Dany Laferrière : parcours d'une écriture

Abstract

Placé d'entrée de jeu sous le signe du parcours, ce mémoire suit le mouvement d'une écriture voyageuse: celle de Dany Laferrière. Voyageuse, non seulement parce qu'elle fait intervenir des signes appartenant à des univers culturels hétérogènes, mais aussi parce qu'elle fluctue suivant la position géographique qu'occupe le narrateur, un romancier d'origine haïtienne. Écrire en Amérique du Nord, en Haïti, ou encore dans cet espace fantasmatique que nous nommerons 1'«entre-deux-langues», ne commande pas les mêmes stratégies narratives ni ne suscite les mêmes préoccupations chez l'écrivain. De Comment faire l'amour avec un Nègre sans se fatiguer (1985) à Pays sans chapeau (1996), l'identité du narrateur évolue de concert avec l'expression littéraire de Laferrière. Plus qu'une simple coïncidence, cette double progression s'effectue dans un rapport de causalité, car au fur et à mesure que l'auteur investit son travail romanesque d'une sensibilité créole, l'histoire personnelle du personnage se précise. Le premier chapitre fait office d'introduction au corpus et circonscrit les stades de l'évolution qui s'y profile. La seconde partie du travail porte sur les conditions du migrant haïtien en Amérique du Nord. Bien que des préoccupations d'ordre matériel amènent le protagoniste à prendre la plume, des motivations plus profondes se trouvent à l'origine de son projet. En effet, dans les romans de l'«arrivée en ville1», il existe un rapport d'équivalence entre le fait de devenir écrivain et celui de devenir quelqu'un. Par la voie de la création, le sujet s'emploie à reconquérir la dignité que lui a fait perdre le regard déshumanisant de l'Autre. La traversée des frontières linguistiques s'avère un enjeu capital de l'expérience migratoire. Le troisième chapitre questionne l'espace marginal qu'occupe la langue vernaculaire qui apparaît, dans les romans de Laferrière, comme objet du discours et non comme pratique discursive: le narrateur ne parle pas créole, mais parle du créole. Nous examinerons, par le fait même, le conflit diglossique des Antilles françaises, son problème de lectorat et les débats que suscite la créolisation littéraire. En dernière analyse, nous verrons dans quelle mesure le discours pictural primitif traverse Pays sans chapeau et comment les emprunts aux techniques de l'art naïf font de ce roman un tableau scripturaire et inédit de la société haïtienne. Ce rapport de filiation artistique, dans lequel s'inscrit le roman, permettra de saisir le caractère mouvant et ouvert de la créolité qui, comme toute identité culturelle, se trouve en constant devenir.\ud ______________________________________________________________________________\ud 1 Comment faire l’amour… et Chronique de la dérive douce (1994).\ud ______________________________________________________________________________\ud MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Dany Laferrière, créolité, diglossie, négritude, primitivisme, réel merveilleux, Comment faire l'amour avec un Nègre sans se fatiguer, Chronique de la dérive douce, Pays sans chapeau

Similar works

Full text

thumbnail-image

Archipel - Université du Québec à Montréal

redirect
Last time updated on 21/07/2017

Having an issue?

Is data on this page outdated, violates copyrights or anything else? Report the problem now and we will take corresponding actions after reviewing your request.