Les données des études sont insuffisantes pour affirmer une relation de cause à effet entre le vol aérien et la thrombose veineuse profonde du voyageur. Certains auteurs d'études récentes concluent même à l'absence de lien entre maladie thromboembolique et avion. Cependant, il apparaît qu'il existe une relation entre les voyages aériens et la thrombose veineuse, mais l'incidence est vraisemblablement faible et concerne surtout les passagers qui présentent des FDR habituels de MTE (antécédents de MTE, obésité, varices, trouble de la coagulation). Récemment, des études ont permis de calculer l'incidence de survenue de la MTE en fonction de la durée du vol. Un voyage aérien de plus de 5000 KM multiplie le risque par 150.Nous avons conduit une étude prospective cas-contrôle sur l'année 1997 afin de déterminer la fréquence de la MTE après les vols Paris/Réunion et définir les facteurs influençant l'apparition d'une EP ou d'une TVP. Nous avons cherché à différencier les patients qui ont présenté une EP et ceux qui ont présenté une TVP. Quarante-six patients ont présenté une MTE suite à un voyage entre Paris et St Denis de la Réunion. Trente-trois avaient une TVP et 13 une EP. Trente-huit patients (82%) avaient un FDR. Si on compare les FDR entre le groupe MTE et le groupe contrôle nous n'avons pas observé de différence reliée à l'âge, au sexe, à la consommation d'alcool ou de somnifère ou à la prise d'un traitement oestroprogestatif. Nous n'avons pas mis en évidence de différence reliée à la classe ce qui tendrait à infirmer la notion de " Syndrome de la classe économique ". Certains facteurs sont significativement plus élevés dans le groupe MTE : obésité (p<0.001), antécédent de TVP (p<0.005), présence de varices (p<0.0001), insuffisance cardiaque (p<0.001), traumatisme récent (p<0.005) et immobilité (p<0.0002). Si on compare les FDR entre le groupe TVP et le groupe EP, nous retrouvons l'immobilité complète pendant le vol comme un facteur favorisant la survenue d'une EP. L'âge des patients et la mortalité est significativement plus importante dans le groupe des EP. Le délai d'apparition des symptômes est inférieur à 24 heures pour 69 % des cas d'EP et 21 % des cas de TVP. L'analyse critique de la littérature nous permet d'affirmer avec une quasi certitude que le voyage aérien doit être considéré comme un facteur de risque de MTE chez des personnes prédisposées. De nombreux auteurs et l'OMS s'accordent pour recommander des mesures simples de prévention contre l'immobilité et la déshydratation afin de limiter les MTE liés au transport aérien. Pour les personnes à risques, les bas de contention sont préconisés et les HBPM ont montré leur efficacité chez les sujets à moyen et haut risque. En revanche l'intérêt de l'aspirine est contesté, son efficacité n'a pas été démontrée et elle serait plutôt utile dans la prise en charge des maladies artérielles. Ces notions de populations à risque sont méconnues des médecins généralistes et spécialistes ce qui est paradoxal si on considère l'augmentation croissante du transport aérien. Ce manque d'informations limite les mesures de prophylaxie pour les voyageurs. Il est donc nécessaire de réaliser des études prospectives à grande échelle impliquant la participation des compagnies sur le risque de TVP en avion afin de déterminer l'incidence exacte de la thrombose du voyageur, de quantifier le risque et proposer une prévention efficace systématique aux sujets à risque.GRENOBLE1-BU Médecine pharm. (385162101) / SudocPARIS-BIUM (751062103) / SudocSudocFranceF