Taxonomie des streptomycétes causant la gale commune et implication de la thaxtomine A dans leur pouvoir pathogène

Abstract

Les travaux visaient à caractériser les agents pathogènes qui étaient responsables de la gale commune au Québec. Les isolats de Streptomyces phytopathogènes ont été classés dans trois groupes, identifiés comme étant du S. scabies, S. acidiscabies et une espèce inconnue de Streptomyces causant la gale profonde. Dans le but de mieux caractériser les Streptomyces phytopathogènes du Québec, des études taxonomiques ont été entreprises sur les souches de S. scabies et les souches de Streptomyces causant la gale profonde. Les nombreuses souches de S. scabies ont été étudiées en utilisant plusieurs outils taxonomiques tels que les patrons en acides gras, les profils de protéines, et l'hybridation ADN-ADN. Les patrons d'acides gras et les profils de protéines montraient qu'il y avait beaucoup de diversité entre les souches de S. scabies. L'hybridation ADN-ADN a confirmé ces résultats en montrant que les souches de S. scabies isolées de la pomme de terre ou de la carotte pouvaient être classées dans au moins trois groupes génétiques différents. Les niveaux de similarité étaient beaucoup plus faibles que ceux généralement retrouvés entre les souches d'une même espèce bactérienne. Ces travaux ont montré que les souches de Streptomyces causant la gale profonde au Québec constituaient une nouvelle espèce de Streptomyces. Les souches de Streptomyces causant la gale profonde ont été comparées aux autres espèces pathogènes de Streptomyces. Les patrons d'acides gras, les profils de protéines, l'analyse numérique et l'hybridation ADN-ADN ont clairement démontré que les souches de Streptomyces causant la gale profonde avaient des caractéristiques distinctes des autres espèces de Streptomyces. Streptomyces caviscabies est le nom qui a été choisi pour cette nouvelle espèce bactérienne. Suite à la caractérisation des espèces de Streptomyces phytopathogènes retrouvées au Québec, la gamme de plantes pouvant être infectées par S. scabies, S. acidiscabies et S. caviscabies a été étudiée. Plusieurs plantes ont été incluses dans cette étude dont la betterave, la carotte, le panais, le radis, le navet et la pomme de terre. Nous avons démontré que les différentes espèces de Streptomyces n'avaient pas la même gamme de plantes hôtes. Alors que le radis, la carotte et la pomme de terre sont plus susceptibles d'être infectés, la betterave, le panais et le navet semblaient plus tolérants à l'infection. Le rôle dans la pathogénèse de la thaxtomine A, qui est produite par les Streptomyces phytopathogènes a été étudié. Les effets de la thaxtomine A sur les tissus végétaux ont été analysés. La thaxtomine A induisait une chlorose puis une nécrose sur les feuilles de betterave, de navet, de tomate, de pomme de terre et de framboisier. La thaxtomine A n'est donc pas une toxine spécifique à la pomme de terre puisqu'elle provoque des nécroses chez d'autres plantes ce qui indique que la cible de la thaxtomine est commune à plusieurs espèces végétales. Par microscopie électronique, les effets de la thaxtomine ont été étudiés sur les cellules de tubercules de pommes de terre. La thaxtomine A affectait plus particulièrement la membrane plasmique des cellules en induisant des invaginations. De plus, un matériel fibrillaire s'accumulait dans le cytoplasme des cellules et les parois se couvraient de matériel dense aux électrons. L'application de thaxtomine A entraînait la mort cellulaire. Bien que la thaxtomine A soit toxique pour les cellules végétales, l'implication de la thaxtomine A dans le pouvoir pathogène des Streptomyces phytopathogènes n'avait pas été démontrée. Des mutants de S. scabies souche EF-35 ont été créés par une mutagénèse chimique afin d'étudier leur comportement pathogénique. Six mutants affectés dans la production de thaxtomine A ont été sélectionnés. Quatre de ces mutants produisaient de 2 à 20 fois moins de thaxtomine A que la souche sauvage EF-35. Ces mutants étaient généralement moins agressifs sur le radis et la pomme de terre que la souche sauvage EF-35. Un des autres mutants produisait 355 fois moins de thaxtomine A que la souche sauvage alors que l'autre mutant n'en produisait pas une quantité détectable. Ces deux mutants n'étaient plus pathogènes sur le radis et la pomme de terre. Ces résultats démontraient que la thaxtomine A était un facteur de virulence crucial dans le pouvoir pathogène de S. scabies