Résumé : Conçue traditionnellement comme une science positive, la géographie se veut maintenant plus critique et plus réfléchie. La présente étude se penche sur ce changement de conception. Depuis Descartes la logique de la science reposait uniquement sur la connaissance des phénomènes ou des objets mesurables. La biologie n'a pas pu émerger comme science de l'homme; elle ne se préoccupait pas des réalités bioanthropologiques, parce qu'elle ne considérait pas les questions de significations, de valeurs, et encore moins d'éthique. Une scission s'est donc développée entre la pensée objective, technique, logique, empirique et la pensée mystique, magique et imaginaire. Avec Comte, l'homme est devenu le sujet de la science sociale. Mais la méthode employée a éliminé tout ce qui le caractérise pour faire ressortir sa seule rationalité. Les fondements de son existence (l'ontologie) se virent remplacés par une insistance sur la façon d'appréhender l'environnement (l'épistémologie) propre aux sciences naturelles. C'est à ce moment qu'apparut la distinction entre sciences et humanités. L'étude retrace les racines positivistes de la pensée géographique en Grande Bretagne, en France, en Allemagne et en Amérique du Nord. Elle avance l'hypothèse que la géographie traditionnelle a eu tendance à adopter une perspective de "génie social", avec le résultat qu'elle se fondait sur une conception de l'homme et de son univers beaucoup trop étriquée. Le géographe aborde le paysage culturel par le biais d'interaction entre l'homme et son environnement physique. L'auteur examine un certain nombre de façons d'étudier le paysage élaborées dans les pays mentionnés précédemment. Ces travaux aboutirent à des formes de pensée plus humanistes. L'homme et son environnement sont souvent présentés comme des réalités distinctes. Les géographes sous l'influence de la psychologie de la Gestald ont tenté de mettre au point une approche plus "subjective" de l'homme. L'auteur fait une critique de quelques études de perception et de comportement spatial et dégage leur signification pour une meilleure compréhension du rôle créateur de l'homme dans le monde. Toute réflexion sur le monde nous oblige à le décrire en quelque sorte et à l'enfermer dans des catégories mentales. L'homme prête une objectivité au monde avant d'entrer en relation avec lui, et dès qu'il entre en relation, il s'en sépare par le fait même. Les géographes continuent d'explorer les significations données à l'espace, ainsi que les rapports existant entre elles, de façon à comprendre leur impact sur le paysage. Elles sont à la base de l'importance des relations d'espace, des visions personnelles de l'espace et de l'interprétation que fait l'homme de la terre comme son habitat. L'approche existentialiste ouvre la porte à un choix d'images de l'homme plus vaste. Les descriptions subjectives et l'interprétation de paysages en littérature et dans les arts constituent des contributions valables à l'étude humaniste de l'espace. En révélant les diverses facettes de l'expérience humaine, l'art sert les fins de la géographie. Il établit un équilibre entre le subjectif et l'objectif et présente un modèle de synthèse pour la pensée géographique. Si, la géographie parvient à pénétrer les dimensions plus profondes, comme l'esthétique, le sentimental et le symbolique, elle disposera d'une base méthodologique plus étendue et donnera une image enrichie de l'utilisation de l'espace par l'homme..||Abstract : The author examines the transition in geography from a traditional and a positive conception of science to a more critical, reflective one. The logic of science, at least since Descartes, demanded knowledge only of phenomena or quantitatively measurable objects and not consider transcendent meanings, values, or ethics. Comtean or positivist social science made man the center of study. The method used to understand man removed all human characteristics except rationality. Man was studied as a product of the en-vironment, (physical or social). Questions of meaning and purpose of existence were not a matter of concern for science, but for religion, philosophy, the arts. The nature of being (ontology) was replaced by an emphasis on the method of knowledge (epistemology) of the natural sciences. A split occurred between explanation and wisdom, and between object and subject. A major distinction developed between the sciences and the humanities. The author traces positivistic roots of geographic thought in Britain, France, Germany and North America. The thesis is that geography has tended toward a social engineering' approach which results in a too restricted view of man and his world. The cultural landscape has been studied by geographers as the interaction of humans with their physical environment. The author pursues different approaches to landscape study. More humanistic forms of thought developed with these approaches. Man and his environment were often studied as separate entities. Due to the influence of gestalt psychology geographers attempted a subjective research by studying man directly. The author discusses some environmental perception and behavioural studies and the implications for a deeper understanding of man's creative role in the world. We cannot think about the world without describing it in some way, and making categories. Man objectifies the world, then starts relationships with it. To have a human relationship is to indicate a separation. Geogra-phers continue to explore meanings of space, their interrelationships and to understand their impacts on the landscape. All of these meanings deter-mine the significance of spatial relations, personal views of space and man's interpretation of the earth as his home. The existentialist approach offers the choice of a wider image of man. The subjective descriptions, meanings of landscape in literature and art are valid contributions to a humanistic, geographic study of space. Art serves the geographer by exposing possible modes of human experience and relationships. It offers a balance between the subjective and objective as a model for geographic synthesis. If geography delves into wider aspects of study (aesthetic, sentimental, symbolic), the results could be a broadened methodological base and a richer image of the human use of the earth