Notre recherche s’articule autour de cette question : comment Tom Cruise, par la
manière singulière qu’il a de se présenter à nous, réfléchit-il le cinéma ? En s’inspirant de la
démarche du philosophe Stanley Cavell, pour qui penser la star nous amène nécessairement à
penser le cinéma, et inversement, ce mémoire explore la filmographie de Tom Cruise pour se
demander ce qu’est une star hollywoodienne, et plus spécialement quel est son lien à l’ontologie
de l’image cinématographique.
Ainsi, dans un premier temps, nous examinons la question de l’ontologie du cinéma pour
Cavell, et comment la star se crée à même les puissances révélatrices du cinéma, ce qui nous
permet, du coup, de distinguer notre approche de celle, sémiologique, favorisée par les star
studies. Dans un deuxième temps, nous explorons le problème du scepticisme tel qu’il se
présente à Tom Cruise. Pour Cavell, la star est un modèle auquel confronter notre expérience
ordinaire : c’est en affrontant son scepticisme que Tom Cruise peut nous servir de guide, entre
autres parce que le drame de Tom Cruise s’appuie sur et révèle notre expérience du cinéma, que
Cavell décrit comme une « image mouvante du scepticisme ». Et comme il s’agit d’un drame
récurrent dans la filmographie de Tom Cruise, nous y voyons un exemple de perfectionnisme
moral.
Enfin, Minority Report (Steven Spielberg, 2002) introduit un questionnement nouveau
dans la carrière de Tom Cruise, lié au dispositif projetant son image. Or, comme Cavell a publié
son ouvrage The World Viewed en 1971, à un moment où l’expérience du cinéma était encore
profondément liée à un contexte de visionnement précis (la salle obscure, l’écran géant, la foule,
la pellicule, etc.), Tom Cruise semble se demander cette fois : la star étant liée essentiellement
à l’image photographique, qu’advient-il de la star dans le contexte d’un cinéma numérique ? Ce
qui implique une seconde question : la star peut-elle encore nous servir de modèle à l’ère de
l’expérience informatisée et pour penser l’image numérique ?Our study is structured around this question: how does Tom Cruise, with his singular
manner of being present to us on screen, reflects our experience of cinema? Our approach is
inspired by the philosopher Stanley Cavell, for whom thinking about film stars lead us to think
about cinema, and vice versa. This dissertation explores Tom Cruise’s filmography by asking
what is a star, in Hollywoodian cinema, and more specifically, what is the relation between the
star and the ontology of the cinematographic image.
First, we will examine the question of the ontology of film for Cavell, and how the star
creates itself by using cinema’s revelatory power. This will then help us to distinguish our
approach from the star studies, and their preference for semiology. Secondly, we will explore
the problem of skepticism that takes hold of Tom Cruise: for Cavell, the film star is a model to
whom we confront our ordinary experience. By accepting his skepticism, Tom Cruise becomes
a guide for the spectator, in part because this skeptical drama reflects our experience of cinema,
which Cavell describes as a “moving image of skepticism”. And since it’s a recurring drama in
Tom Cruise’s filmography, we propose that it becomes an example of moral perfectionism.
Finally, Minority Report (Steven Spielberg, 2002) introduces a new questioning for Tom
Cruise, connected to the apparatus that projects his image. Cavell wrote his book The World
Viewed in 1971, when the experience of cinema was still determined by a precise setting for
viewing movies (the dark room, the large screen, the audience, film, etc.) So, in this movie, Tom
Cruise seems to ask: if the film star is essentially linked with the photographic image, what
becomes of the star within digital cinema? This question imply a second one: can the film star
still be a guide for the spectator in our era of digital experience, and can she still help us think
about digital image