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    DĂ©nis de soi. Ailleurs et exutoires

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    L’ailleurs, espace hors frontières, se définit à l’évidence comme ce qui ne relève pas de soi ou encore ce qui n’est pas conçu comme à soi, en un sens strictement géographique, national même, ou encore émotif, sensible, imaginaire. Il suppose une réalité autre et, peut-être surtout, la décision de la définir comme telle. Lors d’une discussion au sujet des frontières mythiques de l’Europe, Jean-Marc Moura propose l’acception suivante : “Ces délimitations plus mentales que géographiques introduisent chaque fois la possibilité littéraire d’un espace à explorer et/ ou à rêver”. C’est cette possibilité d’investir l’ailleurs qui retient notre attention ici, un ailleurs qui permette en l’occurrence d’élaborer une vision de soi bonifiée ou, plus prosaïquement, de l’explorer afin de s’y créer ou de s’y recréer hors de la souffrance. Glissant décrit par exemple les anciens esclaves, de Caraïbe et ailleurs aux Amériques, qui rêvent d’un ailleurs où ils seraient enfin libres, enfin respectables et respectés. La volonté d’accéder à un ailleurs délesté de ses composantes humiliantes – qu’il s’agisse des bidonvilles auxquels fait référence Édouard Glissant dans Poétique de la Relation et qui sont décrits entre autres par Patrick Chamoiseau dans Texaco, de l’Afrique ancestrale de Ti Jean L’horizon, de la Guadeloupe de Pluie et vent sur Télumée Miracle ou de l’Europe du Baobab fou – met en exergue la souffrance des hommes et les effets malsains découlant des diverses frontières érigées. Elle met en exergue également l’effort fait pour les dépasser ou encore pour créer une réalité meilleure à l’intérieur même des paramètres qu’elles tracent, les modifiant ainsi d’emblée. Il s’agit ici d’analyser les stratégies développées en ces contextes, relevant du passé et du présent, en accordant une attention particulière aux personnages féminins fuyant vers un ailleurs qui n’est pas toujours disposé à les recevoir ou qui aspirent à une réalité où les souffrances n’ont plus cours, où les exclusions ne se traduisent plus par un sentiment de déni de soi tous azimuts

    Territoires perdus, terres d’élection : Omeros de Derek Walcott, Les Indes d’Édouard Glissant et Pélagie-la-Charrette d’Antonine Maillet

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    Cette analyse examine la conception de l’espace, décliné en territoires et en terres, dans un contexte postcolonial de la marginalité et de l’exclusion. Les oeuvres retenues accordent une attention particulière au sentiment d’appartenance problématique à des terres qui ne sont plus agencées en territoires aux frontières clairement délimitées et stables. En ce qui concerne les Antilles et l’Acadie décrites par Derek Walcott, Édouard Glissant et Antonine Maillet, cela est particulièrement difficile, à des degrés divers. Les univers décrits sont redevables chez Walcott et chez Glissant au commerce triangulaire, à la traite négrière et à ses conséquences pour les Amériques, et, chez Maillet, au Grand Dérangement. Au terme du parcours proposé, se dégagent quelques solutions : des modalités particulières d’une reprise des terres ou, lorsque cela n’est pas possible ou n’est plus défini comme souhaitable, d’un échafaudage particulier de la relation entre l’être humain à sa terre natale ou encore sa terre d’élection.This analysis examines the definition of space, as manifested in territories and lands, in a postcolonial context of marginality and exclusion. The selected works pay particular attention to the problematic sense of belonging to a land, and to frontiers that are not clearly delimited and stable. As regards the contexts of the West Indies and Acadia described by Derek Walcott, Édouard Glissant and Antonine Maillet, this is particularly difficult, to varying degrees, owing to the slave trade and its consequences in the Americas, on the one hand, and to the Great Upheaval, on the other hand. A few solutions emerge, such as the development of particular strategies that aim to recover the land or, where this is not possible or is no longer defined as desirable, to imagine new relationship between human beings and their chosen land

    Amériques, langues et espace dans Le quatrième siècle d’Édouard Glissant et Pélagie-la-Charrette d’Antonine Maillet

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    Cet article propose une analyse des romans d’Édouard Glissant et d’Antonine Maillet qui traitent de cet exercice périlleux que constitue l’effort d’une reconstruction identitaire sur fond de dépossession. Le quatrième siècle de Glissant et Pélagie-la-Charrette de Maillet, oeuvres représentatives d’expériences particulières vécues par les francophonies américaines, s’efforcent de rendre compte des injustices tout en développant une réflexion tendue vers l’ouverture à cette étonnante métamorphose américaine, qui permet d’accepter – ou même seulement de se soumettre à – la rencontre, parfois douloureuse, de l’Autre en ce continent vu comme meurtrier et prometteur.This article offers an analysis of the novels of Édouard Glissant and Antonine Maillet, who took care of this perilous exercise that is the effort of the identity reconstruction, against a backdrop of dispossession. The Fourth Century and Pélagie-la-Charrette, works representative of particular experiences of the American francophonies, are compelled to report on injustices while developing a reflection on the openness, the availability towards this astonishing American metamorphosis, which manages to accept—or even only to submit to—the painful encounter of the Other, in this continent seen as murderous and promising

    Hétérogénéité, transgressions et hospitalité. Des frontières de l’étrange(r) chez Antonine Maillet

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    Cet article propose une analyse des déplacements forcés et de l’immigration ainsi que la tristesse et l’inquiétude des exilés dans l’univers littéraire d’Antonine Maillet. Les deux romans retenus semblent de prime abord avoir peu en commun, tant l’époque et le contexte décrits sont différents. Il s’agit de Pélagie-la-Charrette et Madame Perfecta, oeuvres phares de la littérature acadienne, rendant compte de destinées féminines toutes particulières. Dans la première, une femme hors norme mène son peuple dispersé à partir de 1755 vers l’Acadie originelle, quitte à traverser des frontières de manière illicite. Dans la deuxième, c’est d’une rencontre singulière qu’il s’agit, de femmes ayant élu domicile à Montréal, à l’époque contemporaine. Originaires respectivement du littoral acadien, au Nouveau-Brunswick, et de l’Espagne, celles-ci font également preuve d’un courage inouï même si leurs déplacements n’enfreignent aucune loi. Cela dit, les transgressions qu’elles opèrent rendent compte de réalités qui mobilisent, même de manière ambivalente, des sensibilités postmodernes. Il faut alors se référer au propos de Bertrand Westphal selon lequel « l’individu postmoderne ne peut se projeter dans un univers autre que celui du métissage absolu ». En effet, chaque personnage doit composer avec l’altérité lors de traversées de territoires et de frontières où les multiples aspects de la diversité interpellent, menacent ou attendrissent. C’est de la conscience de cette altérité, de l’Autre qu’on refuse, vers qui l’on va également et que l’on est par moments contraints de devenir, qu’il sera question, de manière à saisir quelques acceptions de la frontière en ce qu’elle peut circonscrire ou encore proposer comme alternative au familier ou à l’intime.This article proposes an analysis of forced displacement and immigration, as well as the sadness and anxiety of exiles in the literary universe of Antonine Maillet. The two novels selected seem at first sight to have little in common, so different are the times and the contexts depicted. They are Pélagie-la-Charrette and Madame Perfecta, both landmark works of Acadian literature, and both portray very particular female destinies. In the first, an extraordinary woman leads her dispersed people from 1755 onwards towards the original Acadia, even if it means crossing borders illegally. In the second, there is a singular encounter between women who have made Montreal their home in contemporary times. Originally from the Acadian coast in New Brunswick and from Spain, respectively, they also show incredible courage even though their movements do not break any laws. That said, the transgressions they commit do reflect realities that mobilize, even in an ambivalent way, postmodern sensibilities. It is then necessary to refer to the comment of Bertrand Westphal according to whom “the postmodern individual cannot project herself into a universe other than that of absolute métissage.” Indeed, each character must deal with otherness when crossing territories and borders where the multiple aspects of diversity create challenges, threats, or feelings of tenderness. It is the awareness of this otherness, of the Other that one refuses, towards whom one also goes and that one is at times forced to become, that will be discussed, in order to grasp some of the meanings of the border in what it can circumscribe or propose as an alternative to the familiar or the intimate

    D’une conscience du désastre à la poétique du réenchantement : Biblique des derniers gestes, Écrire en pays dominé, Un dimanche au cachot et Les neuf consciences du Malfini de Patrick Chamoiseau

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    Biblique des derniers gestes (2002), Écrire en pays dominé (1997), Un dimanche au cachot (2007) et Les neuf consciences du Malfini (2009), de Patrick Chamoiseau, agissent comme les échos d’oeuvres telles que L’esclave vieil homme et le molosse (1997), explorant ce que nous définissions, à la suite de Dominique Chancé, comme la volonté de réenchanter le monde. Et celle-ci est à saisir tout comme elle semble être à constituer, c’est-à-dire par la recherche d’un équilibre délicat et, par moments, inatteignable entre la conscience de la détresse et celle de l’espoir. La manière de procéder est singulière, dans la mesure où elle inscrit l’humour, la joie et, surtout, l’espoir là où il n’y a a priori que désolation. C’est alors l’opulence de la poétique qui est envisagée, singulière, susceptible qu’elle serait d’épuiser l’aporie grâce à la pratique, tout aussi déconcertante que prometteuse, de la prise de distance, du doute (Descartes, 1979 [1641]) et de la « verticalité qui écartèle » (Bachelard, 2016 [1943]). Ainsi, une poétique du réenchantement puisant à la fois à la conscience du désastre et à certaines pensées de Blanchot (1980), cette étonnante transcendance du vivre, permettrait d’approcher, même de manière lacunaire, une cime de la conscience, si ce n’est de la sensibilité.Biblique des derniers gestes (2002), Écrire en pays dominé (1997), Un dimanche au cachot (2007) and Les neuf consciences du Malfini (2009), by Patrick Chamoiseau, act like echoes of works such as L’esclave vieil homme et le molosse (1997), exploring what we define with Dominique Chancé as the desire to re-enchant the world. And this is to be grasped just as it seems to be to be constituted, that is to say by the search for a delicate balance, and at times unattainable, between the consciousness of distress and that of hope. The way of proceeding is singular, insofar as it inscribes the humor, the joy and especially the hope where initially there seems to be only desolation. It is then the opulence of the poetics which is considered, singular, susceptible to exhaust limits thanks to the practice as disconcerting as promising of doubt (Descartes, 1979 [1641]) and the « verticalité qui écartèle » (Bachelard, [1943] 2016). Thus, a poetics of re-enchantment drawing both on the consciousness of disaster and on some of the propositions formulated by Blanchot (1980), this astonishing transcendence of life, would make it possible to approach, even in an incomplete manner, a summit of consciousness, if not sensitivity

    Du Mentô, de l’écrivain et du conteur. Mots et magie aux Antilles et en Acadie

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    Cet article examine la manière dont la violence symbolique se manifeste dans les univers littéraires de l’Acadie et des Antilles françaises. Elle serait ici et là le legs colonial d’autant plus honni qu’il est lié à ce qui a présidé à la logique ayant structuré la traite négrière vers les Antilles et la Déportation des Acadiens hors des terres habitées depuis le début de la colonisation française des Amériques. Il s’agit donc chez Antonine Maillet et chez Patrick Chamoiseau de parer à cette situation grâce à un recours à l’imaginaire qui n’est pas abordé comme seul exutoire, mais comme « terrain » propice à l’avènement d’une libération ou, plus prosaïquement, d’un apaisement. L’article est ainsi l’occasion de réfléchir à cet imaginaire qui modifierait la réalité, la bonifierait même, augmenté qu’il est par la parole, par le conte et par une narration ayant des connivences avec des pratiques religieuses ou mystiques.This article examines how symbolic violence manifests itself in Acadian and Caribbean literatures. It is defined as the colonial legacy, related to a subjectivity and to what presided over the logic that structured the slave trade to the West Indies and the deportation of the Acadians out of their lands inhabited since the beginning of the French colonization of the Americas. Antonine Maillet and Patrick Chamoiseau’s need to deal with this situation thanks to a recourse to the imaginary is not addressed as a single outlet but as a «terrain» conducive to the advent of a liberation or, more prosaically, to a form of appeasement. The article thus takes the opportunity to reflect on the way in which this imaginary can modify reality, to improve it even, enhanced as it is by the word, by the tale and by a narration at times similar to religious or mystical practices

    Représentation de la bibliothèque chez Bessette et Poulin

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    On examining novels written in Quebec after the 1950s, surprisingly some common themes emerge. One finds progressively increasing references to the themes of the book, the library, and the author. In this thesis, we study the fictional work of Gerard Bessette and Jacques Poulin, two authors who make abundant references to the universe of the book. Their characters read, write, work and even live in libraries and bookshops.We will discuss the concept of the library, in order to clarify various key issues. Our definition of the library will include any place where books are read or stored. In other words, we do not intend to limit our study only to the traditional library, but rather to extend it to any place which shelters books. The concept of the library is thus taken in its broadest definition and includes the bookshop, the office, or even the bus.These books were selected because each author gives an account of contemporary Quebec history. In addition, the opposing themes in these fictitious worlds, seem to be at the core of the concept of the library. Indeed, it is at the same time both closedness and openness, both hoarding and lending. We will examine how the paradoxical realities are presented in these novels
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