Analyse exploratoire des caractéristiques cliniques et neuropsychologiques de sous-types de troubles schizophréniques selon la classification de Wernicke-Kleist-Leonhard
Médecine (psychiatrie)Introduction : L’hétérogénéité clinique et neuropsychologique des schizophrénies au sens des classifications internationales comme le DSM-5 est reconnue comme étant l’un des freins majeurs à la recherche physiopathologique sur ces troubles. L’école de Wernicke-Kleist-Leonhard (WKL) propose une classification construite sur un modèle médical classique distinguant 35 sous-types de psychoses qui pourraient constituer une base à la construction de groupes homogènes de patients. Méthodes : Dans cette étude rétrospective et monocentrique, nous avons inclus 54 patients présentant un trouble schizophrénique au sens du DSM-5 et pour lesquels un diagnostic issu de la classification de WKL était posé. Tous avaient bénéficié d’un bilan clinique et neuropsychologique standardisé réalisé au Centre Expert Schizophrénie de Strasbourg dans le cadre de la cohorte nationale FACE-SZ. Dans un premier temps, nous avons utilisé une analyse en composantes principales pour identifier les grandes dimensions cliniques et neuropsychologiques pertinentes. Puis, au moyen d’une méthodologie bayésienne, nous avons confronté plusieurs modèles issus des classifications du DSM-5 et de WKL sur leur niveau de vraisemblance à expliquer chaque dimension. Résultats : La vraisemblance des modèles issus de la classification de WKL (évolutivité, domaine prédominant, et phénotype précis) était supérieure à celle des critères du DSM-5 pour une à plusieurs des 3 dimensions cliniques retrouvées : symptômes psychotiques, mouvements anormaux, et dépression/insight. En revanche, aucun des modèles n’avait un niveau de vraisemblance suffisamment important pour les 4 dimensions neuropsychologiques retrouvées : intelligence générale, mémoire de travail, fonctions exécutives - vitesse de traitement, mémoire - apprentissage. Conclusion : Dans notre étude, les critères issus de la classification de WKL semblent constituer un meilleur modèle explicatif de caractéristiques cliniques des psychoses en comparaison aux critères du DSM-5, ce qui n’est pas le cas pour des évaluations dans des domaines cognitifs classiques. Ces résultats apportent de nouveaux arguments qui soulignent la pertinence du modèle WKL pour identifier des groupes cliniques homogènes de patients. Ils pointent aussi la nécessité de développer des outils d’évaluation dans des domaines cognitifs moins explorés et potentiellement plus discriminants comme le langage ou la cognition sociale.Introduction: The clinical and neuropsychological heterogeneity of schizophrenia as defined by international classifications such as DSM-5 is recognized as one of the major obstacles to pathophysiological research on these disorders. The Wernicke-Kleist-Leonhard School (WKL) proposes a classification built on a classical medical model distinguishing 35 subtypes of psychoses which could constitute a basis for the construction of homogeneous groups of patients. Methods: In this retrospective, monocentric study, we included 54 patients with a schizophrenic disorder in the sense of DSM-5 and for whom a diagnosis based on the WKL classification was made. All of them had benefited from a standardized clinical and neuropsychological assessment performed at Strasbourg schizophrenia expert center as part of the national FACE-SZ cohort. At first, we used a principal component analysis to identify the main relevant clinical and neuropsychological dimensions. Then, we compared several models from the DSM-5 and WKL classifications using a Bayesian methodology, on their level of likelihood to explain each dimension. Results: The likelihood of the models from the WKL classification (evolutivity, predominant domain, and precise phenotype) was higher than the DSM-5 criteria for one or more of the 3 clinical dimensions found: psychotic symptoms, abnormal movements, and depression/insight. However, none of the models had a sufficiently high level of likelihood for the 4 neuropsychological dimensions found: general intelligence, working memory, executive functions - processing speed, memory - learning. Conclusion: In our study, the criteria derived from the WKL classification seem to constitute a better explanatory model of psychoses clinical features compared to the DSM-5 criteria, which is not the case for assessments in classical cognitive domains. These results provide new arguments that underline the relevance of the WKL model for identifying homogeneous clinical groups of patients. They also point to the need to develop assessment tools in less explored and potentially more discriminating cognitive domains such as language or social cognition