28 research outputs found

    Numérique et humanités : de l’ancillarité à la fécondité grâce à la modélisation computationnelle des connaissances

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    La transformation numérique de la société se divise en plusieurs étapes que suivent également les humanités numériques. Une première période réserve le numérique à de grands projets ou organismes, principalement pour des traitements statistiques. Du milieu des années 1970 au début des années 2000, l’ordinateur personnel et la bureautique induisent une première phase de croissance des humanités numériques : bases de données, numérisation de textes et instrumentation de la publication. Depuis la fin des années 1990 se développent de nouveaux outils de collecte, d’organisation et d’accès aux contenus numériques, y compris sur les volumes considérables des données massives (big data). Pour l’avenir, nous plaidons ici en faveur d’un élargissement des relations entre sciences humaines et sociales et numérique, par l’exploitation non seulement des technologies mais également des idées et méthodes du numérique, notamment computationnelles. Nous illustrons notre propos par quelques exemples d’analyse computationnelle en histoire.The digital transformation of society also affects the humanities and social sciences (HSS). The digital humanities follow the general pattern of digital history, which we will briefly describe. A first period limits digital technology to large projects or organisations, mainly for statistical processing. From the mid-1970s to the early 2000s, the personal computer and common IT software induce a first phase of growth in the digital humanities: databases, digitisation of texts and publishing tools. Since the end of the 1990s, new tools have been developed for collecting, organising and accessing digital content, including the considerable volume of big data. We plead here for an amplification of the relationship between HSS and computer science, exploiting not only technologies, but also ideas and methods, especially computational thinking. To illustrate this point, we present some examples of computational analysis in the field of history

    Synthèse et perspectives

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    Les conclusions qu’il est possible de tirer de ces journées d’étude sont de différents ordres, selon le point de vue adopté. D’un premier point de vue, qu’on peut appeler “historique”, on peut les regarder comme un moment d’une histoire dont les principales étapes sont brièvement résumées en introduction. Quel était ce moment ? Un certain nombre de questions avaient été élaborées en préparation des journées par le cercle restreint de ses sept organisateurs tous historiens des sciences ou épis..

    Modalités quantiques, interprétation de la Mécanique Quantique et de la Relativité Restreinte et proposition d'un test expérimental pour les mondes multiples

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    This paper investigates the physical, experimentable, reality of multiple worlds of Quantum Mechanics. On the basis of a reflection on the fundamental principles of physics (sec. I.A), firmly rejecting the incomprehension imperative often associated with Quantum Mechanics (sec. I.B), and strongly relying on an experimental methodology (sec. I.B) and on the superposition principle, we propose a unified interpretation of quantum physics (sec. II), the potential world modal interpretation. This framework makes multiple-world and pilot-wave interpretations converge. It also clarifies the concepts of potential world and sub-quantical potential particle. Then, we turn to Relativity and sketch out an emergence of Special Relativity without "rods and clocks" (sec. III.A) providing a cinematic and phenomenal interpretation of SR. We suggest to distinguish between given and received gravitation and reason on it at a sub-quantical level (sec. III.B) and formulate the hypothesis that weight is active between potential worlds (sec. III.C). If this effect follows the von Neumann chain, it should be observable with available techniques (sec. III.D). If correct, this hypothesis could contribute explanations for cosmic inflation, dark matter and the cosmological constant problem (sec. IV). Moreover, our cinematic interpretation of relativity in an expanding universe might lead to a justification of the MOND theory (sec. IV.B.3).Cet article explore la question de la réalité physique, expérimentable, des mondes multiples de la Mécanique Quantique. En nous appuyant, d'une part, sur une réflexion sur les principes fondamentaux de la physique (sec. I.A), rejetant résolument l'impératif d'incompréhension qui affuble souvent la Mécanique Quantique (sec. I.B) et s'appuyant sur des principes méthodologiques fondés sur l'expérimentation (sec. I.B), et, d'autre part, sur le principe de superposition, nous proposons une interprétation unifiée de la physique quantique (sec. II), l'interprétation modale des mondes potentiels. Celle-ci fait converger les interprétations de type mondes multiples et les interprétations de type onde-pilote et donne une définition précise des concepts de monde potentiel et de particule potentielle ou subquantique. Nous esquissons ensuite un mécanisme d'émergence de la Relativité Restreinte à partir de présupposés subquantiques simples (sec. III.A), sans “règle” ni “horloge”. Ceci fonde une interprétation cinématique et phénoménale de la Relativité Restreinte. En distinguant entre gravitation reçue et donnée et en raisonnant à un niveau subquantique (sec. III.B) nous formulons l'hypothèse que le poids agit entre monde potentiels (sec. III.C). Si cet effet remonte bien la chaîne de von Neumann, nous proposons de l'observer à l'aide de technologies d'ores et déjà disponibles (sec. III.D). Si notre hypothèse s'avère correcte, elle pourrait contribuer à expliquer plusieurs phénomènes jusqu'alors isolés : l'inflation cosmique, la matière sombre et le problème de la constante cosmologique (sec. IV). Enfin, notre interprétation cinématique de la relativité dans un univers en expansion pourrait conduire à une justification de la théorie MOND (sec. IV.B.3)

    Comment caractériser un environnement numérique de travail et ses usages ?

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    National audiencePour aborder la question des usages et analyses d’usages des ENT, un cadre terminologique et des repères historiques sont rappelés, en insistant sur la spécialisation des systèmes pionniers qu’ont été le dépôt de documents, les outils de communication et les logiciels métiers. On souligne ainsi le peu de fonctionnalités réellement nouvelles présentes dans les ENT, opposé à de grands changements des contextes d’apprentissage. La recherche de concepts d’usages stabilisés, reliés à des attendus pédagogiques, repose sur des relations d’expériences abordées de façon pluri-disciplinaire, malgré les problèmes méthodologiques en découlant

    Applications de la Logique Quantique aux Sciences Cognitives

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    Ce texte présente les résultats d'un travail effectué dans le cadre d'un stage de recherche pour le DEA (master) de Sciences Cognitives lors de l'année universitaire 1992-1993. Ce stage fut supervisé par Daniel Andler du CRÉA, École Polytechnique. Ce travail fait suite a une conférence donnée le 17 mai 1993 a l'École Normale Supérieure dans le cadre du séminaire Philosophie & Mathématiques. On pourra se reporter au compte-rendu de cette conférence (1), pour une introduction générale à la Logique Quantique en rapport avec la Mécanique Quantique. Elle permet de mieux comprendre cette dernière et justifie l'essentiel de son formalisme sur des bases simples. Nous ne nous intéresserons ici ni aux application pratiques de la Logique Quantique ni à la Mécanique Quantique. Ce texte vise à introduire l'usage de la Logique Quantique en Sciences Cognitives en insistant fortement sur l'intérêt particulier de cette logique. Dans une premiére partie nous introduisons l'appareil technique de la Logique Quantique, sous les angles syntaxiques, sémantiques et algébriques. Dans une seconde partie, au niveau le plus bas de modélisation, nous montrons que la Logique Quantique a un débouché naturel dans l'expression du contenu d'un réseau de neurones formels, particulièrement dans le cas d'une structure en couches. Dans une troisième partie, montant d'un degré, nous nous appliquons à étendre l'idée de vecteur de population, actuellement l'objet d'un vif intérêt en Neurophysiologie, à des données plus abstraites. Enfin, dans notre dernière partie, nous nous risquons a étudier ce qui est considéré comme le niveau le plus haut d'organisation, celui des concepts du langage naturel

    Stock et flux des idées sur le web social - Proposition de modélisation de la circulation des représentations à l'époque du numérique ambiant

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    International audienceSocial web lato sensu, including the web and social media, can be analyzed fromthree points of view: as a network of contents, as a human network of profiles and sitesweaving these contents, or as memes transmitted on this cognitive network. We first definehere what we mean by contents, which enables us to describe it as the main driving force intoday’s digital transformation. In a second section, our analysis of the present evolution, byfocusing on the memetic standpoint, emphasizes the question of representations’ stock andflow and shows how much this has profoundly evolved over the last quarter of a century. Weargue that the social web, while having considerably multiplied the techniques of stock,paradoxically, structurally promotes flow. Finally, we apply in a third section this modelingto the case of conspiracist and bullshitist communications.Le web social, comprenant le web et les médias sociaux, peut s’analyser sous troisangles : comme un réseau de contenus, comme un réseau humain de profils et sites tissant cescontenus ou comme des mèmes se transmettant sur ce réseau cognitif. Nous définissons dansun premier temps ce que nous entendons par contenus et décrivons la période actuelle dedéveloppement du numérique comme mue par les contenus. Dans un second temps, nousanalysons l’évolution actuelle par une approche mémétique. Nous mettons l’accent sur laquestion du stock et du flux des représentations et montrons combien le dernier quart desiècle l’a profondément transformée. Tout en ayant considérablement multiplié les techniquesdu stock, nous soutenons l’idée que le web social, paradoxalement, favorise structurellementle flux. Dans un troisième temps, nous appliquons cette modélisation au cas descommunications complotistes et bullshitistes

    A Double Deduction System for Quantum Logic Based On Natural Deduction

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    International audienceThe author presents a deduction system for Quantum Logic. This system is a combination of a natural deduction system and rules based on the relation of compatibility. This relation is the logical correspondant of the commutativity of observables in Quantum Mechanics or perpendicularity in Hilbert spaces.Contrary to the system proposed by Gibbins and Cutland, the natural deduction part of the system is pure: no algebraic artefact is added. The rules of the system are the rules of Classical Natural Deduction in which is added a control of contexts using the compatibility relation.The author uses his system to prove the following theorem: if propositions of a quantum logical propositional calculus system are mutually compatible, they form a classical subsystem

    Numérique et humanités : de l’ancillarité à la fécondité grâce à la modélisation computationnelle des connaissances

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    The digital transformation of society also affects the humanities and social sciences (HSS). The digital humanities follow the general pattern of digital history, which we will briefly describe. A first period limits digital technology to large projects or organisations, mainly for statistical processing. From the mid-1970s to the early 2000s, the personal computer and common IT software induce a first phase of growth in the digital humanities: databases, digitisation of texts and publishing tools. Since the end of the 1990s, new tools have been developed for collecting, organising and accessing digital content, including the considerable volume of big data. We plead here for an amplification of the relationship between HSS and computer science, exploiting not only technologies, but also ideas and methods, especially computational thinking. To illustrate this point, we present some examples of computational analysis in the field of history

    Les paradoxes et le savoir, étude historique, épistémologique et logique

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    We study discourse production about paradoxes in western intellectual area. We show that paradoxes can be classified in three categories, relevant to discourse attitude, history of science and logic. We decompose the paradox discourse into three parts : situation, derivation of contradiction, conclusions. For each paradox, there is a disjunction between reasoning and cognitive satisfaction. Depending on the part of the paradox in which this disjunction takes place, the paradox belongs to one of the three categories: "paracosmy", "paralogy", "paradoxy".Le but de notre thèse est d'analyser la production de discours concernant les paradoxes par les intellectuels occidentaux. Ceux-ci seront nos sujets d'étude. Un texte ne sera jamais lu pour lui-même, dans l'absolu, mais sera, au contraire, toujours considéré en tant qu'il est interprété par un tel sujet. C'est la donnée d'un texte et d'un sujet qui constituera un paradoxe.Dans ce cadre, le paradoxe est pour nous un énoncé écrit ou oral présentant de façon assertive une situation concrète facilement compréhensible : même si les sujets ne s'accordent pas sur le sens profond à donner à cet énoncé, nous demandons que sa signification superficielle leur soit immédiatement accessible. Il est également un phénomène cognitif : quand il est présenté à un sujet, il déclenche automatiquement chez lui un phénomène réflexif important suscité par un sentiment de paradoxal, une forme de perplexité. Celle-ci naît de ce que malgré une satisfaction intellectuelle du sujet (traduisant une analyse convaincante du paradoxe), celui-ci éprouve une insatisfaction cognitive (traduisant un conflit des représentations concernant le paradoxe). Le paradoxe est enfin un phénomène social par le rôle des discours qu'il suscite, qu'il permet ou qu'il nécessite.Précisément, nous définirons le paradoxe comme une histoire simple et brève (dont l'interprétation est pourtant grandement variable entre les individus) recelant une contradiction, source de perplexité, c'est à dire une opposition forte parmi les représentations suscitées par l'histoire.Notre thèse vise à montrer que les paradoxes, tels qu'ils sont interprétés par les sujets, se répartissent en trois classes engendrant des réactions spécifiques chez les sujets, aussi bien sur le plan psychologique ou cognitif que socio-historique. Nous basons cette classification sur une analyse logique à gros traits de l'histoire du paradoxe, ainsi que sur la notion d'errance (qui marque la séparation entre satisfactions intellectuelle et cognitive).La première phase logique de l'histoire d'un paradoxe est la présentation d'une situation, servant de point de départ, d'hypothèses, à toutes les considérations exposées ultérieurement. Si ce point de départ suscite chez le sujet des représentations contradictoires, il y a errance dans les représentations du monde (cosmos, en grec) par le sujet, et le paradoxe sera qualifié de paracosmie.La seconde phase logique d'une histoire paradoxale, est le raisonnement qui conduit le sujet d'une conception éventuellement non problématique à un constat contradictoire. Cette phase s'apparente à une démonstration : elle est constituée d'étapes dont le principe est (intellectuellement) admis par le sujet. Si cette phase introduit un glissement significatif de représentations cohérentes à des représentations contradictoires (à tort ou à raison), il y a errance dans le raisonnement (logos, en grec) du sujet, et le paradoxe sera qualifié de paralogie.Enfin, dans une troisième phase logique, le sujet tire les leçons de la phase démonstrative, élabore ses conclusions. S'il se fourvoie entre ses moyens logiques et les attendus qu'il leur confère ou si, simplement, il ne peut parvenir à aucune conclusion raisonnable, il y a errance dans la phase conclusive, et le paradoxe est une paradoxie (ce terme souligne que l'errance est de l'ordre de l'opinion, doxa en grec).Les trois parties de notre thèse reprennent ces trois classes. Pour chacune, il s'agit de la décrire, c'est à dire de rendre opératoire notre classification, et d'exposer ses traits particuliers, c'est à dire de montrer la pertinence de notre partition.II. Les dilemmes logiquesII.1. Présentation des dilemmesLes dilemmes sont clairement attestés depuis l'Antiquité. Eubulide (4e s. AEC) propose ainsi le célèbre paradoxe du Menteur souvent présenté à l'époque moderne sous la forme du paradoxe d'Epiménide (le célèbre Crétois Epiménide dit "tous les Crétois sont des menteurs"). L'étude de ce dernier souligne que l'existence d'un paradoxe dans un énoncé dépend considérablement de la lecture qu'en fait le sujet : si celui-ci l'entend précisément, alors l'énoncé n'est pas paradoxal puisque la négation de la phrase épiménidienne est "certains Crétois ne mentent pas", ce qui est vrai, tandis que si le sujet l'entend de manière imprécise, la négation sera entendue (sensiblement) comme "tous les Crétois disent vrai", qui entretient le paradoxe. Nous insistons également que même quand le paradoxe semble être "résolu", ici par une précision sémantique, ceci ne constitue pas un traitement de fonds : le cas où un seul Crétois serait en train de parler fait resurgir le paradoxe.Les dilemmes présentent en eux-même un intéressant paradoxe, que nous nommons le "paradoxe des paradoxes" : Ils semblent parfois n'avoir intrinsèquement pas de solution, ce à quoi pourraient répliquer de nombreux penseurs "on ne peut dire cela, voyez ma solution,…" et de là une quantité de "solutions" fort différentes,… qui pour trancher nécessitent de reprendre le paradoxe à zéro. Chaque solution, considérée entre autres, semble éclairer toujours moins le paradoxe alors que, considérée seule, elle semble le résoudre. II.2. Les différents types de dilemmesII.2.ii à iv. La structure des dilemmesLes dilemmes logiques, en première analyse, sont les paradoxes basés sur une autoréférence (une des conclusions intermédiaires de la démonstration du paradoxe fait référence à elle-même) en général apparente.Cette autoréférence n'est pas toujours directe : elle peut nécessiter un certain nombre d'intermédiaires, de relais (A dit B vraie et B dit A fausse, C se dit fausse sachant D, etc.). Par ailleurs le nombre et la qualité de ces relais dépendent toujours du niveau d'analyse auquel on décide de se placer ; il n'est pas intrinsèque (faut-il expliciter le modus ponens ou le considérer comme évident, etc.).La modalité de l'autoréférence n'est pas seulement affirmative (A dit B vraie, resp. fausse), elle peut également concerner une croyance ou une connaissance, un doute, un devoir, une promesse ou un serment, etc. Cette modalité n'est pas nécessairement déclarative mais peut aussi résulter du sens donné à certains mots ou du contenu de certains concepts ("Dieu est omnipotent mais peut-il créer un roc que nul (y compris Lui) ne puisse soulever ?").Si on considère la modalité "est démontrable" le théorème d'incomplétude de Gödel est un tel dilemme (il se ramène pour l'essentiel à "cette proposition n'est pas démontrable"). Si le sujet possède l'intuition du théorème de Löb, alors la contradiction est seulement légère, et il n'y a pas dilemme ; dans le cas contraire, elle est forte et le paradoxe est proche du Menteur, tout en ayant la force d'un théorème mathématique.De plus, l'autoréférence n'est pas nécessairement donnée immédiatement : elle peut nécessiter un traitement volontaire de décodage (traduction, anagramme, symbole, calcul ou démonstration, etc.). Toute la performance de l'énoncé peut être convoquée pour en faire un paradoxe, et ce par un procédé qui n'est pas nécessairement explicitement fourni au sujet.Enfin, nous insistons que cette autoréférence n'est pas seulement négative. Les adages de Buridan (comme "cette phrase est vraie") engendrent également des dilemmes. La contradiction que recèlent les dilemmes n'est donc pas tant logique que pragmatique : elle résulte d'une opposition de conclusions.Affirmer que les phrases dont la signification repose sur une autoréférence n'ont pas de sens ne peut être, en soi, une solution aux dilemmes. En effet leur modalité d'autoréférence peut être renforcée de façon à retrouver le paradoxe (le Menteur et l'Adage peuvent se renforcer en "cette phrase n'a pas de sens" ou "cette phrase a un sens").II.2.v. Les solutions par reformulation non problématiqueDans la mesure où la paradoxalité d'un énoncé dépend de son interprétation, nombre de dilemmes sont résolus en les interprétant d'une façon non problématique (l'Epiménide peut être entendu précisément). Cependant ces solutions s'avèrent toujours fragiles : le paradoxe peut généralement être ressuscité soit par une reformulation de la reformulation (reformulations successives) soit par une reformulation concurrente (reformulations parallèles).III.3. Aspects historiques de la discussion des dilemmesL'opinion est dominante que la discussion des dilemmes est continue depuis l'Antiquité ; ceci est doublement faux. D'une part, seules trois époques historiques de discussion apparaissent en Occident : l'Antiquité grecque (du 5e s. AEC au 3e s. AEC, peut être au-delà mais en tout cas pas plus tard que le 2e ou 3e s. EC), le Moyen âge scolastique (de la fin du 12e s. au milieu du 15e s.) et le 20e s. Entre ces époques certains paradoxes ont pu être sporadiquement évoqués sous forme d'énigmes, mais il n'existe aucune trace d'une discussion écrite construite. D'autre part, la discussion à chacune de ces époques est séparée des discussions antérieures qui apparaissent d'abord incommensurables : le débat commence toujours quasi tabula rasa.III.3.ii. Les insolubles au Moyen ÂgeNotre notion de dilemme inclut essentiellement ce que les penseurs médiévaux appelaient "insolubile". Dans le cadre des formidables investigations logiques de cette époque, ceux-ci constituent une question à part, d'une grande importance théorique. Ils sont envisagés généralement froidement comme un type particulier de "sophisme". L'angle initial d'étude n'en fait pas une question philosophique centrale.La première approche théorique médiévale aurait été celle de la "cassatio" (cassation, annulation) qui décrétait simplement les insolubles nuls ou vides de sens : celui qui profère un Menteur ne dit rien, ou : il est impossible de proférer (réellement) un Menteur.Très vite cette solution, qui était commune d'après les sources, est tournée en ridicule et se développent des solutions de "restrictio" (restriction) dont l'objectif est de délimiter l'usage correct du langage. Les insolubles découlent selon ces analyses d'un mauvais usage des règles des obligations (du débat universitaire) ; selon les cas : un tout ne peut faire référence à une de ses parties, une proposition ne peut faire référence qu'à une proposition antérieure, le sens d'une proposition est la cause de son adéquation au monde, il faut distinguer deux sens de la modalité d'assertion, etc.Ces solutions s'avèrent toutes trop fortes et/ou trop faibles : elles ne peuvent bloquer certains insolubles (généralement les Menteurs à relais) ou, au contraire, bloquent jusqu'à des propositions élémentaires ("toute proposition est vraie ou fausse"). Une nouvelle approche devient nécessaire ; elle sera lancée par Bradwardine qui refuse de se placer au niveau du paradoxe et décide de l'étudier systématiquement d'une perspective métalinguistique. Son analyse, pour la première fois dans cette discussion, se fonde sur une théorie de la vérité. Cette approche est principalement développée par Roger Swyneshed, Heytesbury, et, dans une moindre mesure, Albert de Saxe. Ces théories sont des théories de la vérité par correspondance (le vrai et le faux sont définis en termes d'adéquation à ce qui est).Un trait marquant de la discussion médiévale est la référence constante à Aristote et à sa solution, dite secundum quid et simpliciter, qui ne doit pas faire illusion ; ce terme est toujours employé comme référence d'autorité : chaque auteur lit sa solution chez le Stagirite, en particulier les plus novateurs tels que Bradwardine.III.3.iii. Le pseudomenon et les antinomies antiquesLe paradoxe du Menteur apparaît en Occident comme une expérience de langage développée par Eubulide de Milet (4e s. AEC), philosophe de l'école de Mégare. Cette école, dans la lignée des Eléates, développe de nombreux arguments servant d'exemples à la réflexion rationnelle ou de contre-exemples à certaines thèses. Leur œuvre et plusieurs de leurs objectifs théoriques, dont les études logiques, seront prolongés par les stoïciens. Le paradoxe d'Epiménide, s'il se réfère bien à une évocation par saint Paul d'une célèbre formule d'Epiménide de Cnossos (fl. 7e-6e s. AEC), parfois compté parmi les Sept Sages de l'Antiquité, n'est cependant pas attesté, en tant que paradoxe, avant l'époque moderne.La première trace écrite d'une discussion d'un dilemme logique remonte à Aristote (vers 330 AEC). Cet auteur suggère une discussion antérieure. Lui-même, malgré des interprétations diverses de sa contribution, propose une reformulation fondé sur une distinction (ou temporelle ou sémantique). Son successeur, Théophraste d'Erèse (fin 4e-début 3e s. AEC), écrit un ouvrage de trois volumes sur la question, ce qui suggère au moins une solution par restrictio. Chez les stoïciens, il semble que le débat sur les paradoxes ait été très important : leur solution sera comptée comme un de leurs principaux achèvements (cf. Lucien, Cicéron). Chrysippe le stoïcien (3e s. AEC), le plus fameux logicien de l'Antiquité aurait écrit deux introductions et quatre ouvrages de plusieurs tomes sur cette seule question. Il semble avoir dépassé la restrictio et avoir traité les dilemmes logiques au moyen de sa théorie de la signification.III.3.iv. Le Menteur moderneLes contributions modernes à la discussion des dilemmes logiques sont principalement produites dans le contexte de la philosophie du langage, et s'intègrent essentiellement à la philosophie anglo-saxonne ou analytique. Malgré quelques traitements antérieurs sporadiques (Peirce au 19e s.), la discussion des dilemmes prend place à la toute fin du 19e avec les paradoxes de la théorie des ensembles, dans un contexte de crise (la "crise des fondements").Quelques solutions de cassatio sont proposées (dans un fameux débat entre Russell et Poincaré) mais vite écartées. Russell propose successivement diverses solutions de restrictio, dont la théorie des types. En 1925, Ramsey sépare les dilemmes en paradoxes "logiques" et "sémantiques". Au premiers seront appliquées les théories de Russell (simplifiées par Ramsey), qui seront relayées, pour les seconds par la théorie des niveaux de langage de Tarski (1933-1935, c'est la fameuse distinction langage/métalangage). Ces trois contributions constituent l'état classique de la discussion ; il s'imposera pendant une trentaine d'années dans la discussion et est toujours largement accepté hors de celle-ci. Durant ce laps de temps, la solution tarskienne, qui pouvait être lue comme une restrictio, prend toute sa signification de théorie de la vérité. La notion de vérité, sur laquelle de nombreux soupçons (théoriques) s'étaient posés, est pleinement réhabilitée. Vers les années 1960, elle montre de nombreuses faiblesses théoriques et d'autres théories de la vérité prennent sa succession (sans être largement acceptées). L'autoréférence, largement considérée comme incohérente jusqu'alors (mais abondamment convoquée par les sciences humaines), est réhabilitée. Dans les années 1970 se développent, alternativement aux théories de la vérité à niveaux de langage, des théories basées sur l'existence de lacune de valeur de vérité (gap theories, litt. "théories du trou"). Très vite ces théories dérivent vers une évaluation l'extension de la vérité. La discussion entre alors dans une quatrième phase : le calcul de la vérité. La principale contribution dans cette voie sera la théorie de la vérité comme point fixe proposée par Kripke.La discussion moderne présente plusieurs phénomènes remarquables. Tout d'abord, nous relevons une considérable inflation théorique, auteur par auteur, à mettre probablement en parallèle avec le fait qu'aucune théorie ne s'impose durablement. Nous observons ensuite que notre époque est très intéressée par la production théorique des époques précédentes (ou au moins par l'existence de celle-ci). Pour autant, les relations historiques que l'on peut trouver dans les articles de discussion, voire dans certains articles historiques, sont généralement infondées, souvent erronées et parfois proprement fantaisistes, et ce malgré l'existence de travaux historiques de qualité aux même dates. Ainsi : le Menteur n'est pas, historiquement, l'Epiménide et ce dernier n'est pas connu depuis l'Antiquité (saint Paul n'expose pas un paradoxe) ; Epiménide n'est ni un être fabuleux, ni l'auteur du paradoxe ; Occam ne fut pas le chef de file du combat de l'autoréférence ; etc.III.4. Analyse des dilemmesIII.4.i. Les principaux traits historiques des discussions des dilemmesDans les contextes stoïcien, scolastique et logiciste la question des dilemmes apparaît comme importante théoriquement. Dans les trois cas la discussion est portée par des écoles composées de penseurs-artisans nombreux plutôt que de savants-artistes isolés. Dans la discussion, aucun accord sur une solution particulière n'apparaît. Celle-ci est marquée par trois phases principales dans les approches du problème, la cassation des énoncés paradoxaux, la restriction de l'autoréférence et l'élaboration de théories de la vérité, éventuellement suivies par une phase où l'on s'intéresse plus à l'extension de la vérité qu'à sa définition. Dans tous les cas, cependant, la production théorique sur les dilemmes vise toujours leur résolution.III.4.ii. Dilemmes logiques et paradoxiesAprès avoir étudié les dilemmes par l'exemple, nous montrons qu'ils sont exactement les paradoxies de notre classification. Nous soulignons d'abord que la contradiction des dilemmes est pragmatique : le sujet ne peut résoudre de façon ferme et définitive la perplexité sémantique issue de ces paradoxes. Nous montrons ensuite que ces paradoxes ne sont ni des paracosmies ni des paralogies mais bien des paradoxies. Nous voyons enfin que les paradoxies sont des dilemmes.Nous arguons en conclusion que l'attaque directe de ces paradoxes est intrinsèquement vouée à l'échec en ce qu'elle interdit de les normaliser, d'en faire des phénomènes linguistiques "normaux".III. Les paracosmiesIII.2. Typologie des paradoxes scientifiques et cognitifsLes paradoxes scientifiques ou, plus généralement, les paradoxes cognitifs sont ceux qui révèlent un conflit entre des faits admis par le sujet.III.2.ii. Les paradoxes affirmantsLe cas le plus évident de tels paradoxes est ceux qui explicitent une contradiction entre l'intuition du sujet et les faits tels qu'ils sont présentés par une théorie (confirmée par l'expérience ou au moins tenue pour "vraie" par le sujet). Cette présentation peut prendre la forme d'une observation (p.e. expérimentale, comme dans les paradoxes de la relativité), de la référence à des structures universelles de la pensée (p.e. des principes de symétrie comme dans les paradoxes de l'irréversibilité), d'une démonstration (p.e. dans les paradoxes mathématiques), d'une référence à un système admis (tel qu'une axiomatique).Cette affirmation n'est pas nécessairement forte et n'a pas nécessairement à convaincre le sujet, elle se contente parfois de rappeler un fait connu ou de susciter une croyance déjà lattente. Entre un pôle d'autorité et un pôle de révélation, existe toute une gamme de tels paradoxes.Ces paradoxes soulignent combien des théories apparemment essentiellement techniques baignent en fait dans un substrat culturel extrêmement riche et contradictoire en de nombreux points avec ce qu'elles affirment. Les paradoxes sont largement utilisés pour défendre les conclusions de ces théories contre l'intuition du sujet qui, sinon, les déformerait (à son insu). Pour autant ces paradoxes ne combattent pas nécessairement ces intuitions opposées et, au contraire, les instrumentalisent souvent pour accroître leur force.III.2.iii. Les paradoxes réfutantsLes paradoxes scientifiques n'apparaissent pas systématiquement comme des affirmations ; certains sont d'abord la réfutation de conceptions du sujet sur la base d'une expérience de pensée. Les représentations qui sont ici mises en jeu sont donc seulement celles du sujet. Dans ce cadre on sort souvent du champ des sciences pour trouver des paradoxes relevant de l'intuition "quotidienne" (y compris pour des paradoxes présentés sous un habillage technique comme le paradoxe de Simpson). Ces paradoxes réfutent souvent des symétries, des analogies ou des coïncidences établies indûment. Ils montrent combien des concepts centraux et omniprésents se révèlent contradictoires.III.2.iv. Les paracosmies, au-delà de réfutations et affirmationsNous montrons par quelques exemples qu'il existe un continuum de paradoxes entre les deux catégories de paradoxes cognitifs, affirmants et réfutants. En plus de dépendre, comme toute notre analyse, du sujet interprétant le paradoxe et de l'approche qu'il choisit d'adopter, celui-ci peut relever des deux catégories sous des aspects différents : les représentations du sujet ne sont pas données "complices de notre connaissance".Nous définissons finalement les paradoxes cognitifs comme les paradoxes relevant de l'explicitation au moyen d'une expérience discursive d'une antinomie entre "faits" présentés comme des vérités. Ces faits peuvent être de tous ordres, aussi bien factuels (expériences, événement, etc.) que structurels (relations entre objets abstraits). Ils doivent seulement pouvoir être assumés par le sujet, qu'ils émergent de ses représentations, qu'ils soient crus explicitement, qu'ils soient reçus d'autorité ou par une démon

    Proposition de structuration historique des concepts de la pensée informatique fondamentale

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    International audienceLes programmes de 2015 de l’enseignement obligatoire français (MENESR, 2015b) placent celui-­ci dans le cadre du Socle commun de connaissances, de compétences et de culture (MENESR, 2015a), définissant ainsi un objectif pédagogique large, relevant de la culture commune de base du pays. Pour l’informatique, comme pour de nombreuses autres matières, l’approche disciplinaire, savante, n’est guère adaptée à cet objectif, pas plus qu’une approche qui serait seulement opératoire ou instrumentale, limitée, comme par le passé, à des usages des technologies usuelles d’information et de communication (TUIC).Qu’est-­ce que l’informatique ? Des auteurs précédents (Papert, 1996 ; Denning, 2003 ; Wing, 2006, 2008 ; Dowek, 2011 ; Hartmann et al., 2012) ont suggéré plusieurs approches et structurations du champ, visant des objectifs différents, toutefois. Pour définir les besoins de l’honnête Homme, il convient de reprendre cette question sur de nouvelles bases.En adaptant une définition de Schwill (1993), nous proposons une cartographie de ce que pourraient être les concepts les plus fondamentaux de la pensée informatique, susceptibles de contribuer à la formation générale de l’esprit humain, au même titre que les mathématiques ou les humanités. Pour cela, nous nous appuyons sur l’histoire de l’informatique et du numérique et soulignons également les liens que ces concepts peuvent entretenir avec d’autres savoirs. Ces liens ne sont pas seulement culturels, ils permettent aussi d’entrevoir les liens qui peuvent exister entre disciplines et placer ainsi l’informatique dans un cadre scientifique élargi
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