Les usages d’une souveraineté contestée. La maison de Lorraine, le grand-duché de Toscane et les villes de Provence au temps de la Ligue (1589-1595)

Abstract

À l’occasion des troubles de la Ligue (1589-1596), le duc de Lorraine Charles III espéra récupérer le comté de Provence, prétendument usurpé en 1481 par Louis XI au détriment de son aïeul René II, petit-fils du « bon roi René » d’Anjou. Charles III déploya une stratégie de communication ambiguë à l’adresse des villes catholiques provençales, leur proposant son secours contre les « hérétiques ». C’était pour lui un moyen de poser les jalons politiques et militaires de son projet. Les Provençaux se montrèrent peu réceptifs à ces offres. Mais ils surent exploiter les ambitions lorraines dans deux perspectives : en tirer un profit politique quelconque dans les luttes de factions locales, et obtenir le secours logistique du gendre de Charles III, Ferdinand de Médicis, grand-duc de Toscane. Ce dernier objectif les amena à élaborer une stratégie de communication ambiguë à l’adresse de Christine, fille de Charles III et épouse de Ferdinand, laissant implicitement espérer que les villes provençales pourraient adhérer au projet lorrain. Cette étude de cas invite à étudier la mémoire d’un changement de souveraineté non seulement par la problématique des identités persistantes, mais en s’attachant également aux stratégies de communications induites par cette mémoire.During the turmoil of the Catholic League (1589-1596), the duke of Lorraine, Charles III, tried to recapture Provence, which King Louis XI in 1481 had usurped from René II, grandson of “good King René” of Anjou. Charles III implemented an ambiguous communications strategy toward the Catholic towns of Provence, offering them aid against the heretics, which was a means for preparing the political and military grounds for his plan. The people of Provence were not receptive to his offer, though they did make use of his ambitions in two ways: they used it to their advantage in local conflicts, and they obtained the logistical support of Charles III’s son-in-law, Ferdinand of Medici, grand-duke of Tuscany. The latter then enabled them to launch an ambiguous communications strategy toward Christine of Lorraine, Charles’s daughter and Ferdinand’s wife, implicitly letting her hope that the towns of Provence might sign on to the duke’s project. Through this example, we can better understand memory and changes in sovereignty not only as concerns identity but also from the perspective of the communications strategies inspired by that memory

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