Du gène au fromage: le polymorphisme de la caséine alphas1 caprine, ses effets, son évolution

Abstract

National audienceThe caprine asl casein locus is remarkable for its high level of polymorphism and for the fact that there exists clear differences in the level of protein synthesised between alleles or groups of alleles. The early studies established that the polymorphism was due to a minimum of 7 alleles which corresponded to 4 different levels of synthesis : the A, B and C alleles are associated with a “high” level of αS1casein (around 3.6 g/1), the E allele is associated with a “medium” level (1.6 g/1), the D and F alleles are associated with a “low” level (0.6 g/1) and the 0 allele is a nul allele (with no α S1casein in the homozygote). In 1985 the E and F alleles predominated in the French milking breeds, Alpine and Saanen, in part accounting for the low level of milk protein in these breeds and limiting their cheese yield. This posed the question of the value of selection in favour of “high” alleles and the means by which such selection might best be achieved. Each of the “low” variants is characterised by the deletion of an amino acid sequence (residues 59 to 95 in F, 59 to 69 in D, and 14 to 26 in G) which results from anomalous splicing of the RNA messenger. In the case of the F allele, this anomaly appears to be due to the deletion of a nucleotide, in the case of the G allele to the substitution of a nucleotide. On the other hand, the reduction in the level of synthesis found with the E allele appears to be caused by an insertion of 458 nucleotides in the last exon of the gene. The Bl subdivision of the “high” B allele is the original allele of the species. The alleles with reduced levels are therefore defective mutants. The study of the on-farm performance of the offspring of 5 bucks heterozygous at the αS1-Cn locus provided evidence for their different protein levels which agrees with the estimates given above (around 2.5 g/kg difference between the A and F alleles, 2 g/kg for the A and E alleles). This polymorphism did not affect the amount of milk produced while unexpectedly, significant differences were found for the fat percentage between the A allele and the E and F. Overall, the A allele has, when compared to the F allele, a significant effect on the total amount of protein per lactation but not on the amount of fat. Analyses of the physico-chemical properties of milk from goats homozygous for the 3 principal alleles (A, E, F) confirm the effects of the genotypes on the casein and fat percentages, and shows, in addition significant effects on the diameter of the micelles and on their calcium content, which is lower in A/A milk. These characteristics explain the observed differences in the ability of the milk to be coagulated by rennin, this ability being greatest for A/A milk. The most important differences concern the maximum curd firmness (A/A>E/E>F/F) and the rate of firming (A/A>E/E and F/F). A/A milk also has, on average, an intermediate time for coagulation between that of E/E milk (longer) and that of F/F milk (shorter). Trials of the traditional manufacture of “Pé1ardon des Cévennes” type cheese provide evidence of clear differences in the adjusted cheese yield : +7.4 % between A/A and E/E milk and + 14.8 % between A/A and F/F milk. Seasonal variation in yield follows that in the fat + protein yield. Some differences in the firmness of cheese (A/A>E/E>F/F), for which evidence was previously found by laboratory measurements, were confirmed by a taste panel. According to the same panel, the goat flavour tended to be less pronounced in the cheeses made from A/A milk. In the European milking breeds, we observe, according to the breed, a preponderance of “high” alleles A and B, of the “medium” allele E or the “low” allele F. The latter predominates in the French and Italian Alpine and Saanen breeds and also in the Corse population. In the Alpine and Saanen breeds the “high” alleles are almost absent in goats which have a low index or protein percentage, but are in the majority in the Alpine breed (0.72), and are frequent in the Saanen breed (0.42) in animals which have a high index or protein percentage. In the Alpine breed, the frequency of the A allele has clearly increased in recent years in males at test (around 0.5 in 1992) and in the stud bucks (0.6). In the Saanen breed the E allele remains predominant, but the frequency of the A allele is increasing. The scientific contributions and implications of this work and the prospects for its application in breeding programmes are discussed.Le locus de la caséine αsl caprine se distingue par un fort polymorphisme et surtout par le fait qu’il existe, entre allèles ou groupes d’allèles, de nettes différences de niveau de synthèse protéique. Les premiers travaux ont établi que ce polymorphisme était déterminé par un minimum de 7 allèles, correspondant à 4 niveaux de synthèse différents : les allèles A, B et C s’accompagnent d’un taux "fort" de caséine αsl (environ 3,6 g/1), l’allèle E d’un taux "moyen" (1,6 g/1), les allèles D et F d’un taux "faible" (0,6 g/1), l’allèle 0 étant un allèle nul (pas de caséine s al chez l’homozygote). En 1985, les allèles E et F prédominaient largement dans les races laitières françaises Alpine et Saanen, ce qui expliquait, en partie, la faiblesse du taux protéique des laits dans ces races, limitant leur rendement fromager, et posait la question de l’intérêt et des modalités d’une sélection en faveur des allèles "forts". Chacun des variants "faibles" se caractérise par la délétion d’une séquence d’acides aminés (résidus 59 à 95 dans F, 59 à 69 dans D, 14 à 26 dans G) qui résulte, tout au moins pour F et G, d’une anomalie d’épissage des ARN messagers. Dans le cas de l’allèle F, cette anomalie paraît due à la délétion d’un nucléotide, dans le cas de l’allèle G à une substitution nucléotidique. La diminution du niveau de synthèse constatée avec l’allèle E semble imputable à une insertion de 458 nucléotides dans le dernier exon du gène. La subdivision Bl de l’allèle "fort" B est le type originel de l’espèce. Les allèles à taux réduit sont donc des mutants défectifs. L’étude des performances en fermes de la descendance de 5 boucs hétérozygotes au locus –αS1 a mis en évidence des différences de taux protéique conformes aux estimations ci-dessus (environ 2,5 g/kg entre les allèles A et F, 2 g/kg entre A et E). Ce polymorphisme n’a pas d’effet sur la quantité de lait produite ; mais on observe, par contre, des différences significatives inattendues, pour le taux butyreux, entre l’allèle A, et les allèles E et F. Globalement, l’allèle A a, par rapport à l’allèle F, un effet significatif sur la quantité totale de matière protéique par lactation, mais non sur la quantité de matière grasse. L’analyse des propriétés physico-chimiques des laits de chèvres homozygotes pour les 3 allèles principaux (A, E, F) confirme les effets du génotype sur le taux de caséine et sur le taux butyreux, et révèle en outre des effets significatifs sur le diamètre des micelles et leur degré de minéralisation calcique, inférieurs dans les laits A/A. Ces observations expliquent les différences constatées dans l’aptitude des laits à la coagulation par la présure, supérieure pour les laits A/A. Les écarts les plus importants concernent la fermeté maximale du gel (A/A>E/E>F/F) et sa vitesse de raffermissement (A/A>E/E et F/F), les laits de type A/A ayant, en moyenne, un temps de prise intermédiaire entre celui des laits E/E (plus long) et F/F (plus court). Des essais de fabrication traditionnelle de fromages du type Pélardon des Cévennes ont mis en évidence de nettes différences de rendement fromager corrigé : + 7,4 % entre les laits A/A et E/E, + 14,8 % entre les laits A/A et F/F, les variations saisonnières de rendement suivant celles de la matière fromagère utile (TP + TB). Des différences de fermeté des fromages (A/A>E/E>F/F) constatées par des mesures instrumentales, ont été confirmées par un jury de dégustation. Selon ce même jury, le goût de chèvre tend à être moins prononcé dans des fromages fabriqués à partir de laits A/A. Dans les races laitières européennes, on observe, selon les cas, une prépondérance des allèles "forts" A et B, de l’allèle moyen E ou de l’allèle faible F. Ce dernier prédomine dans les races Alpine et Saanen françaises et italiennes ainsi que dans la population Corse. Dans les races Alpine et Saanen, les allèles "forts" sont quasi absents chez les chèvres à index ou taux protéique faible, mais sont majoritaires en race Alpine (0,72) ou fréquents en race Saanen (0,42) chez les sujets à index ou taux protéique fort. En race Alpine, la fréquence de l’allèle A a nettement augmenté au cours des années précédentes chez les mâles de testage (environ 0,5 en 1992) et les boucs améliorateurs (0,6). En race Saanen, l’allèle E reste prédominant, mais la fréquence de l’allèle A s’accroît également. Les apports et les prolongements scientifiques de ce travail ainsi que les perspectives d’application à la sélection sont discutés

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