Le messager d’un monde disparu

Porteurs d’eau, le premier tome de l’autobiographie de Manès Sperber qui traite des années de l’enfance à Zablotow, démarre paradoxalement sur l’attitude de distanciation de l’auteur qui préside à l’irruption des images du passé. Les associations suscitées s’organisent selon un schéma ternaire, les images étant hiérarchisées entre elles.La structure même de ce tome est un effet de cette distanciation et la notion du temps y joue un rôle déterminant. Au temps unique de l’enfance correspond le temps du monde des adultes. De même la notion d’espace-temps marque le texte de son empreinte.L’auteur cherche à mettre en œuvre son imagination « réaliste » grâce aux processus adlériens « d’aperception tendancieuse » et de « désactualisation ». Le but qu’il poursuit est que la mémoire individuelle puisse devenir mémoire collective et permette de sauver les survivants du Churban.Die Wasserträger Gottes, der erste Band von Manès Sperbers Autobiographie, startet paradoxerweise mit der Distanzierung des Autors, die das Heraufkommen der Bilder aus der Vergangenheit bedingt. Die hervorgerufenen Assoziationen organisieren sich nach einem Muster im Dreitakt. Es herrscht eine Hierarchie unter den Bildern. Diese Distanzierung hat einen Einfluß auf die eigentliche Struktur dieses Bandes, wobei dem Begriff der Zeit eine wichtige Rolle zukommt. Der einheitlichen Zeit der Kindheit steht die Zeit der Welt der Erwachsenen gegenüber. Auch der Begriff der Raumzeit drückt dem Text seinen Stempel auf. Dank dem Prozeß der «tendenziösen Aperzeption» und der «Desaktualisierung», von Alfred Adler exponiert, vermag es Sperber, seine «realistische» Phantasie ans Werk zu setzen. Damit verfolgt er das Ziel, daß das individuelle Gedächtnis zum kollektiven wird und auf diese Weise dazu beiträgt, die jenigen zu retten, die den Churban überlebt haben

Introduction

Le septième jour, vous tournerez autour de la ville sept fois et les prêtres sonneront du cor.Quand retentira la corne de bélier - quand vous entendrez le son du cor -, tout le peuple poussera une grande clameur ; le rempart de la ville tombera sur place et le peuple montera, chacun droit devant soi.(Josué 6, 1) En 1989, la chute du mur a surpris les esprits à l’Ouest, plus encore qu’à l’Est. Depuis cet événement, on essaie de comprendre comment et pourquoi, un Etat qui fêtait son quarantième..

II. Le « socialisme réellement existant »

Pour mieux analyser l’histoire culturelle de la RDA, il faut encore remonter aux années trente afin d’examiner certains facteurs déterminants. Comme nous l’avons déjà vu ci-dessus, les premiers grands congrès culturels en Union soviétique conditionnèrent le style des rencontres entre intellectuels et écrivains. D’autre part, selon que les exilés s’étaient réfugiés, ou non, en Union soviétique, leurs carrières furent différentes après-guerre. En effet, le déroulement des procès de Moscou contr..

II. Censure et châtiment

1. – Les limites de la liberté La rigidité des dirigeants Si, en 1961, Walter Ulbricht avait fini par reconnaître « les erreurs et les crimes de Staline », en octobre 1964, la chute de Khrouchtchev entraîna l’arrêt des mesures de déstalinisation en Union soviétique et donc en RDA. La deuxième conférence de Bitterfeld vint sceller un soi-disant enracinement des intellectuels parmi les travailleurs. La onzième séance plénière du Comité central du SED, qui se déroula du 15 au 18 décembre 1965, r..

La force de la parole

En 1989, la chute du mur a surpris les esprits à l’Ouest, plus encore qu’à l’Est. Depuis cet événement, on essaie de comprendre comment et pourquoi un État qui fêtait son quarantième anniversaire, qui se croyait protégé par un mur auquel Erich Honecker prédisait une longue existence, s’est effondré aussi rapidement. Certes, la débâcle économique qui menaçait le pays est un facteur d’explication incontestable et déterminant. Mais, s’il peut sembler encore prématuré de vouloir dresser des bilans définitifs et donner une explication complète de l’évolution de la RDA, on peut aujourd’hui repérer d’utiles jalons quant au rôle des intellectuels dans le naufrage d’une idéologie qui avait imposé ses marques à toute une partie du monde. Cet ouvrage présente une première approche du processus d’unification allemande, vue sous l’angle de l’action des intellectuels à l’intérieur et à l’extérieur de la RDA et organisée autour de grands thèmes (concepts, théorie littéraire, acteurs, censure et répression, évolution de la contestation en RDA à partir des années 1980, intellectuels et unification). La période traitée s’étend de 1945 à 1990, avec quelques ouvertures sur les lendemains de l’unification allemande. L’un des aspects originaux de cette étude est de mettre l’accent sur le rôle des intellectuels européens de part et d’autre du Mur, leur relation au pouvoir politique, leur impact dans la lutte contre le pouvoir en RDA. L’ouvrage associe une présentation éclairante de faits connus aux résultats nouveaux d’une recherche menée dans les archives du « Congrès pour la liberté de la culture » aux États-Unis

Conclusion. L’épreuve du temps

Ces intellectuels dont nous venons d’analyser les positions, quel rôle ont-ils réellement joué dans l’effondrement du Mur ? Dans les années 1930 et jusqu’à la deuxième guerre mondiale, membres actifs du parti ou compagnons de route, ils sont utilisés dans le combat antifasciste. Leur nom et leur prestige servent d’étendard au mouvement et leur renommée auréole la lutte en cours. Après guerre, ils deviennent la caution du régime de la RDA. Grâce à leur appui, des mesures a priori impopulaires ..

III. La RDA et ses intellectuels

Si nous nous sommes essentiellement attachée jusqu’ici à montrer l’évolution de la RDA dans un contexte toujours plus virulent qui conduisit à de nombreuses exclusions ou qui donnèrent lieu à des départs volontaires à l’Ouest, ce tableau serait trop déséquilibré sans évoquer les cas d’écrivains connus qui choisirent de vivre à l’Est, puis d’y demeurer, tout en étant parfois très critiques par rapport au régime. Sans doute, certains d’entre eux espéraient-ils encore exercer une influence de l’..

I. L’histoire comme provocation

1. – Les premières fissures La mort de Staline Les relations étroites tissées entre le SED et l’Union soviétique étaient déterminantes pour la vie culturelles en RDA où sévissait également le culte de Staline. Poètes et écrivains n’hésitaient pas à faire allégeance au régime. Ainsi, « Un poème pour Staline » d’Erich Weinert : « Toujours la semence germera/Toujours le champ reverdira/Tel le soleil, le nom de Staline/Toujours sur ce monde luira. Il est plus haut que le nuage/Il est plus profond..

III. Les intellectuels et l’unification

1. – Les règlements de compte Depuis la chute du Mur et l’ouverture des dossiers de la Stasi, plusieurs « affaires » ont occupé la une des journaux et des revues, remettant en cause la position des intellectuels de l’ex-RDA et leur image auprès du public. Elles sont de nature diverse malgré certains points communs : certes Christa Wolf fut accusée d’avoir collaboré avec la Stasi, mais surtout confondue de mensonge à son public, comme Stephan Hermlin. L’affaire lancée par le roman de Günter Gr..

II. Le choc de l’unification

Il n’est pas facile de faire un choix parmi tous les ouvrages qui traitent de la chute du Mur et de ses conséquences. Nous n’aborderons les événements de 1989 que lorsque les intellectuels y furent impliqués et contribuèrent à déterminer le cours de l’histoire. Dans une large mesure, nous délimiterons de la même manière l’évocation des conséquences de l’unification. 1. – Le séisme 1989 En janvier 1989, Honecker affirmait que le Mur tiendrait cent ans encore, un message qui n’était plus crédib..