Étude des capacités d’inhibition, des processus moteurs, et de l’impact de la thérapie cognitive-comportementale sur le fonctionnement cérébral des patients atteints du syndrome de Gilles de la Tourette

Abstract

Ce qui caractérise principalement le syndrome de Gilles de la Tourette (SGT), c’est la présence de tics moteurs et vocaux chez les individus qui en sont atteints. Toutefois, les tics ne sont que la pointe de l’iceberg pour plusieurs patients. Le SGT s’accompagne souvent de troubles concomitants. Les plus fréquents sont le trouble obsessionnel-compulsif et le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité. De plus, certaines études neuropsychologiques ont rapporté que les patients atteints du SGT présentaient des capacités d’inhibition réduites, ce qui seraient directement associées à la difficulté de contrôler les tics. Toutefois, plusieurs résultats contradictoires ont été publiés à ce sujet. Aussi, plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer la génération des tics. Parmi celles-ci, on retrouve notamment certaines études qui ont identifié une suractivité des régions motrices du cerveau. Encore ici, il n’existe pas de conclusion définitive au sein de la littérature. On ne peut guérir du SGT, mais il existe plusieurs traitements qui permettent de diminuer la sévérité des symptômes. La pharmacothérapie est généralement efficace, mais s’accompagne souvent d’effets secondaires indésirables. La thérapie cognitive-comportementale s’avère est une avenue de traitement intéressante, car elle n’entraîne pas d’effets secondaires sur le plan physique. Bien que son efficacité ait été maintes fois démontrée, on ne connaît toujours pas les mécanismes neuronaux impliqués dans son fonctionnement. L’objectif général de cette thèse était de mieux comprendre le fonctionnement cognitif des patients atteints du SGT et d’identifier les substrats neurobiologiques qui sous-tendent ces fonctions. Nous souhaitions observer comment ces fonctions évoluent suite à une thérapie cognitive-comportementale permettant de diminuer les tics. Cet objectif général a été divisé en trois volets. Le premier volet visait à mieux comprendre et à quantifier les déficits d’inhibition retrouvés au sein du SGT, ainsi que les facteurs qui les modulent. Nous voulions également identifier les corrélats électrophysiologiques des capacités d’inhibition. Le deuxième volet concernait les processus de préparation et d’exécution des mouvements et leur lien avec la symptomatologie du SGT. Dans le troisième volet, nous avons investigué l’impact d’une thérapie cognitive-comportementale sur le fonctionnement cérébral des patients atteints du SGT. Nous avons tenté également d’identifier des prédicteurs du succès thérapeutique. Pour répondre à ces objectifs, nous avons d’abord réalisé une méta-analyse pour déterminer si les patients atteints du SGT présentaient des déficits d’inhibition et pour comprendre quels facteurs influençaient les capacités d’inhibition. À l’aide des potentiels évoqués, nous avons aussi évalué les corrélats électrophysiologiques des capacités d’inhibition (P300 No-Go) à l’aide d’une tâche de compatibilité stimulus-réponse qui incluait une composante No-Go. Nous avons aussi évalué les corrélats électrophysiologiques des processus de préparation et d’exécution motrice (sLRP et rLRP) durant cette même tâche. Finalement, nous avons investigué comment une thérapie cognitive-comportementale pouvait modifier l’activité du cerveau, à la fois durant la tâche de compatibilité stimulus-réponse (sLRP et rLRP) et durant une tâche oddball (P300; onde positive apparaissant environ 300 ms après la présentation d’un stimulus et associée à l’évaluation et à la catégorisation des stimuli). Nos résultats ont d’abord démontré que les patients atteints du SGT présentaient des déficits d’inhibition durant les tâches de Stroop, de complétion de phrases, de tracement de cercles, et la Continuous Performance Task. Toutefois, la performance durant les tâches de compatibilité stimulus-réponse et Go/No-Go était quant à elle normale. La présence d’un TDAH ainsi que des tics plus sévères étaient associés à des déficits d’inhibition plus importants. Notre étude électrophysiologique a révélé une P300 No-Go plus ample au niveau frontal chez les patients atteints du SGT, en comparaison avec des sujets sains. Ensuite, dans les conditions compatibles et incompatibles, les patients atteints du SGT ont présenté un délai relatif à l’amorce du sLRP ainsi qu’une plus grande amplitude du rLRP, suggérant ainsi un délai quant à la préparation des mouvements, ainsi qu’une plus grande activité des aires motrices du cerveau lors de l’exécution des mouvements. Cette activité s’est toutefois normalisée suite à la thérapie. La latence de l’amorce du sLRP incompatible combinée à l’amplitude de la N200 (onde négative apparaissant environ 200 ms après la présentation d’un stimulus et associée au contrôle cognitif) incompatible ont permis de prédire 43% de la variance associée à la diminution des tics après le traitement. Finalement, nous avons aussi observé que la thérapie permettait une normalisation de la P300 dans une tâche oddball, ce qui suggère que davantage de ressources cognitives sont désormais mobilisées dans les processus de mémoire de travail. Cette normalisation était localisée au niveau du cortex pariétal. Toutefois, l’activité cérébrale mesurée durant cette tâche ne permettait pas de prédire le succès thérapeutique. Nous avons donc démontré que les patients atteints du SGT présentaient un patron d’activité corticale différent de celui des participants contrôles, en lien avec les fonctions motrices et l’inhibition. Les changements relatifs à la symptomatologie du SGT induits par la thérapie cognitive-comportementale se reflètent aussi au niveau du fonctionnement cérébral des patients, où certaines modifications spécifiques peuvent être vues.Tourette syndrome (TS) is mainly characterized by the presence of motor and vocal tics. However, tics are just the tip of the iceberg for many patients. TS often comes with concomitant disorders, such as obsessive-compulsive disorder and attention deficit hyperactivity disorder. In addition, some neuropsychological studies have reported that TS patients show diminished inhibitory functions, which could be reflected in an incapacity to inhibit tics. However, no consensus has been reached on the matter of inhibitory functions in TS. Also, several hypotheses have been advanced to explain the generation of tics. Some studies that have identified overactivity of motor regions of the brain as a cause of tic generation. Here again, there is no definitive conclusion in the literature. While TS cannot be fully cured, several treatment options exist. These treatments have been shown to reduce tic severity. Pharmacotherapy is usually effective in most patients but is often accompanied by unwanted side effects. Cognitive-behavioral therapy was found to be an interesting treatment avenue since it does not cause physical side effects. Although its effectiveness has been demonstrated many times, its neural mechanisms are still poorly understood. The objective of this thesis was to give a better understanding of the cognitive functioning of TS patients and to investigate the neurofunctional substrates underlying these functions. We also wanted to evaluate the impact of a cognitive-behavioral therapy on these functions. This general objective was divided into three specific objectives. The first objective was to better understand inhibitory deficits found in TS. We also wanted to identify the electrophysiological correlates of inhibitory functions. The second objectives concerned movement preparation and execution processes, as well as the link between these processes and the symptomatology of TS. For the third objective, we investigated the impact of a cognitive-behavioral therapy on the brain function of TS patients and tried to identify predictors of treatment outcome. To this end, we first performed a meta-analysis of inhibitory functions in TS patients. This meta-analysis first aimed to determine if TS patients truly exhibited inhibitory deficits, and then to understand the factors influencing such deficits. Using event-related potentials, we also evaluated the electrophysiological correlates of inhibitory function (P300 No-Go) using a stimulus-response compatibility task that included a No-Go component. We also evaluated the electrophysiological correlates of motor preparation and execution processes (sLRP and rLRP) during the same task. Finally, we investigated how cognitive-behavioral therapy could alter brain activity, both during the stimulus-response compatibility task (sLRP and rLRP) and during an oddball task (P300; a positive wave peaking approximately 300 ms after stimuls onset and associated to stimulus evaluation and categorization). Our results first showed that TS patients had inhibitory deficits during the Stroop task, sentence completion paradigm, circle tracing task, and the Continuous Performance Task. The performance during the stimulus-response compatibility and Go/No-Go compatibility tasks was however normal. The concomitant presence of ADHD as well as more severe tics were associated with greater inhibitory deficits. Our electrophysiological study revealed a larger frontal No-Go P300 in TS patients. Then, in compatible and incompatible conditions, TS patients presented a delayed sLRP onset, as well as a larger rLRP peak. This suggests a delay in movement preparation, as well as an overactivation of motor areas during movement execution. These measures were however normalized following cognitive-behavioral therapy. The latency of the incompatible sLRP onset and the incompatible N200 (a negative wave peaking approximately 200 ms after stimuls onset and associated to cognitive control) amplitude predicted 43% of the variance associated with the decrease in tic severity after treatment. Finally, we also observed that the therapy allowed a normalization of the P300 in an oddball task, which suggests that more cognitive resources are now mobilized by working memory processes. This normalization was localized to the parietal cortex. However, brain activity measured during this task was not predictive of treatment outcome. With regards to motor function and inhibition, TS patients display a pattern of cortical activity that differs from that of control participants. Changes in the symptomatology of TS induced by cognitive-behavioral therapy are also reflected in the cerebral functioning of patients, where specific normalization in brain activity can be found

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