Adoption kanak et mā'ohi : deux attitudes de l'adoption traditionnelle face à l'adoption internationale

Abstract

This article stems from a presentation I made to the AAA in 2011, ‘‘Tracing Pathways of Kinship in Assisted Reproductive Technologies (Arts),’’ and in the adoption session organized by Chantal Collard and Francoise-Romaine Ouellette in Montreal, November 18th.International audienceIn French Polynesia, as in New Caledonia, circulation of children is frequent and just as accepted as the movement of women inside kinship systems. Fa’a’amu adoption involves open, direct adoption arrangements between extended family members, and this has gradually included international ones. Since 1970, many fa’a’amu babies have also been given to French childless couples. The adaptation of the fa’a’amu institution allows us to trace the legacies of this practice in a globalized world. The Kanak adoption tradition provides comparative material that illuminates the new relationships and parenthood(s) found in the ‘‘West,’’ thereby contributing to current debates in kinship.Comme dans de nombreuses sociétés traditionnelles, les Kanak de Nouvelle-Calédonie et les Mā'ohi de Polynésie française [Carte1] pratiquent depuis toujours une circulation traditionnelle des enfants, souvent en liaison avec les pratiques de l'alliance de mariage. Dans ces deux territoires d'outremer français, l'adoption et le fosterage ne sont pas forcément liés à l'abandon et cela nous rappelle qu'il n'y a pas, contrairement aux sociétés occidentales, exclusivité des fonctions parentales (Leblic, 2004a). Cette particularité nous place face à un cadre très spécifique d'adoption au sein de la république française où les situations sont le résultat de leur histoire coloniale. En effet, dans ces deux territoires, les règles coutumières ont régi jusqu'en 1946 pour la Polynésie et régissent toujours pour la Nouvelle-Calédonie ces transferts qui ne sont donc pas forcément inscrits à l'état civil. C'est pourquoi il nous faudra revenir rapidement sur ce cadre juridique particulier. Ainsi, Kanak et Mā'ohi cèdent certains de leurs enfants à d'autres parents, pas toujours sans enfants, et diverses raisons sont à l'origine de ces dons. Depuis quelques années, avec le développement de l'adoption internationale et le manque d'enfants dans les pays occidentaux, les parents en mal d'enfants en cherchent un au plus loin et, parfois, dans de mauvaises conditions. Si les Mā'ohi donnent leurs enfants à des couples non polynésiens et résidant en dehors du territoire, il n'en est pas de même en Nouvelle-Calédonie 1. Beaucoup de couples français sans descendance ont commencé à chercher des enfants en Polynésie française où il est habituel de donner des enfants dans le circuit de l'adoption fa'a'amu, ce qui signifie une adoption qui devrait maintenir des liens entre la famille de naissance polynésienne qui donne le bébé et celle d'adoption française qui le prend. Le plus souvent, les familles cherchent par elles-mêmes une femme enceinte susceptible de participer à ce système d'adoption. D'un autre côté, les Kanak de Nouvelle-Calédonie qui pratiquent largement la circulation enfantine ne donnent guère leurs enfants à l'extérieur. L'objet de cet article est de se demander pourquoi les uns le font et pas les autres alors que leurs systèmes d'adoption traditionnelle sont très similaires. Nous montrerons aussi que pour nous les transfert d'enfants fa'a'amu à ces couples Popa'ā Farāni (« Blanc de France) correspondent bien à de l'adoption international quoi qu'on en dise. Enfin, pour conclure, nous verrons ce que la parenté et l'adoption en société traditionnelle peuvent nous fournir comme pistes de réflexion sur la parenté en société occidentale et quels enseignements notre regard sur l'adoption traditionnelle peut nous apporter dans le débat actuel sur les nouvelles parentés-parentalités. Car nombre des questions posées aujourd'hui dans les débats sur ces questions dans les sociétés occidentales sont souvent bien connues des anthropologues travaillant sur la parenté en société traditionnelle, comme nous allons le voir à partir de ces deux exemples de circulations enfantines. Certains en effet regrettent qu'aujourd'hui la sociologie de la famille ne traite plus que de ce qui est considéré d'un 1 Même si nous avons connaissance de trois cas récents d'adoption d'enfants kanak par des Caldoches (Européens ayant fait souche en Nouvelle-Calédonie) ou métropolitains résidant en Nouvelle-Calédonie. Nous y reviendrons ultérieurement

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