Élaboration d’une liste de couples « bactérie/famille d’antibiotiques » d’intérêt prioritaire dans le contrôle de la diffusion de l’antibiorésistance de l’animal aux humains et propositions de mesures techniques en appui au gestionnaire

Abstract

Citation suggérée : Anses (2023). Élaboration d’une liste de combinaisons « bactérie/famille d’antibiotiques » d’intérêt prioritaire dans le contrôle de la diffusion de l’antibiorésistance de l’animal à l’humain et propositions de mesures techniques en appui au gestionnaire (saisine n°2020-SA-0066). Maisons-Alfort : Anses, 192 p.L’antibiorésistance est une préoccupation majeure de santé publique, partagée par un très grand nombre d’acteurs de la santé humaine et animale au niveau mondial. D’après le règlement (UE) n°2019/6 relatif aux médicaments vétérinaires et abrogeant la directive 2001/82/CE, l’antibiorésistance est définie comme étant « l’aptitude d’un micro-organisme à survivre ou à se développer en présence d’une concentration d’un agent antimicrobien habituellement suffisante pour inhiber ou tuer des micro-organismes des mêmes espèces ». Une étude publiée en 2022, estimait que 1,27 million de décès dans le monde étaient directement liés à l'antibiorésistance en 2019, soit près de trois fois plus que le paludisme (409 000 décès en 2019) ou deux fois plus que le sida (720 000 décès en 2019), selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS). En Europe, il a été estimé que plus de 670 000 infections à bactéries résistantes étaient survenues en 2015, conduisant à plus de 33 000 décès attribuables à ces infections, avec une nette augmentation depuis plus de dix ans. En France, la prévention de l’antibiorésistance est encadrée au niveau national par plusieurs plans ministériels. En ce qui concerne la santé humaine, le ministère des Solidarités et de la santé a publié en février 2022 la nouvelle stratégie nationale 2022-2025 de Prévention des Infections et de l’Antibiorésistance. Cette stratégie s’inscrit dans la continuité de la feuille de route interministérielle de 2016 pour la maîtrise de l’antibiorésistance et du Programme national d’actions pour la prévention des infections associées aux soins (PROPIAS) de 2015, et comporte trois objectifs principaux :• prévenir les infections courantes, comme les bronchites, les gastro-entérites, grâce à des gestes du quotidien d’hygiène et à la vaccination ;• réduire le risque d’infections associées aux soins, notamment les infections nosocomiales ;• préserver l’efficacité des antibiotiques.Les deux piliers de cette stratégie sont, d’une part, les actions de prévention et contrôle des infections et, d’autre part, celles promouvant le bon usage des antibiotiques. La prévention de l’antibiorésistance est donc un défi à l’interface de plusieurs secteurs et disciplines. Il est maintenant clairement établi que les compartiments humains, animaux et environnementaux sont largement interconnectés et que des bactéries résistantes à des antibiotiques peuvent circuler entre ces différents compartiments. A ce titre, la problématique de l’antibiorésistance est particulièrement emblématique du concept One Health, selon lequel la santé humaine, la santé animale et la santé des écosystèmes sont étroitement liées et interdépendantes. Cette approche One World-One Health recommandée par les instances internationales depuis 2015 ( OMS 2016 ; European Commission 2017), implique que des bactéries résistantes aux antibiotiques présentes chez les animaux de production ou de compagnie puissent être transférées aux humains, par transmission directe à travers des contacts rapprochés avec les animaux, ou indirecte à travers l’environnement, la voie aérienne, ou la consommation de produits alimentaires contaminés. Toutefois, il est généralement difficile d’affirmer ou d’infirmer qu’une infection bactérienne chez les humains, qu’elle soit résistante à un antibiotique ou pas, est d’origine animale, humaine ou environnementale. Hormis certains cas par exemple de toxi-infections alimentaires, où un aliment d’origine animale est clairement incriminé, les investigations épidémiologiques ne sont pas suffisantes pour établir formellement un lien causal. D’une façon générale, au stade actuel des connaissances, la contribution réelle du secteur animal aux infections bactériennes résistantes aux antibiotiques chez les humains est difficilement quantifiable. Cependant, les antibiotiques (ou familles d’antibiotiques) utilisés chez les animaux étant pour la plupart les mêmes que ceux utilisés chez les humains, la pression de sélection imposée par cette utilisation vétérinaire contribue à l’installation chez les animaux, de réservoirs de bactéries résistantes qui sont pathogènes pour les humains.A défaut de connaître son niveau réel, l’existence d’un risque de transmission de l’animal aux humains de bactéries résistantes aux antibiotiques a incité les pouvoirs publics à promouvoir une utilisation plus raisonnée des antibiotiques chez les animaux. Dès les années 1990, l’utilisation de certains antibiotiques comme promoteurs de croissance chez les animaux de rente a été interdite dans l’Union Européenne (UE). Les antibiotiques utilisés chez l’animal le sont maintenant uniquement en tant que médicaments permettant le traitement et la maîtrise des infections bactériennes et ils sont soumis à prescription vétérinaire.En France, un effort important en médecine vétérinaire a été réalisé grâce à la mise en place de deux plans nationaux de lutte contre l’antibiorésistance (plans Ecoantibio). Le premier plan Ecoantibio, couvrant la période 2012-2016, visait une réduction de 25 % de l’usage des antibiotiques en cinq ans, avec une attention particulière à l'utilisation des antibiotiques d'importance critique pour la médecine humaine. L’objectif global du premier plan Ecoantibio a été atteint, avec une diminution de 36,5 % de l’exposition animale aux antibiotiques en cinq ans. La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt du 13 octobre 2014 a ensuite fixé un objectif de réduction de 25 % en trois ans de l’utilisation des antibiotiques appartenant aux familles des fluoroquinolones et des céphalosporines de 3e et 4e générations (C3-4G), en prenant l’année 2013 comme référence. Toutes espèces animales confondues, l’exposition aux fluoroquinolones et aux C3-4G a continué de diminuer, avec des baisses respectives de 87,3 % et de 94,3 % par rapport à 2013. Suite au premier plan Ecoantibio, le second plan Ecoantibiocouvrant la période 2017-2022 visait un objectif de réduction de 50 % de l'exposition à la colistine en cinq ans en filière bovine, porcine et avicole (en prenant comme référence le niveau d'exposition moyen 2014-2015). Ce plan prévoyait également des actions de communication et de formation, l'accès à des alternatives aux antibiotiques et l'amélioration de la prévention des maladies animales. L’objectif de réduction de l’exposition à la colistine fixé par le second plan Ecoantibio a été dépassé, la diminution de l’exposition en filières bovine, porcine et avicole ayant atteint 66 % pour l’année 2022 (soit au-delà de la réduction de 50 % prévue par le plan)

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