Les "Eléments de physiologie" et l'histoire du cerveau. Diderot face à la physiologie de son temps

Abstract

Ouvrage publié avec le concours du laboratoire REHSEIS (Recherches épistémologiques et historiques sur les sciences exactes et les institutions scientifiques) Unité mixte de recherche 7596 CNRS/INSERM-Université Paris Diderot/Paris 7 Avant la formulation de la théorie du neurone par Cajal dans les années 1880, on ne trouve guère de traces d'une véritable histoire des sciences du cerveau. Pourtant la neurophysiologie existait bel et bien. Ce livre voudrait réparer cet oubli touchant les pionniers de l'âge classique, période riche de découvertes et d'avancées dans la compréhension' du fonctionnement cérébral aussi bien que dans le traitement de' maladies cérébrales comme la rage. L'âge classique est d'abord une période de gestation, tant scientifique que philosophique, notamment à travers la traditionnelle question des rapports entre l'âme et le corps. Ce questionnement philosophique entraîne une recherche expérimentale en physiologie, souvent limitée par les moyens techniques de l'époque ; elle s'appuie toutefois sur le perfectionnement de l'anatomie cérébrale engagé dès la Renaissance. On assiste alors à la constitution d'une pensée anatomophysiologique selon laquelle fonction et morphologie des structures cérébrales sont liées. Cette période de gestation - où se côtoient savoir traditionnel et avancées scientifiques - est marquée par des querelles entre les grands chercheurs de l'époque d'où émergeront d'une part une culture du cerveau, et de l'autre, les concepts fondamentaux des neurosciences. Comme Renato Mazzolini l'a bien relevé, dans son essai sur «Les Lumières de la raison. Des systèmes médicaux à l’organologie naturaliste», contenu dans l’ouvrage coordonnée par Mirko Grmek et Bernardino Fantini ("Histoire de la pensée médicale en Occident"), «Les historiens ne considèrent pas la médecine du XVIIIe siècle comme particulièrement intéressante. Eclipsée, d’une part, par les grandes découvertes bio-médicales du XVIIe siècle et, d’autre part, par les conquêtes, souvent thérapeutiques, du XIXe siècle, la médecine du XVIIIe siècle est apparue à des nombreux historiens comme un moment de stagnation, une longue pause». Ce jugement est bien fondé si l’on considère l’histoire de la médecine du point de vue 1° des découvertes et 2° des applications des méthodes expérimentales, qui connaissent au moins un «ralentissement» . A propos des recherches anatomiques et physiologiques sur le cerveau, si nous observons le schéma que propose Bernard Andrieu, dans son anthologie de textes sur le cerveau, on remarque, en effet, un grand vide, entre Thomas Willis (1621-1675) et René Descartes (1596-1650) – les deux points de départ de ce parcours d’«invention du cerveau» – et Franz Joseph Gall (1757-1828). Il faudrait, ce me semble, au moins suspecter qu’il y faille ajouter quelque chose et s’interroger autour des «chaînons manquants» qui séparent la neurologie de Willis et Descartes de la cérébroscopie de Gall et Dax : la distance nous apparaît, en effet, immense. Quatre points d’interrogation à remplir, donc, autour : 1° de la discipline ; 2° de la méthode ; 3° du modèle d’explication et 4° de son objet: de quel cerveau s’agit-il, au juste, au XVIIIe siècle

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