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Avez-vous dit âsĆurciĂšreâ ?
RĂ©digĂ©e sous forme dâessai, cette contribution relate lâĂ©mergence de la figure de la « sĆurciĂšre » dans le cadre dâun projet de recherche-crĂ©ation Arts-Lettres-Sciences rĂ©alisĂ© in situ dans la RĂ©serve Naturelle Nationale de la Massane, forĂȘt ancienne aujourdâhui inscrite au Patrimoine de lâUNESCO. RĂ©alisĂ© sur plus de deux ans, ce projet collectif mobilise la danse, la vidĂ©o, la photographie et lâĂ©criture. InspirĂ© par une dĂ©marche Ă©cofĂ©ministe et Ă©copoĂ©tique, il vise Ă participer Ă la restauration de notre attention sensible au vivant.EncadrĂ©e par deux textes poĂ©tiques dont les titres renvoient Ă lâĆuvre de lâĂ©cophĂ©nomĂ©nologue David Abram, cette contribution conjugue Ă©criture et photographie. MĂȘlant lâintime et le politique, elle entrelace dâabord le rĂ©cit dâun vĂ©cu incestueux avec une rĂ©flexion Ă©cofĂ©ministe Ă partir du concept clef de « rĂ©silience » en Ă©cologie et en psychologie. Afin de clarifier les liens de parentĂ© entre lâarchĂ©type de la sorciĂšre et celui, plus rĂ©cent, de la « sĆurciĂšre », la deuxiĂšme partie retrace cette Ă©volution et insiste sur les valeurs positives portĂ©es par la sĆurciĂšre, tout en prĂ©cisant les formes dâempuissantement esquissĂ©es par celle-ci. Enfin, la troisiĂšme partie explicite les principaux enjeux Ă©copoĂ©tiques de notre travail. Celui-ci est sous-tendu par des pratiques sympoĂŻĂ©tiques liĂ©es notamment au pouvoir anamorphique de la photographie et Ă notre dĂ©marche crĂ©ative in situ, soit de composition chorĂ©graphique avec un lieu vivant. En guise de conclusion, je propose un bref tour dâhorizon dâune partie de la scĂšne politique et culturelle actuelle oĂč lâon peut dĂ©celer lâapparition de la sĆurciĂšre comme force visant Ă rĂ©nover nos imaginaires concernant les femmes, la « nature » et la formation de nos collectifs.Penned as an essay, this paper tackles the emergence of the âsĆurciĂšreâ archetype âin French a portmanteau word merging the notion of sisterhood with that of witchesâas part of an interdisciplinary creative research project carried out in situ in the Natural National Reserve of the Massane, an ancient forest recognized as a UNESCO World Heritage Site. A couple of years in the making, the project calls upon dance, film, photography, and writing. Driven by ecofeminist and ecopoetic thinking and practices, it seeks to help restore our sensitive attention to the living world.Framed by two poetic pieces, the titles of which refer to ecophenomenologist David Abramâs work, this essay brings together writing and photography. Braiding the intimate and the political, I first interweave a personal narrative based on a story of incest with the presentation of an ecofeminist enterprise grounded in the concept of âresilience,â which is key to both ecology and psychology. I then retrace the evolution of the archetype of the witch into that of the « sĆurciĂšre », insisting on the positive values conveyed by the latter and explicating which forms of empowerment are thereby encouraged. In my third part, I unravel the main ecopoetic principles underlying our approach. These include sympoietic practices linked mostly with the anamorphic power of photography and with our in situ creative stance, i.e. composing a choreography with a live place. As a conclusion, I examine places in contemporary culture and politics where the sĆurciĂšre appears as a powerful figure that might renovate the ways in which we imagine women and ânature,â and how we form collectives
Revisiting the Universal Significance of Mythologies: Barbara Kingsolver's Syncretic and Mythopoeic Short Story "Jump-Up Day"
Cet article vise Ă dĂ©montrer comment la nouvelle transculturelle âJump-Up Dayâ de Barbara Kingsolver renoue avec les origines mythiques du genre de la nouvelle. La nouvelle dialogique de Kingsolver donne Ă voir un syncrĂ©tisme Ă la lumiĂšre duquel se rĂ©vĂšle une relecture des mythes ChrĂ©tiens, rendus compatibles avec dâautres cultures et dâautres mythes. Je dĂ©fends ici lâidĂ©e que lâĂ©criture de Kingsolver articule un double mouvement, Ă la fois de dĂ©mythologisation et, paradoxalement, de re-mythologisation. Dans un premier temps sont abordĂ©s les Ă©lĂ©ments magiques et religieux qui se prĂȘtent Ă des lectures fantastique, Ă©trange ou rĂ©aliste magique. Câest ensuite une interprĂ©tation psychanalytique qui est proposĂ©e, la nouvelle Ă©tant rĂ©gie par un retour du refoulĂ© qui culmine dans un moment de rĂ©vĂ©lation enchanteur. Enfin, lâattention est portĂ©e au rĂŽle jouĂ© par lâObeah Man, vĂ©ritable Janus Antillais, dont le personnage fonctionne, tel le dieu romain des passages, comme mĂ©diateur entre le blanc et le noir, la vie et la mort, le Christianisme et lâObeah, la magie et le rĂ©el, le rĂȘve et la vie consciente, le mythe et la nouvelle. La nouvelle de Kingsolver est donc un rĂ©cit de lâentre-deux, marquĂ© par la liminalitĂ©. On peut en proposer une lecture Ă©co-fĂ©ministe, ou postcoloniale ; finalement cette nouvelle de Barbara Kingsolver fait poindre une rĂ©vĂ©lation numineuse et anti-dualiste, pouvant revĂȘtir une dimension universelle
Barbara Kingsolver - b. 1955
Barbara Kingsolver was born in 1955 and grew up in rural Kentucky. Her college education in Indiana and Arizona developed her interests as a scientist. She mostly studied ecology and biology, in which she received her Masters of Science degree, while simultaneously taking creative writing classes. She gradually became a full-time fiction writer after having covered a broad range of professions, including copy editor, housecleaner, X-ray technician, archaeologist, biological researcher and tra..
Unreal, Fantastic, and Improbable âFlashes of Fearful Insightâ in Annie Proulxâs Wyoming Stories
Si lâĆuvre dâAnnie Proulx a fait lâobjet de nombreuses Ă©tudes ces dix derniĂšres annĂ©es, la plupart se sont attachĂ©es dâune part Ă ses romans, et dâautre part, au dĂ©terminisme gĂ©ographique en jeu dans sa fiction, Ă la construction des genres ou au mythe du cowboy. Cet article sâintĂ©resse aux trois recueils de nouvelles du Wyoming dâAnnie Proulx, et aux apparitions et disparitions fantastiques et magiques qui les caractĂ©risent. Car ces nouvelles exhibent par endroits un certain rĂ©alisme, ancrĂ©es comme elles le sont dans lâĂ©tat le moins peuplĂ© des Etats Unis et un contexte socio-historique aisĂ©ment identifiable ; mais, par ailleurs la part de fiction est mise en relief par de nombreuses incursions dans des modes fantastiques et magiques. Cet article examine dans un premier temps le rĂ©gionalisme prĂ©gnant de ces nouvelles, empreintes dâune couleur locale et dâeffets rĂ©alistes qui rapprochent ces trois recueils dâarchives ou de mĂ©moires rĂ©gionaux. Il sâagit ensuite dâanalyser les Ă©vĂ©nements improbables qui viennent contrecarrer le rĂ©alisme et le naturalisme dans ces rĂ©cits brefs, en sâappuyant sur les dĂ©finitions du fantastique donnĂ©es par Tzvetan Todorov, du rĂ©alisme magique selon Wendy Faris, et de la distinction entre ces deux modes Ă©tudiĂ©es par Amaryll Chanady. Enfin, la dimension parodique de ces nouvelles sâassocie Ă un jeu autorĂ©fĂ©rentiel typiquement postmoderniste qui vient souligner le caractĂšre omnivore du genre de la nouvelle, qui ingĂšre et renvoie aussi bien Ă des mythes anciens que de nombreux rĂ©cits tirĂ©s du folklore et des contes de fĂ©es. Ainsi, câest finalement le pouvoir de la nouvelle elle-mĂȘme qui est mis en relief par ces nouvelles de Proulx, qui parviennent Ă mĂ©langer les codes, les genres et les modes avec cynisme et dĂ©rision, tout en crĂ©ant dâintenses moments de rĂ©vĂ©lation ou des symboles frappants
AimĂ© CĂ©saireâs Une Saison au Congo and Barbara Kingsolverâs The Poisonwood Bible in the Light of Postcolonialism
Sâil peut sembler problĂ©matique dâinclure dans le domaine de la littĂ©rature postcoloniale un auteur de nationalitĂ© amĂ©ricaine sans aucun lien apparent avec le Congo, oĂč se dĂ©roule The Poisonwood Bible (1998), nous chercherons cependant Ă dĂ©montrer que le roman de Barbara Kingsolver entre en effet dans le domaine de la littĂ©rature postcoloniale, ne serait-ce que par ses intentions, ou de façon mĂ©taphorique, comme lâaffirme du reste Feroza Jussawalla. Il sâagira ici de comparer la façon dont AimĂ© CĂ©saire, dans la piĂšce Une saison au Congo (1966), et Barbara Kingsolver traitent de lâHistoire du Congo, et, notamment, leurs caractĂ©risations du personnage de Patrice Lumumba. Par lâĂ©tude des convergences et des divergences entre ces deux Ćuvres appartenant respectivement Ă des peuples anciennement colons et colonisĂ©s, nous nous pencherons sur les diffĂ©rentes stratĂ©gies adoptĂ©es par Kingsolver et CĂ©saire afin de reprĂ©senter le passĂ©, de remettre en question le discours colonialiste et de mettre Ă mal un certain afro-pessimisme. Nous Ă©tudierons en outre quels rĂŽles ces deux Ćuvres semblent attribuer Ă la littĂ©rature quant Ă la mĂ©moire, Ă la reterritorialisation de lâhistoire et de lâhistoire des discours. Nous nous attacherons enfin Ă Ă©tablir ce qui fait la spĂ©cificitĂ© de lâĂ©criture kingsolvĂ©rienne et qui se rattache Ă une approche de la littĂ©rature Ă©minemment syncrĂ©tique, approche que nous avons qualifiĂ©e dâ"oxymoronique
Le chant de la matiÚre pour désensorceler les modernes : vers une écopoétique du réenchantement à travers quelques romans des Appalaches
Cet article Ă©labore une lecture Ă©copoĂ©tique de trois fictions environnementales contemporaines des Appalaches : Prodigal Summer de Barbara Kingsolver (2000), Strange as this Weather Has Been, de Ann Pancake (2007) et Above the Waterfall, de Ron Rash (2015). Je sonde ici leur Ă©criture en quĂȘte dâĂ©lĂ©ments attestant que les humains possĂšdent la capacitĂ© de sâaccorder au « chant du monde » (Jean Giono), au « chant de la terre » (Jonathan Bate), ou encore, à « la musique sauvage de la terre » (Mark Tredinnick). Pour aborder la question du rĂ©enchantement, je me fonde sur lâĂ©tymologie du verbe « enchanter », du latin incantare, qui renvoie Ă un envoĂ»tement ou une incantation, au fait dâaffecter la perception du monde en nous donnant Ă entendre des voix et des rythmes. En nous invitant Ă faire musique avec le monde, lâĂ©copoĂ©tique peut inverser le sort jetĂ© sur lui par la science moderne, qui, comme lâaffirme lâĂ©cofĂ©ministe Starhawk, a aliĂ©nĂ© les humains Ă leur environnement, nous faisant croire en notre sĂ©paration dâavec le monde naturel. En rĂ©ponse aux problĂšmes que pose notre entrĂ©e dans lâAnthropocĂšne, les Ă©copoĂštes des Appalaches nous appellent Ă cultiver la rĂ©silience inhĂ©rente Ă nos « naturecultures » (Donna Haraway) et Ă rĂ©imaginer des langages qui rĂ©sistent Ă lâillusion dâexister hors-sol.Arguing for the need to re-enchant the world, that is, to sing in tune with the world, this paper dwells on ecopoetic readings of three contemporary, Appalachian environmental novels: Prodigal Summer by Barbara Kingsolver (2000), Strange as this Weather Has Been, by Ann Pancake (2007), and Above the Waterfall, by Ron Rash (2015). My aim is to probe whether humans might be attuned to the âsong of the worldâ (Jean Giono), to âthe song of the earth,â (Jonathan Bate), or again, to âthe landâs wild musicâ (Mark Tredinnick). Keeping in mind that to enchant, from the Latin incantare, may mean to sing along with, or may refer to an incantationâto the action of casting a spell with soundsâthis paper explores how ecopoetics relays the voices and rhythms of the living world in a way that affects our perception of it. My claim is that ecopoetics is needed to reverse the spell cast onto the world by modern science, a form of ensorcellment that, to take up ecofeminist Starhawkâs claim, has magically alienated humans from their environment, making us believe in humansâ exceptionalism and separation from the natural world. As a response to the problems tied to the Anthropocene, Appalachian ecopoets call upon us to cultivate the resilience inherent in our ânatureculturesâ (Donna Haraway), and to reinvent languages that can resist the illusion of living lives uprooted from the earth
La naturaleza silente como un âȘZarpazo en la Tripaâ«: terapias de choque epifĂĄnicas en los relatos de Wyoming de Annie Proulx
Este artĂculo estĂĄ centrado en la representaciĂłn de una naturaleza asombrosa y despiadada que cohesiona las tres colecciones de historias sobre Wyoming de Annie Proulx. Intento
demostrar que con esas metĂĄforas poderosas del silenciamiento de la naturaleza y de la
forma en que Ă©sta contraataca, los relatos de Proulx apelan a una consciencia imperiosa de
la interconexiĂłn entre la humanidad y su ambiente natural. Si los finales fatalistas de los
relatos de Proulx sugieren muy pocas veces una epifanĂa de sus personajes, su uso extensivo
de una justicia poĂ©tica brutal y el sarcasmo de sus voces narrativas hace que la epifanĂa se
produzca en sus lectores, una suerte de terapia de choque, que provoca asimismo una visiĂłn
del mundo biocĂ©ntrica. Este artĂculo concluye que las historias de Wyoming de Proulx ofrecen
uno de los mejores ejemplos de âecologĂa narrativa,â tomando el tĂ©rmino de Alex Hunt, o
lo que Adrian Rainbow denomina âtextos ecoliterarios,â ya que se sitĂșan en el marco real
de relaciĂłn con la naturaleza, y hacen que los lectores sean conscientes de la necesidad de
nuevos paradigmas y mitologĂas opuestos al mito nocivo del individualismo, y convirtiendo
la naturaleza en un intrincado y sagrado cĂrculo.This article focuses on the representation of an awesome and unforgiving nature which
welds together the three collections of Annie Proulxâs Wyoming stories. My claim is that
with potent metaphors of humansâ silencing of nature and of the way the latter strikes
back, Proulxâs short fiction calls for urgent awareness of the interconnectedness between
humankind and its natural environment. If Proulxâs fatalistic short story endings rarely suggest
an epiphany on the part of the characters, her overarching uses of brutal poetic justice
and sarcastic narrative voices bring about reader epiphanies, working as shock therapy, and
thus prompting a biocentric view of the world. This article argues that Proulxâs Wyoming
stories offer one of the best examples of ânarrative ecology,â to take up the term coined by
Alex Hunt, or what Adrian Rainbow calls âecoliterary texts,â in that they engage in a real
relationship with nature, and bring about readersâ awareness of the need for new paradigms
and mythologies working against the noxious myth of individualism, and pointing to nature
as an intricate sacred hoop
Barbara Kingsolverâs. Homeland and Other Stories about Another America
DĂšs le titre, le recueil de nouvelles Homeland and Other Stories oriente lâattention du lecteur vers lâimportance du traitement de lâespace et des terres dâAmĂ©rique Ă la source de lâimaginaire de Barbara Kingsolver. Ses origines Cherokee, son enfance en milieu rural et sa formation initiale en temps que biologiste spĂ©cialisĂ©e dans lâĂ©cologie se mĂȘlent chez cet auteur Ă une sensibilitĂ© poĂ©tique exacerbĂ©e, et par ailleurs fort imprĂ©gnĂ©e des sublimes paysages de lâArizona oĂč elle a longtemps rĂ©sidĂ©. Les mĂ©taphores gĂ©ologiques abondent de fait tout au long du recueil. Les rĂ©cits puisent de plus Ă la signification de lieux mythiques, tantĂŽt pour les valeurs que ces lieux vĂ©hiculent, tantĂŽt Ă lâinverse afin de les resĂ©mantiser. La mention des lieux, rĂ©els ou fictifs, vient en dĂ©finitive alimenter un rĂ©seau de significations implicites essentiel Ă lâĂ©tendue de la nouvelle, qui se dĂ©ploie en profondeur plutĂŽt quâĂ la surface rĂ©duite occupĂ©e par le texte. Barbara Kingsolver interroge tout au long du recueil les notions de territoires et dâappartenance, tant dans leurs dimensions spatiale quâidentitaire et culturelle. Les personnages de Kingsolver incarnent diverses formes dâexil au sein de la civilisation postmoderne. Le courant transcendantaliste et la dimension mythopĂ©ique de lâĂ©criture de Kingsolver, qui se nourrit amplement des symboles offerts par la nature, dĂ©voilent la capacitĂ© de lâĆil humain Ă se frayer le chemin dâun retour Ă la terre, et rĂ©vĂšlent lâappartenance premiĂšre de lâhomme au cosmos. Enfin, le traitement de lâespace, qui sert tout dâabord Ă guider le lecteur dans le parcours hermĂ©neutique du recueil, indique les voies de la transcendance textuelle
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