Aucune étude n'avait encore traité des horizons chronologiques à une échelle géographique aussi vaste que le nord de la Gaule et n'avait porté sur la totalité des catégories céramiques et de la verrerie des trois premiers siècles de notre ère. Le cadre géographique de la présente étude correspond aux provinces romaines de Gaule Belgique, de Germanie inférieure et à la partie septentrionale de la Germanie supérieure. Nous définissons un horizon comme une période de temps archéologique correspondant à un éventail de matériel en usage au cours de cette période. Le concept d'horizon chronologique en archéologie recouvre parfois des réalités diverses ; il faut ainsi opérer une distinction entre les horizons élaborés à l'échelle d'un site, les horizons funéraires, les horizons stratigraphiques et les horizons de synthèse qui sont l'objet de cette étude. L'utilité première des horizons est de raisonner sur une base chronologique fiable et de déterminer des associations de matériel. De cette manière, des types de vases en verre ou en céramique dont la datation demeurait imprécise, en raison de leur présence en contexte aux côtés d'autres formes mieux connues, pourront trouver leur place à l'intérieur d'un horizon. La notion même d'horizon est ancienne et remonte aux découvertes réalisées sur une série de sites militaires majeurs durant la première moitié du XXème siècle. Ces camps sont à l'origine des premiers canevas pour le nord de la Gaule ; nous parlons d'horizons classiques pour qualifier le mobilier mis au jour sur les sites de Oberaden, Haltern, Hofheim et Niederbieber. Parmi les horizons classiques, ceux de Oberaden et de Haltern gardent toute leur pertinence car l'occupation de ces camps fut de courte durée et les dates précises qu'ils fournissent font désormais l'objet d'un large consensus, tant dans le chef des numismates que dans celui des céramologues. La création d'horizons chronologiques se fonde sur le témoignage d'ensembles clos. Le choix de ces derniers répond à une série de critères au rang desquels viennent en tête l'homogénéité chronologique de l'assemblage, sa durée de constitution, la présence de fossiles-directeurs et l'abondance du matériel. La détermination des horizons de synthèse de la céramique et de la verrerie s'est fondée sur l'examen du mobilier de quarante ensembles inédits provenant de sites d'habitat ruraux et urbains ; leurs données ont été confrontées à celles de plusieurs ensembles déjà publiés dont nous avons réinterprété la datation à la lumière des acquis récents de la recherche. Cette confrontation a finalement abouti à une périodisation en douze horizons pour la céramique et en sept horizons pour la verrerie. Les termini post quos et ante quos des différents horizons sont le résultat d'un équilibrage et d'un recoupement entre plusieurs informations chronologiques objectives : les données reconnues par la recherche scientifique moderne, les fourchettes chronologiques des horizons classiques sur lesquelles il est impossible de faire l'impasse et, en finale, un choix « intuitif », fruit de l'expérience et de l'observation du matériel de plusieurs contextes d'une même période. Le premier horizon céramique commence au début de la période augustéenne, en 30/25 av. J.-C., au moment où se manifestent les premières apparitions en contexte de la céramique belge. La périodisation de la verrerie débute trois décennies plus tard, il faut attendre les deux premières décennies du Ier siècle ap. J.-C. pour découvrir les premiers vases en verre en contexte d'habitat et en contexte funéraire mais leur nombre demeure très limité jusque 20-30 ap. J.-C. L'analyse du mobilier céramique d'un très grand nombre d'ensembles clos du Haut-Empire issus de différentes régions du nord de la Gaule a mis en évidence l'existence de faciès régionaux. Les IIe et IIIe siècles consacrent l'essor des faciès régionaux et au IIIe siècle se dessinent nettement six grands faciès correspondant à la zone du Rhin inférieur, l'Est de la Gaule Belgique, la Champagne, le sud-ouest de la Gaule Belgique, le nord-ouest de la Gaule Belgique et le centre de la Cité des Tongres. La caractérisation des faciès régionaux est une démarche complémentaire à celle des horizons chronologiques. Si la seconde s'appuie sur des arguments de temps, la première a davantage recours à des critères géographiques mais horizons et faciès ont tous deux des répertoires de formes qui évoluent au cours du temps. Cette recherche a également voulu démontrer l'intérêt et l'utilité d'une approche conjointe de la chronologie de la céramique et de la vaisselle en verre. La verrerie offre en effet de multiples arguments chronologiques et la confrontation des deux types d'artefacts est une source d'informations précieuse pour la datation des ensembles fermés.Doctorat en philosophie et lettres (histoire de l'art et archéologie) (ARKE 3)--UCL, 200