©but des annĂ©es 1960.The “Cachet” Rumor in Burundi (1960-1961): An Interpretation of a National Conversation on Politics. — In the agitation surrounding independence in Burundi, rumors were a favorite means for transmitting news and propaganda. The example of the rumor of the “cachet”, well documented by both written and oral sources, is used to explore the folk imagery and ideas used to talk about politics. The chronological, territorial and event-related variants of this rumor shed new light on political tensions and issues at a time when decolonization was introducing multi-party politics. They expose driving forces in politics at the time (beliefs in the occult and the grounds of loyalty to the monarchy) and bring to light the differentiated processes of structuring audiences and locally recoding the reorganization of powers entailed by political upheaval in the early 1960s

    Anthropologie des déplacements, nouvelles logiques urbaines

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    Michel Agier, directeur d’études De l’ethnographie des marges Ă  l’anthropologie de la ville Cette direction d’études s’est composĂ©e en 2007-2008 de deux sĂ©minaires : un sĂ©minaire principal, de recherche, « De l’ethnographie des marges Ă  l’anthropologie de la ville » et un atelier de recherche collectif, « Limites du politique, politiques des limites ». Par ailleurs, un sĂ©minaire d’Introduction aux recherches sur les rĂ©fugiĂ©s et l’asile a Ă©tĂ© donnĂ© principalement mais non exclusivement Ă  l’att..

    Les petits mĂ©tiers urbains en Afrique : rendre visibles les travailleurs de l’ombre

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    Catalogue d'exposition itinĂ©ranteSont-ils vraiment si « petits » ces nombreux mĂ©tiers qui occupent au quotidien des millions defemmes et d’hommes dans les villes africaines ? Ils donnent vie aux espaces sociaux et auxpaysages visuels, sonores et olfactifs de ces derniĂšres, toutes agitĂ©es et transformĂ©es parune trĂšs forte croissance dĂ©mographique depuis le dĂ©but du XXe siĂšcle. La formule n’est passeulement usitĂ©e en Afrique, mais lorsqu’elle l’est, de nombreuses images mentales y sontassociĂ©es, qui renvoient Ă  des reprĂ©sentations diffuses de la dĂ©brouille, de la subsistance, dela pauvretĂ©, de l’informalitĂ© ou mĂȘme de l’illĂ©galité  À n’en pas douter, il y a dans l’énonciationde la « petitesse » des mĂ©tiers urbains les dimensions rĂ©elles d’activitĂ©s non dĂ©clarĂ©es ounon reconnues par les instances Ă©tatiques ou internationales qui rĂ©gulent a priori le salariat(donc « mineures » pour elles), qui se rĂ©alisent sans protection sociale ou juridique pour lestravailleurs, gĂ©nĂšrent de faibles revenus et s’opĂšrent dans la plus grande prĂ©caritĂ©. Cependantl’expression n’est pas dĂ©prĂ©ciative par essence. Elle souligne la dimension « contractĂ©e » desactivitĂ©s concernĂ©es, que ce soit par la taille rĂ©duite de la cellule de travail (un individu, parfoisavec un ou quelques aides), l’échelle restreinte de leur dĂ©veloppement spatial ou productif,la modicitĂ© des revenus qu’elles procurent et l’étroitesse du champ des possibles pour ceuxet celles qui les exercent

    ‘Ça aurait pu faire une bonne photo !’ RĂ©flexions sur les dĂ©boires d’une pratique photographique dans une recherche pluridisciplinaire au Burundi

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    Sur un mode rĂ©flexif, cet article revient sur les difficultĂ©s Ă  produire des matĂ©riaux photographiques dans un projet de recherche en sciences humaines et sociales qui s’est dĂ©roulĂ© au Burundi entre 2018 et 2020. Son auteure a Ă©tĂ© co-responsable de ce programme, « Suburbu » (pour « Subsistance urbaine et mobilisations du travail au Burundi, dĂ©but 20e-dĂ©but 21e s. »), rĂ©alisĂ© au sein de la FacultĂ© des Lettres et Sciences humaines de l’UniversitĂ© du Burundi dans le cadre d’un dispositif d’appui de l’Institut de recherche pour le dĂ©veloppement (« Jeune Ă©quipe associĂ©e Ă  l’IRD »). Dans ce texte, elle prend acte des revers qui ont marquĂ© les ambitions initiales du projet en matiĂšre de photographie – en particulier, l’organisation d’une exposition – pour interroger les impensĂ©s qui en sont Ă  l’origine, et examiner les pesanteurs et les blocages disciplinaires, culturels et humains qui ont verrouillĂ© le champ des possibles en termes de prises de vue et d’usages scientifiques de la photographie. Il s’agit d’expliciter les situations pratiques, mais aussi les nĂ©gligences thĂ©oriques et les lacunes techniques Ă  l’origine de ces difficultĂ©s, et d’en souligner les effets, en commentant des images rĂ©alisĂ©es par l’équipe notamment, et en considĂ©rant les attendus de ce qui aurait pu « faire une bonne photo » pour une exposition publique, et au-delĂ , pour la recherche et son heuristique.Le texte poursuit un fil qui n’élude pas la succession d’erreurs et l’impression de lĂ©gĂšretĂ© qu’une prise de recul permet d’entrevoir Ă  propos du (non-)usage de la photographie dans le projet Suburbu. Si certaines de ces anomalies sont explicables et justifiables, comme par exemple l’autocensure qu’une conjoncture sĂ©curitaire hostile a conduit l’équipe Ă  pratiquer, ou la mĂ©connaissance de certaines techniques Ă©lĂ©mentaires pour produire des clichĂ©s utilisables Ă  des fins scientifiques ou esthĂ©tiques, d’autres le sont moins et relĂšvent d’une insouciance ou d’un amateurisme que l’auteure s’attache Ă  questionner. Ainsi les attendus et la valeur du rapprochement entre sciences sociales et photographie n’avaient pas vraiment Ă©tĂ© rĂ©flĂ©chis en amont, ni la bibliothĂšque des connaissances consultĂ©e. De mĂȘme, des rĂ©ticences ou des objections subjectives sont venues renforcer une forme de dĂ©tachement Ă  l’égard des prises de vue, considĂ©rĂ©es comme accessoires voire inutiles. Entre les deux, des photographies ont tout de mĂȘme Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es, qui « auraient pu ĂȘtre bonnes » si seulement leur trĂšs basse rĂ©solution ne les avait rendues quasi inexploitables (quelques exemples accompagnent ce texte). Ce dernier point, articulĂ© Ă  d’autres dĂ©fauts de compĂ©tence, amĂšne l’auteure Ă  revenir sur les bĂ©nĂ©fices techniques et pratiques, et encore intellectuels et scientifiques, attachĂ©s Ă  une collaboration entre chercheur∙e∙s et photographes professionnel∙le∙s ou aguerri∙e∙s. Finalement l’idĂ©e est de conduire les Ă©quipes Ă  envisager de maniĂšre plus routiniĂšre l’usage de la photographie dans les projets en sciences humaines et sociales, en intĂ©grant dĂšs leur phase prĂ©paratoire des professionnel∙le∙s de l’image, ou en prĂ©voyant a minima des formations dĂ©diĂ©es.In reflexive mode, this article re-examines the difficulties of producing photographic materials in a research project in the humanities and social sciences which took place in Burundi between 2018 and 2020. The author was co-lead in this programme, Suburbu (Subsistance urbaine et mobilisations du travail au Burundi, early 20th century-early 21st century), carried out at the FacultĂ© des Lettres et Sciences Humaines of the university of Burundi in the framework of the support provided by the Institut de Recherche pour le DĂ©veloppement (“Jeune Ă©quipe associĂ©e Ă  l’IRD”). In this text, she takes note of the setbacks that stood in the way of achieving initial aims of the project with regard to photography—in particular holding an exhibition—to investigate the oversights that caused them, and to examine the disciplinary, cultural and human impediments and stumbling blocks that limited the range of possibilities in terms of taking photographs and the uses of photography for scientific purposes. The aim is to describe the practical situations as well as the theoretical negligence and technical lacks that caused the difficulties, and to highlight their impact, starting with the photographs taken by the team, in particular, and taking into account the expectations of what might have “made a good photo” for a public exhibition, and beyond that, for research and its heuristics.The text does not elude the succession of errors and the impression of levity that can be seen with hindsight regarding the (non-)use of photography in the Suburbu project. If certain of these anomalies are understandable and justifiable, for example the self-censorship that a hostile security situation obliged the team to practise, or ignorance of certain basic techniques for producing pictures that would be usable for scientific or aesthetic purposes, others are less so and can be put down to carelessness or amateurism that the author endeavours to examine. The expectations and the value of the rapprochement between the social sciences and photography had not really been thought through in advance, nor had the corpus of knowledge been consulted. Similarly, subjective reticence or objections bolstered a certain detachment with regard to photographs, considered as mere accessories or even of no use. Between the two, photographs were nonetheless taken, which “could have been good ones” if only their very low resolution had not made them unusable (a few examples are shown in this text). This last point, along with other failings of competence, have led the author to review the benefits, technical and practical, or intellectual and scientific, to be derived from collaboration between researchers and professional or experienced photographers. Finally, the idea is to encourage the teams to envisage the use of photography more routinely in humanities and social sciences projects by including professional photographers right from the preparatory stages or at the very least planning appropriate training courses.De uma forma reflexiva, este artigo aborda as dificuldades em produzir materiais fotogrĂĄficos num projecto de investigação em ciĂȘncias humanas e sociais, desenvolvido no Burundi, entre 2018 e 2020. A autora foi co-responsĂĄvel do programa “Suburbu” (“SubsistĂȘncia urbana e mobilização para o trabalho no Burundi, inĂ­cio sec.XX-inĂ­cio sec.XXI”), realizado na Faculdade de Letras e CiĂȘncias Humanas da Universidade do Burundi, no quadro de um mecanismo de apoio do IRD-Instituto de investigação para o desenvolvimento (“Equipa jovem associada ao IRD”). Neste texto dĂĄ conta dos revezes que marcaram as ambiçÔes iniciais do projecto em matĂ©ria de fotografia – em particular a organização de uma exposição – para problematizar os impensados que estĂŁo na sua origem, e examinar os bloqueamentos disciplinares, culturais e humanos que fecharam o campo das possibilidades em termos de captação de imagem e de uso cientĂ­fico da fotografia. Trata-se de explicitar as situaçÔes prĂĄticas, mas tambĂ©m as negligĂȘncias teĂłricas e as lacuna tĂ©cnicas, na origem destas dificuldades, e de sublinhar os seus efeitos, comentando as imagens realizadas, nomeadamente pela equipa, e considerando a expectativa em relação ao que poderia ser “fazer uma boa foto” para uma exposição pĂșblica e, tambĂ©m, para a investigação e sua heurĂ­stica.O texto orienta-se num sentido que nĂŁo omite a sucessĂŁo de erros e a impressĂŁo de ligeireza que um recuo permite entrever a propĂłsito do (nĂŁo) uso da fotografia no projecto Suburbu. Se algumas destas anomalias sĂŁo explicĂĄveis e justificĂĄveis como, por exemplo, a autocensura que uma conjuntura securitĂĄria hostil levou a equipa a praticar, ou o desconhecimento de algumas tĂ©cnicas elementares para obter fotos para utilização cientĂ­fica ou estĂ©tica, outras o sĂŁo menos e decorrem de uma despreocupação e de um amadorismo que Ă  autora interessa questionar. Assim, as expectativas e o valor da aproximação entre ciĂȘncias sociais e fotografia nĂŁo estiveram antecipada e verdadeiramente reflectidos, nem a biblioteca de conhecimentos consultada. TambĂ©m as reticĂȘncias ou objecçÔes subjectivas vieram reforçar uma forma de desinteresse em relação Ă s fotografias, consideradas como acessĂłrias, isto Ă©, inĂșteis. De qualquer modo as fotografias foram tiradas e «poderiam ter ficado bem» se a sua baixĂ­ssima resolução nĂŁo as tivesse tornado quase inexplorĂĄveis (alguns exemplos acompanham este texto). Este Ășltimo ponto, associado a outras faltas de competĂȘncia, leva a autora a debruçar-se sobre os benefĂ­cios tĂ©cnicos e prĂĄticos e tambĂ©m intelectuais e cientĂ­ficos, ligados a uma colaboração entre investigadores (as) e fotĂłgrafos (as) profissionais ou experientes. Finalmente a ideia Ă© levar as equipas a encarar de forma mais rotineira o uso da fotografia em projectos de ciĂȘncias humanas e sociais, integrando neles profissionais de imagem ou prevendo um mĂ­nimo de formaçÔes dedicadas, desde a fase preparatĂłria

    Des "boys" à Bujumbura (Burundi), ou le politique domestiqué

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    La figure du « boy » dans la ville de Bujumbura, omniprĂ©sente jusqu’à nos jours et familiĂšre Ă  tous ses habitants depuis sa naissance coloniale au dĂ©but du 20e siĂšcle, n’a guĂšre suscitĂ© la curiositĂ© des chercheurs. De rĂ©cents travaux ont abordĂ© la question de la domesticitĂ© au Burundi, mais sous l’angle de la protection infantile et juvĂ©nile (le travail des fillettes et les abus Ă  leur encontre Ă©tant soulignĂ©s), ou sous celui des avancĂ©es du droit du travail, international ou national. Pourtant le « mushumba » comme on disait autrefois, le « boy » des Ă©lites coloniales, nationales et expatriĂ©es, ou le « travailleur de maison » comme il se fait appeler aujourd’hui, occupent une place Ă  part dans l’histoire sociale et politique de Bujumbura. En tant qu’hommes, plus nombreux dans les cuisines de la capitale que les femmes, ces « garçons » (parfois plus ĂągĂ©s que leur "patron") sont impliquĂ©s de longue date dans des dispositifs Ă©conomiques diffĂ©rents et engagĂ©s dans des relations personnelles plus variĂ©es. IntermĂ©diaires entre collines et ville, rusticitĂ© et civilitĂ©s, langues africaines et europĂ©ennes, mais aussi entre manants et puissants, ou militaires et rebelles, ils incarnent des rapports de domination dont les paradoxes ont Ă©clatĂ© au grand jour pendant la guerre civile dĂ©butĂ©e en 1993. Des ressources de la dĂ©pendance aux promesses de l’émancipation, leur socio-histoire « marginale » Ă©pouse le rythme d’une politisation accrue des Burundais depuis un siĂšcle

    Des « boys » aux « travailleurs de maison » au Burundi, ou le politique domestiqué

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    International audience« Boys » (ababoyi) have been omnipresent in urban households in Burundi since the beginning of the 20th century. However, academic research has not been interested in this category of workers who are in charge of many household tasks, elsewhere rather entrusted to women. Through a sociohistory of these men and their long history of domesticity, this paper intends to (re)inscribe them into the field of action and political mobilizations and show they are involved in economic systems, personal relationships and collective commitments that make them more than atonic subalterns. Beyond the dependency relationships that restrain them, they negotiate their emancipation through various forms of initiatives.Les « boys » (ababoyi) sont omniprĂ©sents dans les foyers urbains du Burundi depuis le dĂ©but du XXe siĂšcle. Pourtant, la recherche s’intĂ©resse peu Ă  cette catĂ©gorie de travailleurs auxquels incombent de multiples tĂąches mĂ©nagĂšres, ailleurs plutĂŽt confiĂ©es aux femmes. En proposantune socio-histoire de ces hommes engagĂ©s de longue date dans la domesticitĂ©, cet article entend les (rĂ©)inscrire dans le champ de l’actionet des mobilisations politiques, en montrant qu’ils sont impliquĂ©s dans des dispositifs Ă©conomiques, des relations personnelles et desengagements collectifs qui en font plus que des subordonnĂ©s atones. Par-delĂ  les relations de dĂ©pendance qui les brident, ils nĂ©gocient leur Ă©mancipation au travers de formes variĂ©es d’initiatives

    L’ « effet Mandela » : histoire, usages et mĂ©moires d’une influence extĂ©rieure sur le systĂšme carcĂ©ral burundais (et au-delĂ )

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    Nelson Mandela a Ă©tĂ© le nĂ©gociateur en chef des discussions de paix pour le Burundi Ă  partir de 2000, en remplacement de Julius Nyerere, dĂ©cĂ©dĂ© en octobre 1999. Figure emblĂ©matique du « prisonnier politique » africain et PrĂ©sident en retraite de la RĂ©publique d’Afrique du Sud au moment de sa dĂ©signation Ă  la tĂȘte des Ă©quipes de mĂ©diation, son action a Ă©tĂ© dĂ©terminante puisqu’elle a conduit Ă  la signature de l’Accord de paix d’Arusha le 28 aoĂ»t 2000 entre la plupart des parties au conflit, rĂ©bellions du CNDD-FDD et du Palipehutu-FNL exceptĂ©es. Elle a Ă©tĂ© aussi l’objet de nombreux commentaires, Ă©logieux ou rĂ©probateurs, au moment mĂȘme des discussions et jusqu’à aujourd’hui. En particulier, son implication dans la question carcĂ©rale burundaise a Ă©tĂ© cruciale, Ă  une Ă©poque oĂč environ 10 000 dĂ©tenus « survivaient » littĂ©ralement dans des prisons en surchauffe. Ainsi, c’est Ă  l’issue d’une visite Ă  la prison de Mpimba en juin 2000 qu’il a mis Ă  l’agenda des nĂ©gociations de paix la question hautement sensible des « prisonniers politiques », que les groupes armĂ©s en lutte contre le pouvoir de Bujumbura Ă©tablissaient comme une condition sine qua non de leur participation au forum d’Arusha. Dans le cadre d’un conflit aux limites gĂ©nocidaires diversement interprĂ©tĂ©es entre Hutu et Tutsi, sa conception large des infractions concernĂ©es suscita d’intenses controverses. Mais c’est sur cette base, entre autres, que le « contentieux de 1993 » fut vidĂ© et que des milliers de libĂ©rations intervinrent en 2004 et 2006. Par ailleurs, on lui attribue aussi des changements importants dans la vie quotidienne des prisons burundaises, quand ce n’est pas une influence indirecte dans la confection du nouveau code pĂ©nal de 2009.C’est l’histoire de cette influence de Mandela sur l’évolution du systĂšme carcĂ©ral burundais, rĂ©elle ou sublimĂ©e, que je propose de retracer. « L’effet Mandela » n’est pas seulement le titre d’un rapport de l’International Crisis Group consacrĂ© Ă  ses dĂ©marches irĂ©niques Ă  Arusha, c’est aussi une expression utilisĂ©e par la vingtaine d’anciens dĂ©tenus ou d’avocats que j’ai pu interroger depuis 2011, dans le cadre du projet « Irene » d’abord (Les professionnels internationaux de la paix. Sociologie d’une ingĂ©nierie transnationale), puis dans celui du projet Ecoppaf consacrĂ© aux prisons en Afrique (Economie de la peine et de la prison en Afrique). C’est Ă©galement une portĂ©e plus globale de l’engagement de Mandela qui a Ă©tĂ© validĂ©e en 2015, deux ans aprĂšs sa mort, lorsque les rĂšgles minimales des Nations unies sur le traitement des prisonniers ont Ă©tĂ© officiellement rebaptisĂ©es « RĂšgles Nelson Mandela ». Dans quelle mesure les usages et les pratiques de l’emprisonnement au Burundi et au-delĂ  ont-elles vĂ©ritablement Ă©tĂ© transformĂ©es par l’action du « sage » africain ? Quelle part de rĂ©alitĂ©, de fantasme ou de travail des mĂ©moires est-elle affectĂ©e Ă  cet hĂ©ritage d’une intervention extĂ©rieure sur ce qui relĂšve avant tout d’une institution rĂ©galienne de l’Etat ? C’est Ă  ce questions, et d’autres encore, que cette communication tentera de rĂ©pondre.Économies de la peine et de la prison en Afriqu

    ‘Ça aurait pu faire une bonne photo !’ RĂ©flexions sur les dĂ©boires d’une pratique photographique dans une recherche pluridisciplinaire au Burundi

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    International audienceIn reflexive mode, this article re-examines the difficulties of producing photographic materials in a research project in the humanities and social sciences which took place in Burundi between 2018 and 2020. The author was co-lead in this programme, Suburbu (Subsistance urbaine et mobilisations du travail au Burundi, early 20th century-early 21st century), carried out at the FacultĂ© des Lettres et Sciences Humaines of the university of Burundi in the framework of the support provided by the Institut de Recherche pour le DĂ©veloppement (“Jeune Ă©quipe associĂ©e Ă  l’IRD”). In this text, she takes note of the setbacks that stood in the way of achieving initial aims of the project with regard to photography—in particular holding an exhibition—to investigate the oversights that caused them, and to examine the disciplinary, cultural and human impediments and stumbling blocks that limited the range of possibilities in terms of taking photographs and the uses of photography for scientific purposes. The aim is to describe the practical situations as well as the theoretical negligence and technical lacks that caused the difficulties, and to highlight their impact, starting with the photographs taken by the team, in particular, and taking into account the expectations of what might have “made a good photo” for a public exhibition, and beyond that, for research and its heuristics.The text does not elude the succession of errors and the impression of levity that can be seen with hindsight regarding the (non-)use of photography in the Suburbu project. If certain of these anomalies are understandable and justifiable, for example the self-censorship that a hostile security situation obliged the team to practise, or ignorance of certain basic techniques for producing pictures that would be usable for scientific or aesthetic purposes, others are less so and can be put down to carelessness or amateurism that the author endeavours to examine. The expectations and the value of the rapprochement between the social sciences and photography had not really been thought through in advance, nor had the corpus of knowledge been consulted. Similarly, subjective reticence or objections bolstered a certain detachment with regard to photographs, considered as mere accessories or even of no use. Between the two, photographs were nonetheless taken, which “could have been good ones” if only their very low resolution had not made them unusable (a few examples are shown in this text). This last point, along with other failings of competence, have led the author to review the benefits, technical and practical, or intellectual and scientific, to be derived from collaboration between researchers and professional or experienced photographers. Finally, the idea is to encourage the teams to envisage the use of photography more routinely in humanities and social sciences projects by including professional photographers right from the preparatory stages or at the very least planning appropriate training courses.Sur un mode rĂ©flexif, cet article revient sur les difficultĂ©s Ă  produire des matĂ©riaux photographiques dans un projet de recherche en sciences humaines et sociales qui s’est dĂ©roulĂ© au Burundi entre 2018 et 2020. Son auteure a Ă©tĂ© co-responsable de ce programme, « Suburbu » (pour « Subsistance urbaine et mobilisations du travail au Burundi, dĂ©but 20e-dĂ©but 21e s. »), rĂ©alisĂ© au sein de la FacultĂ© des Lettres et Sciences humaines de l’UniversitĂ© du Burundi dans le cadre d’un dispositif d’appui de l’Institut de recherche pour le dĂ©veloppement (« Jeune Ă©quipe associĂ©e Ă  l’IRD »). Dans ce texte, elle prend acte des revers qui ont marquĂ© les ambitions initiales du projet en matiĂšre de photographie – en particulier, l’organisation d’une exposition – pour interroger les impensĂ©s qui en sont Ă  l’origine, et examiner les pesanteurs et les blocages disciplinaires, culturels et humains qui ont verrouillĂ© le champ des possibles en termes de prises de vue et d’usages scientifiques de la photographie. Il s’agit d’expliciter les situations pratiques, mais aussi les nĂ©gligences thĂ©oriques et les lacunes techniques Ă  l’origine de ces difficultĂ©s, et d’en souligner les effets, en commentant des images rĂ©alisĂ©es par l’équipe notamment, et en considĂ©rant les attendus de ce qui aurait pu « faire une bonne photo » pour une exposition publique, et au-delĂ , pour la recherche et son heuristique.Le texte poursuit un fil qui n’élude pas la succession d’erreurs et l’impression de lĂ©gĂšretĂ© qu’une prise de recul permet d’entrevoir Ă  propos du (non-)usage de la photographie dans le projet Suburbu. Si certaines de ces anomalies sont explicables et justifiables, comme par exemple l’autocensure qu’une conjoncture sĂ©curitaire hostile a conduit l’équipe Ă  pratiquer, ou la mĂ©connaissance de certaines techniques Ă©lĂ©mentaires pour produire des clichĂ©s utilisables Ă  des fins scientifiques ou esthĂ©tiques, d’autres le sont moins et relĂšvent d’une insouciance ou d’un amateurisme que l’auteure s’attache Ă  questionner. Ainsi les attendus et la valeur du rapprochement entre sciences sociales et photographie n’avaient pas vraiment Ă©tĂ© rĂ©flĂ©chis en amont, ni la bibliothĂšque des connaissances consultĂ©e. De mĂȘme, des rĂ©ticences ou des objections subjectives sont venues renforcer une forme de dĂ©tachement Ă  l’égard des prises de vue, considĂ©rĂ©es comme accessoires voire inutiles. Entre les deux, des photographies ont tout de mĂȘme Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es, qui « auraient pu ĂȘtre bonnes » si seulement leur trĂšs basse rĂ©solution ne les avait rendues quasi inexploitables (quelques exemples accompagnent ce texte). Ce dernier point, articulĂ© Ă  d’autres dĂ©fauts de compĂ©tence, amĂšne l’auteure Ă  revenir sur les bĂ©nĂ©fices techniques et pratiques, et encore intellectuels et scientifiques, attachĂ©s Ă  une collaboration entre chercheur∙e∙s et photographes professionnel∙le∙s ou aguerri∙e∙s. Finalement l’idĂ©e est de conduire les Ă©quipes Ă  envisager de maniĂšre plus routiniĂšre l’usage de la photographie dans les projets en sciences humaines et sociales, en intĂ©grant dĂšs leur phase prĂ©paratoire des professionnel∙le∙s de l’image, ou en prĂ©voyant a minima des formations dĂ©diĂ©es.De uma forma reflexiva, este artigo aborda as dificuldades em produzir materiais fotogrĂĄficos num projecto de investigação em ciĂȘncias humanas e sociais, desenvolvido no Burundi, entre 2018 e 2020. A autora foi co-responsĂĄvel do programa “Suburbu” (“SubsistĂȘncia urbana e mobilização para o trabalho no Burundi, inĂ­cio sec.XX-inĂ­cio sec.XXI”), realizado na Faculdade de Letras e CiĂȘncias Humanas da Universidade do Burundi, no quadro de um mecanismo de apoio do IRD-Instituto de investigação para o desenvolvimento (“Equipa jovem associada ao IRD”). Neste texto dĂĄ conta dos revezes que marcaram as ambiçÔes iniciais do projecto em matĂ©ria de fotografia – em particular a organização de uma exposição – para problematizar os impensados que estĂŁo na sua origem, e examinar os bloqueamentos disciplinares, culturais e humanos que fecharam o campo das possibilidades em termos de captação de imagem e de uso cientĂ­fico da fotografia. Trata-se de explicitar as situaçÔes prĂĄticas, mas tambĂ©m as negligĂȘncias teĂłricas e as lacuna tĂ©cnicas, na origem destas dificuldades, e de sublinhar os seus efeitos, comentando as imagens realizadas, nomeadamente pela equipa, e considerando a expectativa em relação ao que poderia ser “fazer uma boa foto” para uma exposição pĂșblica e, tambĂ©m, para a investigação e sua heurĂ­stica.O texto orienta-se num sentido que nĂŁo omite a sucessĂŁo de erros e a impressĂŁo de ligeireza que um recuo permite entrever a propĂłsito do (nĂŁo) uso da fotografia no projecto Suburbu. Se algumas destas anomalias sĂŁo explicĂĄveis e justificĂĄveis como, por exemplo, a autocensura que uma conjuntura securitĂĄria hostil levou a equipa a praticar, ou o desconhecimento de algumas tĂ©cnicas elementares para obter fotos para utilização cientĂ­fica ou estĂ©tica, outras o sĂŁo menos e decorrem de uma despreocupação e de um amadorismo que Ă  autora interessa questionar. Assim, as expectativas e o valor da aproximação entre ciĂȘncias sociais e fotografia nĂŁo estiveram antecipada e verdadeiramente reflectidos, nem a biblioteca de conhecimentos consultada. TambĂ©m as reticĂȘncias ou objecçÔes subjectivas vieram reforçar uma forma de desinteresse em relação Ă s fotografias, consideradas como acessĂłrias, isto Ă©, inĂșteis. De qualquer modo as fotografias foram tiradas e «poderiam ter ficado bem» se a sua baixĂ­ssima resolução nĂŁo as tivesse tornado quase inexplorĂĄveis (alguns exemplos acompanham este texto). Este Ășltimo ponto, associado a outras faltas de competĂȘncia, leva a autora a debruçar-se sobre os benefĂ­cios tĂ©cnicos e prĂĄticos e tambĂ©m intelectuais e cientĂ­ficos, ligados a uma colaboração entre investigadores (as) e fotĂłgrafos (as) profissionais ou experientes. Finalmente a ideia Ă© levar as equipas a encarar de forma mais rotineira o uso da fotografia em projectos de ciĂȘncias humanas e sociais, integrando neles profissionais de imagem ou prevendo um mĂ­nimo de formaçÔes dedicadas, desde a fase preparatĂłria

    “Dans la pierre” : retour d’expĂ©riences Ă  Mpimba (Bujumbura, Burundi)

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    International audience« Kabuye » (pseudonyme) a Ă©tĂ© dĂ©tenu Ă  cinq reprises entre 1999 et 2011 dans la prison centrale de Mpimba, ainsi que dans un cachot du Service national de renseignement. La prison de Mpimba, construite en 1959 Ă  Bujumbura sous la colonisation belge, avait Ă©tĂ© prĂ©vue pour accueillir 800 dĂ©tenus. Lorsque Kabuye l’a quittĂ©e en 2011, elle en comptait environ 3 500, rĂ©partis dans 11 quartiers comprenant quelques cellules individuelles et des dortoirs. Kabuye a Ă©tĂ© logĂ© la plupart du temps dans les quartiers « VIP » de cette prison : Ă  l’Infirmerie A qui abrite les dĂ©tenus politiques en vue ou les plus aisĂ©s, et Ă  l’Infirmerie B oĂč sont rassemblĂ©s des cadres intermĂ©diaires ou des dĂ©tenus incarcĂ©rĂ©s pour des dĂ©lits de corruption ou de droit commun mais qui disposent de moyens financiers. Il a aussi Ă©tĂ© dĂ©tenu au quartier Mineur-adulte, parfois appelĂ© Infirmerie C, plus populaire : 156 personnes y Ă©taient enfermĂ©es quand il s’y trouvait, alors que, en comparaison, l’Infirmerie A n’en contient jamais plus d’une trentaine. Par curiositĂ©, Kabuye a visitĂ© d’autres quartiers comme le quartier Contraint ou le quartier Cellule B, oĂč se trouvent des dĂ©tenus de « basse condition », ne bĂ©nĂ©ficiant d’aucun soutien extĂ©rieur et se contentant de la ration alimentaire du gouvernement

    Le bushingantahe au Burundi : de l’institution locale au patrimoine institutionnel national

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