Les listes « féodales » du pseudo-Smbat

Abstract

Each of the two chronicles attributed to Smbat, High Constable of the Armenian kingdom of Cilicia in the middle of the 13th century, provides a list of the lords and fortresses in Cilicia at the end of the 12th century. These feudal lists remind of the precedence lists of nobles (Gahnamak) in the age of the Arsacids (lst-4th century), considering the number of lords mentioned (about fifty) and the ecclesiastical dignitaries referred to. However they do differ from them in the geographical order of enumeration adopted and in referring no longer to the family name but to the fortress name to designate a person. Through these very differences, our lists may also remind of such lists as the Catalogus Baronum of the Italian Normans (mid 12th century), although the latest mentions the small feoffs along with the large areas and always indicates the service owed by the feoff holder. Thus the old Caucasian dynasticism, whereby princes of immemorial nobility do not proceed from the king, who is only a primus inter pares, is replaced in Cilicia by western feudalism whereby nobility proceeds from the office granted by the king and where one is no longer defined through what one is (enhancing surname) but through what one has (enhancing ownership). Despite the still perceptible influence of the Gahnamak, the Pseudo-Smbat feudal lists therefore appear to be the expression of a new Armenian political and social order, in which the Feudals, due to influence from the Antioch Norman principality, are more closely submitted to monarchy.Chacune des deux chroniques attribuées à Smbat, connétable du royaume arménien de Cilicie au milieu du XIIIe s., fournit une liste des seigneurs et forteresses de Cilicie à la fin du XIIe s. Ces listes féodales rappellent les listes nobiliaires (Gahnamak) de l'époque des Arsacides (Ier-IVe s.), en ce qui concerne le nombre de seigneurs mentionnés (environ cinquante) et les dignitaires ecclésiastiques désignés. Cependant elles n'adoptent pas du tout le même classement géographique et ne donnent plus le nom de famille mais celui de la forteresse pour désigner une personne. Malgré ces différences, nos listes peuvent aussi en rappeler d'autres — comme le Catalogus Baronum des Normands d'Italie (mil. XIIe s.) — même si celles-ci mentionnent les petits fiefs aussi bien que les grands domaines et indiquent toujours le service dû par le seigneur. Cependant le dynastisme du Caucase ancien, par lequel les princes de noblesse immémoriale ne procèdent pas du roi, qui n'est qu'un primus inter pares, est remplacé en Cilicie par la féodalité occidentale où la noblesse émane de la charge accordée par le roi et où la personne est définie non par ce qu'elle est (ce qui met en valeur le nom), mais par ce qu'elle a (ce qui insiste sur la propriété). En dépit de l'influence toujours perceptible du Gahnamak, les listes féodales du Pseudo-Smbat apparaissent donc comme l'expression d'un nouvel ordre socio-économique en Arménie, ordre dans lequel les féodaux, à cause de la proximité du modèle de la principauté normande d'Antioche, sont plus étroitement soumis à la monarchie.Dédéyan Gérard. Les listes « féodales » du pseudo-Smbat. In: Cahiers de civilisation médiévale, 32e année (n°125), Janvier-mars 1989. pp. 25-42

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