A partir d'une enquête par entretiens et par observations, cette recherche, inspirée des sociologies de l'action, propose d'étudier les processus de changement de l'ANPE. Un premier regard est porté sur les transformations institutionnelles de ce service public. Aujourd'hui, l'ANPE n'est plus seulement une institution qui distingue les "vrais" des "faux" chômeurs comme elle pouvait le faire jusque dans les années 90. Elle est désormais une institution qui cherche à normaliser les demandeurs d'emploi afin qu'ils recouvrent une autonomie d'action. Cette nouvelle mission est la conséquence d'une rupture du rapport d'autorité que l'ANPE entretenait avec ses usagers. Alors que l'égalité de traitement organisait la relation à l'autre sur la base d'une indifférenciation, l'équité a ouvert la voie à une nouvelle représentation des demandeurs d'emploi, laissant penser que tous n'avaient pas la même capacité à retrouver un travail. Aussi, bien que limitée à l'ANPE, l'étude de l'institutionnalisation de cette agence montre que l'Etat social n'est pas en train de se déliter, mais d'acquérir une nouvelle logique pour gérer le social. Un deuxième regard est porté sur les transformations organisationnelles de l'ANPE. Car, sans elles, cette administration n'aurait pas pu modifier son visage institutionnel. Pour autant, l'enquête ne s'inscrit pas complètement dans la tradition de la sociologie des organisations dans la mesure où les conseillers pour l'emploi n'ont pas été des acteurs du changement. Parce qu'être acteurs a parfois un coût trop élevé, ils ont au contraire préféré se déterminer rationnellement comme des agents sociaux. Mieux, ils n'ont pas cherché à avoir une prise sur les transformations de l'ANPE car ils avaient de "bonnes raisons" de se désintéresser des changements opérés.LILLE1-BU (590092102) / SudocSudocFranceF