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Etude sur les proches aidants et les professionnels de l'institution genevoise de maintien à domicile dans le canton de Genève
En 2012, 260 000 personnes (3.2% de la population suisse) ont bénéficié de prestations émanant d'organismes reconnus de soins et d'aide à domicile en raison de maladies, de handicap ou de perte d'autonomie. Si le maintien à domicile est bien développé en Suisse, et en particulier dans le canton de Genève, la prise en charge professionnelle ne se substitue par toutefois à l'aide apportée au quotidien et sous des formes extrêmement diversifiées par les membres de l'entourage familial, amical ou par le voisinage des personnes aidées. Sans la présence des proches aidants, la prise en charge sur le long terme de situation de handicap ou de perte d'autonomie serait rendue difficile voire impossible.
La situation des proches aidants est décrite par la recherche internationale depuis une trentaine d'années et a été mise sur l'agenda politique de nombreux pays occidentaux à partir du début des années 2000. Les modalités de l'aide informelle, et ses répercussions parfois dévastatrices dans la vie des proches, sont en effet de toute première importance dans une période marquée par l'augmentation de la prévalence des maladies chroniques, l'allongement de la vie et les transformations des structures familiales. C'est dans cet esprit que le canton de Genève et récemment le Conseil fédéral se sont engagés dans une réflexion de fond sur la situation et les besoins des proches aidants. Une meilleure connaissance de leurs caractéristiques, de leurs difficultés, de leurs besoins et attentes doit permettre de développer ou d'ajuster les services et interventions qui sont proposées aux familles confrontées à la maladie, au handicap ou à la perte d'autonomie.
La Direction générale de la santé du canton de Genève et pour elle l'Institution genevoise de maintien à domicile (ci-après imad) ont ainsi mandaté le PRN LIVES « Surmonter la vulnérabilités : perspective du parcours de vie », représenté par l'Université de Lausanne en partenariat avec l'Université de Berne, pour réaliser une enquête représentative auprès des proches aidants de bénéficiaires de services d'aide et de soins à domicile. Cette enquête reprend la méthodologie des enquêtes SwissAgeCare et AgeCare Suisse Latine, réalisées en 2010 et 2011 en Suisse Allemande et en Suisse Latine. Elle interroge un échantillon de 290 proches aidants de clients de imad, sélectionnés de façon aléatoire et sur la base du volontariat, et de 299 référents professionnels du soin et de l'aide travaillant au sein de imad au moyen de questionnaires standardisés permettant des comparaisons entre les différentes régions linguistiques.
Six proches aidants sur dix (62%) sont des femmes ; leur âge moyen est de 64 ans. Dans la moitié des situations, le proche aidant est le fils ou la fille d'une personne en perte d'autonomie, et dans 36% des cas, le proche aidant prend soin de son conjoint ou concubin. L'aide est apportée dans plus de la moitié des cas par une personne partageant le domicile de la personne aidée ; si le proche aidant ne cohabite pas avec la personne aidée, il vit à moins de 10 km de celui-ci. Le temps consacré pour l'aide et les soins par les proches aidants est moins important que dans les enquêtes SwissAgeCare et AgeCare Suisse Latine ; cette différence peut s'expliquer par la composition de l'échantillon d'AGEnevaCare où les proches aidants apportent leur soutien à une personne significativement moins dépendante.
L'aide est apportée par l'entourage familial ou amical depuis plus de 8 ans en moyenne ; les proches aidants investissent en moyenne 27 heures pour l'aide et les soins de leur parent ou ami, 52h quand le proche aidant est le conjoint ou concubin de la personne aidée et 16h quand il s'agit d'un enfant. L'amour, l'obligation morale et la nécessité sont les trois motivations principales pour apporter une aide à la personne aidée. Une large majorité de conjoints ou concubins estiment que leur relation conjugale est demeurée satisfaisante malgré la relation d'aide instaurée dans le couple, et les enfants manifestent des scores relativement élevés d'obligation filiale et d'aide filiale. Par ailleurs, pour neuf proches aidants sur dix, la relation avec la personne aidée est restée de bonne qualité malgré la maladie, le handicap ou la perte d'autonomie.
Malgré ces aspects positifs, les répercussions de l'aide dans la vie des proches aidants sont nombreuses et d'autant plus importantes quand les proches aidants sont des femmes, vivent au domicile de la personne recevant de l'aide et quand les personnes aidées présentent un niveau de dépendance élevé. La fatigue est la principale répercussion mentionnée par les proches aidants (63%). Les répondants présentent globalement une santé perçue et une satisfaction de vie plus mauvaises en comparaison avec la population générale. En revanche, leurs niveaux de mal-être et de stress sont moins élevés que dans les enquêtes réalisées en Suisse Allemande et en Suisse Latine ; ces différences traduisent à nouveau des différences de profils des personnes aidées, moins dépendantes dans l'enquête AGEnevaCare. Un proche aidant sur dix enfin a dû réduire son activité professionnelle pour s'occuper de son parent ou de son ami, sans différence significative entre les hommes et les femmes.
Les proches aidants qui évaluent le plus négativement leur santé sont plus âgés que ceux qui l'évaluent très positivement ; il s'agit plus fréquemment de conjoints ou concubins des personnes aidées, qui prennent soin de leur partenaire depuis une durée plus importante et de manière plus intense que les autres répondants. Ils présentent des niveaux d'isolement social, d'anxiété chronique et de stress chronique élevés et ne disposent que de ressources sociales limitées. Celles et ceux qui évaluent le plus négativement leur satisfaction de vie sont également davantage des conjoints ou concubins, prenant soin de leur partenaire très dépendant ; leur score global de répercussions de l'aide est plus élevé que celui des proches aidants ayant une évaluation très positive de leur santé.
70% des proches aidants expriment leur besoin de faire une pause, et un tiers déclarent n'avoir personne pour les remplacer dans ce cas-là. Les conjoints ou concubins, et principalement les épouses et concubines, sont significativement plus nombreuses à éprouver le besoin de répit et à ne pas en avoir la possibilité concrète. Interrogés sur les actions qui pourraient améliorer leur situation, plus de la moitié des proches aidants mentionnent de l'information ou des conseils sur le type d'aide disponible.
Les répondants genevois, comme les participants aux enquêtes SwissAgeCare et AgeCare Suisse Latine, sont très satisfaits des services reçus par l'organisme de maintien à domicile (imad). Ils n'identifient que peu de conflits avec les intervenants professionnels de l'aide et du soin ; le principal conflit mentionné concerne le changement trop fréquent de collaborateurs (72%). Les référents de l'aide et du soin ou référents de situation, majoritairement des femmes travaillant depuis 9 ans pour imad, rapportent quant à eux un nombre plus élevé de situations conflictuelles avec les proches aidants. Ils expriment un besoin d'échanges avec leurs collègues et d'informations sur ces sources de conflits et sur les moyens de les gérer.
L'enquête AGEnevaCare confirme le rôle prépondérant des membres de l'entourage proche dans la prise en charge des personnes malades, en situation de handicap ou de perte d'autonomie. Elle met en évidence un impact contrasté en fonction du genre du proche aidant, les femmes étant plus isolées et plus vulnérables que les hommes, et en fonction du type de lien entre la personne aidée et le proche aidant, les conjoints ou concubins apparaissant comme plus susceptibles de subir les conséquences stressantes de l'aide. Des interventions sur mesure adaptées au moment du parcours des proches aidants et des personnes aidées dans la maladie ou la dépendance semblent être à privilégier, ce qui suppose une évaluation répétée et systémique des besoins des proches aidants
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