Voler, donner, transmettre

Abstract

Au Mali, les artistes des troupes de ballet se réfèrent en premier lieu à la notion de tradition pour évoquer leurs sources d’inspiration. Ce discours cache souvent un travail complexe de transformation et de réappropriation, attribuable à des individus bien définis. C’est cette ambivalence entre patrimoine collectif et ressource individuelle qui nourrit le processus de création des pièces de ballets, peu propice à des réglementations claires en termes de droit d’auteur. Le « vol des pas » et le « vol des rythmes » sont des pratiques répandues dans ce milieu, chacun pouvant voler et être volé, la condition étant de transformer son « butin » pour en proposer une création originale. En contrepartie, certains artistes reconnus peuvent « donner » mouvements, musiques et thèmes, à charge pour ceux qui les reçoivent de ne pas s’en approprier l’invention ou d’en proposer une contrepartie financière. La récurrence de l’utilisation de ces vols comme ressort créatif se révèle d’autant plus problématique lorsqu’il s’agit des pièces produites pour la Biennale Artistique et Culturelle qui deviennent à la fois patrimoine national et propriété du Ministère de la Culture. Dans cet article, je montrerai au final comment les usages locaux de cette pratique artistique entraînent les artistes de ballet à s’accommoder, mais aussi à manipuler, ces notions de droit d’auteur et de propriété artistique, entre code moral informel et législation officielle.In Mali, the artists of ballet companies refer at first sight to the notion of tradition to evoke their sources of inspiration. However, this discourse hides a complex work of transformation and appropriation, made by well-defined individuals. This ambivalence between collective heritage and individual resources feeds the creation process. But it is not favourable to clear rules in terms of copyright and authorship. The “theft of dance steps” and “theft of rhythms” are widespread practices in this artistic milieu, each one being able to steal and to be stolen, but the condition is to transform the “loot” in order to propose an original and new creation. Some renowned artists can “give” movements, music and themes whether them who received do not claim the invention afterwards or offer money in exchange. This recurrent use of “thefts” as a creative tool becomes more problematic for the pieces made for the Artistic and Cultural Biennale of Mali considered as national heritage owned by the Culture Department. In this article, I would like to show how the local uses of this artistic practice lead the artists to adapt, but also manipulate the notions of copyright, authorship and intellectual property, between informal moral code and official rules

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