Dans le bilan des 40 ans de politique de l'emploi qu'elle a publié en 1996, la Dares s'étonnait que la conception des dispositions et dispositifs de la politique de l'emploi n'ait pas été fondée sur une connaissance du comportement réel des entreprises, alors même que " la plupart (de ces) mesures (...) ont pour but de modifier (ce) comportement ". Le projet de mettre en rapport les " produits " de la politique de l'emploi avec des configurations d'usage et des modèles d'entreprise avait pourtant alimenté un important programme de recherche, principalement porté par le courant de l'économie des conventions. En réalité, la conception des politiques publiques n'a pas su tirer profit de cette approche compréhensive des logiques d'entreprise, ni d'ailleurs su valoriser les travaux statistiques engagés par l'administration et visant à associer des comportements à des types d'entreprises identifiés, qu'il s'agisse de l'exploitation du fichier annuel des mesures de politique d'emploi par établissement utilisateur (FAMEU) - et plus spécialement des croisements opérés entre FAMEU et la source DIANE au début des années 2000 - ou encore des exploitations récentes de l'enquête REPONSE. Pour autant, la politique de l'emploi " sélectionne " certainement un modèle de l'entreprise, mais sans toujours l'expliciter. De ce fait, les représentations de l'entreprise sous-jacentes aux différentes mesures ne sont que très rarement discutées. La communication s'intéresse aux conditions dans lesquelles cette confrontation entre politique de l'emploi et logiques d'entreprise a émergé à une période où l'entreprise commence à être pensée comme " relais " possible de l'action publique (les années 1990), et où le législateur soutient un mouvement de décentralisation de la négociation collective. Cette préoccupation connaîtra une éclipse au moment où la politique de l'emploi comme d'ailleurs la production académique se recentrent sur le moyen d'améliorer le seul " fonctionnement du marché du travail " (les années 2000 et suivantes). Les transformations marquant le mode d'exercice du pouvoir économique, concomitamment le souci d'évaluer l'efficacité des dispositifs adressés à l'entreprise au nom de l'emploi, remettent au goût du jour l'étude des modèles et comportements d'entreprise. La communication revient sur les déplacements dont cette question doit faire aujourd'hui l'objet ; elle s'interroge entre autres sur les distinctions à opérer - dans le champ de la connaissance - entre " type " et " modèle " d'entreprise d'une part, entre " comportement " et " fonctionnement " d'entreprise de l'autre. Il apparaît en effet que la connaissance de l'entreprise a d'abord porté sur les " comportements ", face à chaque nouvelle mesure de la politique de l'emploi, et qu'elle n'a en général pas cherché à éclairer ces comportements par l'explicitation de " fonctionnements " sous-jacents. La communication ne plaide pas simplement pour la reconnaissance d'une pluralité de modèles et logiques d'entreprise mais pour la mise en regard de cette réalité plurielle avec une action publique dont les formes et les véhicules sont eux-mêmes multiples. S'il convient en effet de faire droit aux problématiques d'entreprises dans la conception des politiques publiques, cette connaissance doit être ajustée aux enjeux et aux besoins propres à chaque segment de ces politiques : actions ciblées ou spécifiques ; mesures générales de la politique de l'emploi ; dispositifs dont l'application est négociée ; autres dispositions du droit du travail. Il apparaît alors que les besoins de connaissance ne sont pas les mêmes suivant le segment considéré. La connaissance nécessaire dans le cas des mesures générales d'exonération, par exemple, n'est pas forcément de même nature que celle qui devrait s'attacher à la détermination et à la mise en oeuvre de mesures plus exigeantes au regard des fonctionnements d'entreprise (ARTT ; GPEC ; Contrat de génération ; etc.). Il conviendrait en somme d'établir une meilleure correspondance entre les visées de l'action publique par type et besoins de connaissance : - Si l'efficacité commande d'ajuster la mise en œuvre de la politique de l'emploi aux problématiques d'entreprises, on s'intéressera naturellement à la production de savoirs utiles à équiper la relation administration / entreprise, et les négociations afférentes, dans une perspective d'entre-définition ; - La nécessité d'assurer une meilleure diffusion aux " produits " de la politique de l'emploi ne commande pas simplement d'améliorer la communication institutionnelle, elle suppose également de trouver, à travers les spécifications mêmes des dispositifs, le moyen d'intéresser l'entreprise. Quels sont les besoins de connaissance attachés à cette stratégie d'intéressement ? - Si l'on cherche à conformer la gestion des ressources humaines lato sensu aux visées du droit de l'emploi, il faudrait que la connaissance associée nous permette de trouver les bons " points d'imputation ", dans une perspective de responsabilisation de l'employeur. Mais qui est l'employeur ? Et d'ailleurs, qu'est-ce que l'entreprise