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    L'entrelacs des voix chez Philippe Delerm

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    International audienceL'entrelacs des voix, nous le chercherons dans des paroles rapportées subreptices qui percent, qui s'infiltrent, qui s'insinuent. Paradoxalement ces instantanés destinés à la lecture muette, qui cherchent à décrire des plaisirs minuscules, silencieux, délicats, des joies individuelles ou égoïstes, loin du monde tonitruant, bruissent. De nombreux textes delermiens s'avèrent finalement à l'usage ancrés dans ce qui constitue la parole standardisée de la collectivité, celle à laquelle l'auteur comme le lecteur appartiennent. Car Delerm donne une belle illustration de notre usage presque volontaire des stéréotypes langagiers : à notre insu (mais peut-être aussi parfois de notre plein gré), une conversation préformatée s'installe dans notre quotidien. Et contrairement à beaucoup d'autres auteurs contemporains qui ridiculisent cette pauvreté et cette fatalité du lieu commun, Delerm ne semble pas se plaindre que ce prêt-à-porter socio-verbal soit à notre service, accessible, si peu cher, si confortable... et finalement si poétique, comme des voix mélancoliques

    L'univers poétique de Barbara

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    International audienceC'est drôle de lire une anthologie des chansons de Barbara ; drôle de regarder les textes de celle qui se proclamait dès 1964 « femme qui chante » sans entendre la voix qui les accompagne, qui les porte. Est-ce pour autant une hérésie ? Non, c'est drôle, tout simplement. Et cette bizarrerie devient, une fois consentie, un privilège extraordinaire, pour elle et pour nous. D'abord parce que tout le monde n'aime pas écouter Barbara : avant 64, qu'elle imite la gouaille parisienne ou qu'elle « grandiloquente » en râpant les gutturales, Barbara adopte un phrasé qui peut déplaire et pas seulement à la jeune génération. Après 72, il y a un chuintement dans le grain de voix sur les consonnes sifflantes. Après 81, une raucité, séquelle des crises d'asthme, ne fera, bon an mal an, que s'accentuer jusqu'au dernier récital de Tours en 94. Et que ceux qui ne voudraient pas entendre Barbara puissent la lire, c'est une aubaine. Beaucoup d'écrivains terniraient leur réputation si nous devions les découvrir à travers leur seule récitation. Ensuite parce qu'en changeant de support, les mots changent de valeur, ils jouent imprévisiblement entre eux sans la musique qui les aspire et les teinte, sans la voix qui les accapare et les soude (le contraire est d'ailleurs tout aussi vrai, et les phrases d'un texte théâtral qu'on se contente de lire trouveraient un écho différent lors de la représentation à laquelle on assiste : ce qui compte, c'est donc le passage d'un statut de lecteur à celui d'auditeur ou inversement, et l'attention particulière que ce passage nécessite). Et que ceux qui ont tant de fois écouté et usé les paroles de Barbara puissent les redécouvrir, c'est une seconde chance. Enfin parce que si le papier les glace, ces mots prennent une nouvelle dimension, aux allures de revendication poétique. Notre regard de lecteur pourra les isoler, les ralentir, les épingler avec tout le poids dont les a lestés l'auteur. « Je veux ce mot là, c'est ça et pas autre chose que je veux dire », déclare-t-elle en 1970

    Chevillard : Jeu digresse donc je progresse

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    International audienceC'est le caractère délirant et débordant de la texture des nombreux ouvrages pseudo romanesques d'Eric Chevillard qui souvent retient (l'attention de) ses lecteurs. Sous une apparente progression de l'intrigue ou du moins du propos, Chevillard se répand en détours sarcastiques qui remettent en cause la notion même de digression, telle que l'université tente de la cerner, en linguistique pragmatique comme en littérature contemporaine. Nous chercherons donc la nature particulière (métaleptique, métalinguistique, métadiscursive) de ces parenthèses ménagées en toute conscience littéraire par l'écrivain byzantin

    "Pratiques durassiennes sous pastiche oulipien"

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    International audienceA partir d'un court texte de l'auteur oulipien Hervé Le Tellier, et en confrontant sontravail à d'autres imitations moins réussies du style durassien, nous tenterons de dégager ce quirelève de la parodie (thème du regard et notamment du regard biaisé, mention ironique) et ce quirelève du pastiche (temps verbaux, pronoms, parataxe). L'habileté de cette contrefaçon reposesurtout sur le point de vue paradoxal, cher à Duras, à travers lequel dans une syntaxe limpidel'évidence devient mystère

    Défigements en chanson

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    International audienceConstruction linguistique de la plus haute importance par sa fréquence, le figement propose dans la langue des unités polylexicales mémorisées. Et il se mesure à la manière dont le défigement déroute les utilisateurs préformatés que nous sommes. Très employé par la publicité pour son caractère surprenant, le défigement est aussi très courant en chanson de Brassens à Aldebert et notamment dans la génération actuelle avec le rap et son goût pour la "phase". Après une typologie bien illustrée de ses manifestations dans le répertoire, nous chercherons quelles sont les vertus de cette figure littéraire (connivence avec l'auditeur, comique et fantaisie, effet de surprise, syllepses et double entente, ironie). Et nous chercherons à prouver combien ses avantages ne sont pas à chercher seulement du côté de la simple plaisanterie ou du "bon mot"

    L'écriture cinématographique dans Le Livre pour enfants, roman de voix

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    International audienceIl pourrait paraître tout à fait paradoxal de chercher le cinéaste Christophe Honoré sous l'écrivain de roman pour adultes qu'il a été jusqu'à la parution en 2005 de son dernier ouvrage Le Livre pour enfants, roman revendiqué, faute d'arriver au modèle d'autobiographie que l'auteur cherche néanmoins. Effectivement, l'ouvrage est constitué par des éléments prépondérants qui l'éloignent souverainement de ce que serait une oeuvre dont l'écriture et la composition permettraient une transposition aisée dans le domaine cinématographique. Pourtant le sort particulier qu'Honoré dans son livre accorde aux dialogues, à la voix des personnages, aux bribes de discours, aux chansons et autres bruits de la vie donnerait assez l'idée d'une bande-son de l'existence, qui saurait inspirer le cinéaste comme l'écrivain

    "Les gestes androgynes de l'enfant chez Colette"

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    International audiencePrivé d’une pensée sociale, l’enfant, chez Colette, se comporte indifféremment. Dès qu’il n’est plus sous le regard moralisateur d’un adulte, il adopte au gré de ses activités des attitudes qu’on pourrait dire asexuées même si pour autant elles ne sont pas dénuées de perversité puisque la perversité n’est l’apanage d’aucun des deux sexes en particulier.Pourtant, malgré sa volonté ironique et ludique de brouiller les identités, l'auteur des Claudine reste convaincue que par nature le geste féminin est féminin. Mais qu'en est-il de l'autre côté de l'adolescence, tout près de la maturité sexuelle

    Chanson mayonnaise : comment la chanson par sa performance ré-enchante le populaire

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    International audienceLa chanson est un genre à part entière qui est populaire, qui doit l'être et qui doit s'efforcer de le rester malgré ses légitimes ambitions littéraires et poétiques. Une fois cet axiome solennellement posé, comme un pari sur l'avenir, il faut se hâter d'ajouter qu'elle ne risque pas de toute façon de s'affranchir et de se démarquer de sa veine populaire tant qu'elle est une performance vocale et scénique (ce qui fait, intrinsèquement pour la première, accessoirement pour la seconde, partie de son cahier des charges), et une industrie. Ainsi toujours funambule, la chanson hésite et se crée au croisement de deux aspirations : celle de parvenir tout de même au champ littéraire avec son « truc en plus » (musique et performance) et celle d'assumer sa différence générique qui fonde et exige sa popularité. Or le seul fait de chanter l'ordinaire ne le transforme-t-il pas en extraordinaire? Le mot alchimie, qu'on utilise d'ordinaire en évoquant le miracle de la voix qui concilie les deux systèmes hétérogènes, pourrait effectivement paraître plus gracieux que notre mayonnaise mais il donne l'idée d'une transformation d'un élément imparfait en un élément parfait ou alors l'idée d'une fusion qui rendrait tout à coup inséparables les éléments au point qu'il serait alors impossible de les identifier après cette opération magique ; or ce serait davantage l'idée d'une émulsion que nous voudrions promouvoir, justement d'une mayonnaise

    Duras : Gallimard ou Minuit ?

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    International audienceUne certaine confusion existe autour de la maison d'édition à laquelle appartenait Marguerite Duras. Par exemple, Patrick Rambaud en la pastichant sous le pseudonyme de Marguerite Duraille dans Virginie Q. puis Mururoa, mon amour, publiés chez Jean-Claude Lattès, adopte une couverture qui imite celle, blanche à liséré bleu, des Éditions de Minuit. Certes la première contre-façon intitulée Virginie Q, s'inspire de l'Emily L. publié en 1987 chez Minuit, trois ans avant la rupture de Duras avec Jérôme Lindon. Et L'Amant dont le succès fixe dans les esprits le rapprochement Duras/Minuit fut aussi publié au 84 rue Bernard-Palissy : ce qui donne deux motifs à Patrick Rambaud d'imiter la couverture des éditions de Minuit et d'associer Duras à celles-ci. Or Duras, comme Robert Antelme, son époux, comme Dionys Mascolo, le père de son fils Jean, travaillent chez Gallimard ou pour sa collection de La Pléiade, et ils publient sous le giron de Gaston, Robert et Claude, flanqués d'un Raymond Queneau, qui fut un intime de Duras. Les trois quarts de la vaste production romanesque et théâtrale de Duras appartiendront au catalogue Gallimard et celle-ci ne fait que trois incartades, trois infidélités dans sa carrière d'écrivain : en 58 pour Moderato cantabile, en 1969 pour Détruire dit-elle et à partir de 1974 pour Les Parleuses, Le Camion et Les Lieux de Marguerite Duras jusqu'aux Yeux bleus cheveux noirs et Emily L. en 1987. Mais si relativement bénignes que puissent paraître ces embardées chez Lindon, l'histoire littéraire leur donnera de lourdes conséquences. Nous voudrions interroger au-delà du point de vue éditorial, dans le microcosme littéraire, ce que ces trois incartades ont favorisé surtout d'un point de vue stylistique, esthétique et (pourquoi pas ?) politique dans la carrière de Marguerite Duras
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