Favoriser la professionnalité émergente du personnel enseignant débutant au collégial par la mise en place d'activités de développement pédagogique basées sur ses besoins de soutien
Pendant ce parcours doctoral, nous avons travaillé à la mise en place de modalités d’accueil et d’accompagnement du personnel enseignant débutant au Cégep Limoilou au régulier et à la formation continue. Lors de la première partie du parcours doctoral, nous avons mis en lumière le processus d’insertion professionnelle vécu par les enseignantes et enseignants qui débutent au collégial et cerné les besoins de soutien ressentis pendant leurs premières années de pratique. Contrairement à l’ordre préscolaire, primaire et secondaire où les enseignantes et les enseignants doivent obtenir une qualification à l’issue d’une formation spécifique en enseignement, où les tolérances d’engagement sont balisées, au collégial, particulièrement dans les programmes techniques, il faut avoir une expertise disciplinaire (reconnue par l’obtention d’un baccalauréat disciplinaire) pour être considéré apte à enseigner. Aucune formation pédagogique n’est requise.
Au collégial, qu’une personne enseignante soit novice ou expérimentée, la convention collective (Fédération nationale des enseignants et enseignantes du Québec [FNEEQ] [CSN], 2022a) prescrit que les cours doivent être distribués en fonction de l’ancienneté, sans égard au contenu du cours à enseigner. Comment sont accompagnées ces personnes enseignantes qui débutent au collégial dans la transition entre leur rôle d’experte ou d’expert disciplinaire à leur nouveau rôle d’enseignante ou d’enseignant? Quels besoins de soutien ont ces personnes en débutant et quelles modalités sont en place afin de les accompagner? Comment sont outillées les personnes enseignantes afin de développer des pratiques pédagogiques favorisant la réussite éducative des étudiantes et des étudiants du collégial?
Dans la première partie du parcours doctoral, soit dans le projet 1, trente-trois (n = 33) personnes ont été rencontrées lors de vingt-et-un (n = 21) entrevues semi-dirigées et sept (n = 7) groupes de discussion afin d’identifier les besoins de soutien et le processus d’accompagnement en insertion professionnelle vécu au Cégep Limoilou. Les résultats qualitatifs ont mis en évidence la disparité dans l’accompagnement reçu à la formation continue et au régulier. Les besoins de soutien varient grandement de ceux répertoriés dans les études portant sur les enseignantes et les enseignants du préscolaire, primaire et secondaire. (Allard, 2015; Desautels, 2013; Mukamurera et al., 2019). De plus, la discipline enseignée et le contexte (formation continue ou régulier) révèlent des modalités d’accompagnement distinctes. Nos résultats indiquent par ailleurs que l’engagement dans la profession, qui inclut les préoccupations à caractère pédagogique et les prises de conscience quant aux défis soulevés par l’enseignement (diversité étudiante, utilisation des technologies, pédagogies actives, évaluation par compétences, etc.), s’installent au fil des sessions, en fonction du contexte d’enseignement.
Pendant la deuxième partie du parcours doctoral, soit dans le projet 2, nous avons mis en place des modalités d’accueil et d’accompagnement du personnel enseignant débutant au collégial en cohérence avec les besoins de soutien identifiés. Nous avons ainsi collaboré avec une équipe de personnes – conseillères pédagogiques, à la Direction des ressources humaines (DRH), du comité exécutif du syndicat du Collège, des services adaptés, du service de psychologie, œuvrant à la bibliothèque, offrant le support technopédagogique, détenant une expertise concernant les personnes étudiantes internationales ou issues de l’immigration récente – afin de développer un référentiel d’activités pour favoriser la professionnalité émergente. Ces activités ont été mises en place à partir d’un calendrier cyclique. Nous avons également documenté les indices de professionnalité émergente à l’aide d’un questionnaire sur le sentiment d’autoefficacité passé en deux temps au personnel enseignant ayant participé aux activités proposées, et documenté les causes de l’engagement (ou du désengagement) dans la profession.
L’approche méthodologique adoptée alliait des données quantitatives et qualitatives. Des questionnaires ont permis de collecter des données sur l’évolution du sentiment d’autoefficacité du personnel enseignant (Temps 1 : n = 22; Temps 2 : n = 11) ainsi que pour l’appréciation générale des activités proposées. Trois groupes de discussion ont également été organisés avec des personnes conseillères pédagogiques (n = 7) et des personnes responsables des affectations (n = 7) afin d’évaluer le référentiel d’activités et pour approfondir l’interprétation des données recueillies en lien avec le sentiment d’autoefficacité.
Les résultats ont pu démontrer la pertinence des éléments mis en place, mais également une évolution positive du sentiment d’autoefficacité du personnel enseignant débutant dans la profession. Dans le futur, il serait intéressant de mesurer cette évolution du sentiment d’autoefficacité sur une plus longue période et avec un plus grand nombre de personnes participantes