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    L’obligation de résidence : un dispositif juridique au service d’une forme de travail non libre

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    En vertu du Programme des aides familiaux résidants (PAFR/Live-in Care Program), en vigueur depuis 1992, ces travailleuses du care ont notamment l’obligation de résider chez leurs employeur-e-s canadien-ne-s et doivent souscrire à cette obligation, avec tout ce qu’elle implique en termes de conditions de vie, de travail et de relations de travail, pour une période minimale de deux ans pour devenir éligible à la résidence permanente.Nous avançons ici que cette obligation de résidence participe d’un « arsenal juridique » qui non seulement exprime, mais (ré)organise une « forme transitionnelle d’exploitation » qui passe par une mainmise sur les corps et qu’il faut situer dans la continuité des rapports d’esclavage, de servage, mais aussi de « sexage » théorisés par Colette Guillaumin (1978).Pour développer cette hypothèse de travail, nous procéderons en trois temps. Après un retour sur l’historique du PAFR, nous rappellerons brièvement son contenu actuel (I). Nous tenterons ensuite de montrer en quoi les travailleuses résidantes sont privées du droit à la vie privée que nous interprétons ici comme le droit de disposer d’un espace-temps de vie hors travail (II). Dans un troisième et dernier temps, nous reviendrons sur la démonstration de Colette Guillaumin pour insister sur le caractère illimité dans le temps de l’usage qui peut être fait de la force de travail des employées de maison. Cet article s’appuie sur les tout premiers résultats d’une recherche conduite en partenariat avec PINAY (Organisation des femmes Philippines du Québec) dans le cadre du service aux collectivités de l’UQAM. Il tire l’essentiel de ses lignes directrices des analyses des militantes organisées dans PINAY.As part of the Live-in Care Program (LICP), that came into force in 1992, care workers must reside with their Canadian employers and must abide by this residency obligation for a minimum period of two years in order to become eligible for permanent residency. Considering issues of living and working conditions as well as labour relations we contend, in this article, that this residency obligation is part of a “legal arsenal” that is characteristic of, and that (re)organizes a “transitional form of exploitation” exercised through the control of bodies and which can be situated within the continuum of relations of exploitation that include slavery, serfdom and “sexage” as theorized in the works of Colette Guillaumin (1978).We will proceed in three stages in order to develop this working hypothesis. First, we revisit the history of LICPand discuss its current content (I). We then attempt to demonstrate how the rights to private life, understood as the right to freely dispose of one’s time and space outside of work hours, are taken away from these resident workers (II). Third and lastly, using arguments developed by Colette Guillaumin, we emphasize the lack of clear temporal limits that regulate the use of the labour force by employers of these house workers. This article uses the first results collected from a research partnership with PINAY (the Philippina Women’s Organization of Quebec) in the context of UQAM’s community service program. The main arguments presented in this paper follow the analytical work done by activists organized within PINAY

    Quelle conceptualisation de l’exploitation pour quelle critique intersectionnelle?

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    Cet article s’appuie sur une recherche centrée sur les conditions de vie, de travail et de lutte des travailleuses domestiques philippines soumises au Programme canadien d’immigration intitulé « Programme des aides familiaux » (PAF) pour mettre en évidence l’insuffisance des critiques intersectionnelles et conceptions de l’émancipation qui – loin de repartir des acquis du féminisme matérialiste (des redéfinitions extensives du travail et de l’exploitation) – contournent le problème du travail « non libre », soit celui des modes d’exploitation irréductibles au capitalisme. En contrepoint, l’auteure défend l’actualité du féminisme matérialiste, de la théorisation de Colette Guillaumin en particulier, pour l’analyse des formes transitionnelles d’exploitation, telles qu’elles se (re)déploient dans le secteur de la domesticité. L’auteure soutient, finalement, l’hypothèse d’une recomposition du « sexage » qui participe pleinement de la dynamique par laquelle Sexe, Classe, Race se réorganisent aujourd’hui.In this article, the author builds her work on a research focused on living conditions, working conditions and conditions of struggles of the Philippine domestic workers subjected to the canadian Live-In Care Program to highlight the insufficiency of intersectional critics which – far from using knowledge of materialist feminism (extensive redefinition of labor and exploitation) – by-pass the problem of « unfree labor », that is that of irreducible modes of exploitation in capitalism. As a counterpoint, the author defends the actuality of materialist feminism, the theorising of Colette Guillaumin especially, for the analysis of transitional forms of exploitation which can be observed in the domestic work’s sector. The author supports, finally, the hypothesis of a reconstruction of « Sexage », which participates entirely of the dynamics by which Sex, Class, Race reorganise themselves today.Esta contribución se basa en la investigación centrada en las condiciones de vida, el trabajo y las luchas de las trabajadoras domésticas filipinas sometidas al Programa canadiense de cuidadores y niñeras extranjeras para poner de relieve la falta de críticas interseccionales y concepciones de la emancipación que – lejos de partir de lo adquirido en el feminismo materialista (de las extensas redefiniciones del trabajo y de la explotación) – esquivan el problema del trabajo « no libre » o los modos de explotación irreductibles al capitalismo. En contrapunto, la autora defiende la actualidad del feminismo materialista, teorizando Colette Guillaumin, en particular, para el análisis de las formas transitorias de explotación, tales como se (re) despliegan en el sector de la domesticidad. Sostiene, por último, la hipótesis de una recomposición del « sexado » que participa plenamente en la dinámica por la cual Género, Clase, Raza se reorganizan hoy

    Les apports de la sociologie du genre Ă  la critique du travail

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    Après avoir fait le point sur les différents courants traversant « la sociologie du genre » et précisé ses rapports – faits de ruptures et de continuités – à la sociologie du travail, Elsa Galerand et Danièle Kergoat tentent de montrer en quoi le courant du féminisme matérialiste, en particulier, interpelle et renouvelle la sociologie du travail, tant sur le plan conceptuel que sur celui des objets et des champs d’analyse. Depuis la théorisation du travail domestique vers une redéfinition extensive du concept de travail en passant par la conceptualisation des rapports sociaux de sexe et de la division sexuelle du travail, c’est finalement le potentiel critique et subversif de cette sociologie qu’il s’agit de mettre en évidence.Having analysed the different currents populating the sociology of gender and specified any continuous or discontinuous ties to the sociology of work, Elsa Galerand and Danièle Kergoat try demonstrate how the current of materialist feminism has renovated the sociology of work and asked particular questions of it, whether conceptually or in terms of analytical objects and fields. Ever since domestic work was re-theorised to achieve a more extensive redefinition of the concept of work – including a conceptualisation of sexualised social relations and the sexual division of labour – what must ultimately be revealed is this kind of sociology’s critical and subversive potential.Después de hacer un balance de las diferentes corrientes que atraviesan la “sociología de género” y haber definido sus relaciones hechas de rupturas y continuidades con la sociología del trabajo, Elsa Galerand y Danièle Kergoat tratan de exponer la manera en que la corriente del feminismo materialista, en particular, interpela y renueva a la sociología del trabajo, tanto en el plano conceptual como en el de los objetos y los campos de análisis. Desde la teorización del trabajo doméstico hasta una redefinición extensiva del concepto de trabajo, pasando por la conceptualización de las relaciones sociales de sexo y de la división sexual del trabajo, de lo que se trata finalmente es de poner de relieve el potencial crítico y subversivo de esta sociología

    Consubstantialité vs intersectionnalité? À propos de l’imbrication des rapports sociaux

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    Cet article consiste à situer la théorisation de la « consubstantialité des rapports sociaux » (Kergoat, 1978-2012) au regard des tensions qui traversent actuellement la réflexion sur l’articulation des systèmes d’oppressions. Prenant acte d’oppositions persistantes dans le champ de « la recherche intersectionnelle », il montre en quoi le concept de « consubstantialité des rapports sociaux », en raison du contexte dans lequel il s’enracine, se démarque d’autres cadrages existants. D’une part, il envisage l’imbrication des différentes oppressions depuis une compréhension dynamique des rapports de pouvoir. D’autre part, il se rattache au bagage théorique issu du féminisme matérialiste qu’il propose de retravailler plutôt que d’écarter les notions clés de l’héritage marxien que la vague culturaliste tend à évacuer. C’est finalement l’efficacité et l’actualité sociologique de cette conceptualisation des rapports de pouvoir et des relations qu’ils entretiennent les uns avec les autres qui sont mises en évidence ici.The purpose of this paper is to locate theories surrounding the concept of “consubstantialité des rapports sociaux” (co-substantiality of social relations or CSSR) (Kergoat, on 1978-2012) within current tensions in feminist thought on intersectionality. Noting the persistent oppositions that mark the intersectionality literature, this article shows how the notion of CSSR, by virture of its contextual origins, distinguishes itself from other existing theoretical frameworks. On the one hand, this concept interprets the interlocking of different systems of oppressions from a dynamic understanding of power relations. On the other hand, the materialist feminist’s interpretations of gender relations propose to rework key Marxian contributions, which stands in opposition to the culturalist rejection of the Marxian legacy. Finally, this contribution highlights the sociological relevance of this concept in order to understand the dynamic relations between power social relations

    Chapitre 8. La résistance au prisme de la sociologie des rapports sociaux : les enjeux du passage au collectif

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    À l’image d’autres catégories d’analyse (« émancipation », « subversion »…) régulièrement convoquées par les sociologues qui s’intéressent aux mouvements sociaux, la notion de « résistance » est à la fois une clameur récurrente des groupes mobilisés et une notion suffisamment spongieuse pour que toute pratique d’opposition ou de refus puisse se diluer dans la grammaire des résistances. Si l’existence d’un point de bascule ou de rupture entre la résistance et la reproduction de la domination s..

    Le droit à la liberté face aux formes modernes de travail « non libre » : le cas de l’obligation de résidence chez l’employeur

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    Cet article interroge la portée du droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, en matière de protection des travailleurs dépendants qui sont de facto assignés à des formes de travail non libre. L’analyse est centrée sur l’obligation de résidence en tant que mécanisme particulier de privation de liberté. Les auteurs avancent que si, selon la jurisprudence constante de la Cour suprême, le droit à la liberté de sa personne ne protège pas le droit au travail ou le droit à l’emploi, il n’exclut pas certaines dispositions du droit du travail (la réglementation des rapports entre employés et employeurs) de son champ de protection. Dans cette perspective, le droit notamment de ne pas être soumis au travail forcé, de pouvoir quitter un emploi et un employeur, de ne pas vivre chez son employeur et d’être payé pour toutes les heures travaillées pourrait être protégé par les garanties offertes par l’article 7 de la Charte. L’obligation de résider chez l’employeur, qui s’impose actuellement de facto aux travailleurs agricoles et travailleuses domestiques, pourrait alors être contestée sur le fondement du droit à la liberté.This article examines the extent to which the right to liberty, as guaranteed under section 7 of the Canadian Charter of Rights and Freedoms, provides protection to dependant workers, de facto subjected to forms of unfree labour. The analysis is focussed on the live-in requirement, acting as a specific mechanism of liberty deprivation. The authors argue that following a consistent case law tendency of the Supreme Court, the right to liberty of the person does not protect the right to work or the right to employment, but it does not preclude certain provisions of labour rights (the regulation of the relations between workers and employers) from its scope of protection. In this regard, the right to not be submitted to forced labour, to quit a job and an employer, to not live in the house or on the property of the employer and to be paid for all hours worked, notably, could be protected under section 7 of the Charter. The live-in requirement that is de facto imposed upon farm workers and domestic workers could therefore be challenged on the basis of the right to liberty
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