International audiencePour comprendre la relation entre l'anthroponymie et cette mobilité sociale et religieuse spécifique qu'est la conversion dans un contexte d'intolérance, cet article se propose de ne pas séparer l'étude du système de nomination des convertis dans la Couronne d'Aragon de celui des juifs pour ne pas surévaluer la rupture et la nomination baptismale, les changements de noms et le jeu des alias étant assez courants à la fin du Moyen Âge. Les noms ne s'emploient pas selon les hasards de l'existence mais en forme développée ou selon ses versions tronquées selon les nécessités de l'appellation qui imposent l'emploi de formes brèves. La conversion introduit dans le stock onomastique les noms de parrains, personnages qui sont souvent déjà membres du réseau relationnel proche des convertis, sans modifier d'abord profondément le système anthroponymique. Les choix anthroponymiques manifestent la convergence culturelle des communautés tout autant que le passage de la frontière religieuse : le passage au christianisme allait dans le même sens anthroponymique que la nomination des juifs en mode latin, malgré la permanence jusqu'au XVe siècle de noms personnels hébraïques bibliques à côté du stock vernaculaire. Le nom permet de se démarquer dans la ressemblance et l'homonymie est intégratrice. ; la continuité l'emporte sur la rupture. Peu à peu la nomination ancienne se détachait, mais l'identité du converti était généralement bien connue à travers sa fama, dans une société où l'anonymat était suspect. L'anthroponymie des juifs et des conversos est un système flexible à l'expression subtile, apte à désigner les mutations biographiques tout en signifiant l'unité d'un destin et en créant un jeu fluctuant à travers diverses versions de nomination. La fluidité nominale devient suspecte au XVIE siècle, lorsque des conversos riches de leur nom possèdent désormais des identités brisées dont ils doivent effacer la macule