Phaneuf, Marc-Antoine K.

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15 avril – 28 mai 2023 April 15 – May 28, 2023MARC-ANTOINE  K. PHANEUFLes meilleures jokes  de MaskoutainsÀ propos  de l’artisteLes œuvres de Marc-Antoine K. Phaneuf sont des collections, des inventaires et des classe-ments. Elles interrogent et déplient la culture populaire de même que les récits contemporains officiels et marginaux. Souvent construites de textes, elles prennent la forme de livres et d’ex-positions. En galerie, il développe depuis quelques an-nées des installations où le·la spectateur·rice est appelé·e à lire un texte avec tout son corps. Ain-si, la salle d’exposition transformée en lieu ba-roque et chatoyant permet aux spectateurs·rices de vivre le texte de manière inédite et immer-sive. La lecture devient une déambulation, où le·la lecteur·rice tourne en rond pour prendre connaissance de la totalité de ce qui est écrit. Ce système était à l’œuvre dans ses expositions Euphorie-propagande (Galerie UQO, Gatineau, 2018), Autoportrait en zigzag dans les méandres des collections patrimoniales (Grande Biblio-thèque, Montréal, 2018) et Ma collection d’ex-position en duo avec Charles Sagalane (Regart, Lévis, 2019). Ludiques et toujours empreintes d’humour, ses œuvres amènent les specta-teurs·rices à réfléchir sur leur rapport aux textes, aux images et aux objets usuels. Les meilleures jokes de Maskoutains s’intéresse au langage et aux récits vernaculaires, et s’ins-crit à la suite de ses projets récents. Son livre Carrousel encyclopédique des grandes vérités de la vie moderne (La Peuplade, 2020) liste quelque 2 600 aphorismes détraqués, vrais ou faux, souvent troublants. Dans Conspirations à gogo (une installation présentée à la Maison de la littérature dans le cadre de Manif d’art 10, la biennale de Québec, 2022), il pastiche les récits des adeptes des théories du complot pour raconter une histoire secrète du monde contem-porain improbable et farfelue. About  the artistMarc-Antoine K. Phaneuf’s works are collections, inventories and classifications. They investigate and unpack popular culture as well as official and marginal contemporary narratives. Often constructed out of words, they take the form of books and exhibitions. In recent years, he has developed gallery instal-lations in which viewers are asked to read texts with their entire bodies. The exhibition space is transformed into a baroque and shimmering place where viewers can experience the text in an original and immersive manner. The act of reading becomes an act of walking whereby the reader goes around in circles in order to take in the totality of the writing. Phaneuf used this system in his exhibitions Euphorie-propagande (Galerie UQO, Gatineau, 2018), Autoportrait en zigzag dans les méandres des collections patrimoniales (Grande Bibliothèque, Montreal, 2018), and Ma collection d’exposition (Regart, Lévis, 2019), which was a collaboration with Charles Sagalane. Playful and always full of hu-mour, his work encourages viewers to reflect on their relationship to texts, images, and everyday objects. Les meilleures jokes de Maskoutains is interested in language and vernacular stories and builds on Phaneuf’s recent projects. His book Carrou-sel encyclopédique des grandes vérités de la vie moderne (La Peuplade, 2020) lists about 2600 outlandish aphorisms, which, whether true or false, are often disturbing. In Conspi-rations à gogo (an installation presented at the Maison de la littérature as part of Manif d’art 10, la biennale de Québec, 2022), he makes a pastiche of conspiracy theories in order to tell an improbable, bizarre, and secret history of the contemporary world. Images : Marc-Antoine K. Phaneuf, Les meilleures jokes de Maskoutains (extraits), 2023.Un Maskoutain et un Drummondvillois entrent dans un bar. Le Maskoutain commande une bière et la verse sur la tête du Drummondvillois.L’humour, les blagues,  Drummondville, la violenceMon grand-père et parrain Roger faisait constamment des jeux de mots, souvent d’une simplicité désarmante. Comment ap-pelle-t-on une comptable en peine ? Une calculatriste. J’ai toujours aimé que la chute de ces blagues ne tenait qu’en un mot, voire même qu’en une partie de mot, j’ai toujours aimé la rapidité avec laquelle la joke appa-raît, comme un éclair. Je me plais à écrire de tels calembours, en tâchant de les réduire à leur formule la plus simple, les amputant de leurs questions préambule. La graisse antique. La reine de lutte. Une gastro en terrine. Vous voyez le genre. La rencontre de deux mots amène une image inédite. *L’aphorisme porte une vitesse de chute similaire : la fin conséquente, parfois surpre-nante, d’une affirmation préalable. La même fonction existe dans le Tweet, pour le meilleur et pour le pire. J’ai été obsédé par Twitter dans les dernières années. Je n’y étais pas très loquace, mais je suis souvent tombé dans des puits sans fond de commen-taires humoristiques, débilitants ou haineux, qui pullulent sur ce site. Il m’apparaît mal-sain que tout un chacun puisse répondre ce qu’il veut à qui que ce soit, quidams ou per-sonnalités publiques tout acabit, en temps réel. C’est certes un privilège démocratique important, mais en fait, Twitter démontre que plusieurs, anonymement ou non, n’ont à répondre que des vacheries. Lors de ces dérives, j’ai constaté que Twitter est un site où tout le monde finit tôt ou tard par démontrer qu’il est un idiot. Et même des ami·es proches, des auteurs·rices que j’estime, des journalistes crédibles, entre autres, m’ont apparu décalés et gratuite-ment vachards. De petites bravades où tout le monde gagne, mais uniquement pour soi-même, une joute langagière qui tourne à vide. *Il y a quelques années, ma blague préfé-rée consistait à raconter à ma fiancée, au retour de l’épicerie, que j’avais arraché le dernier chou vert des mains d’une vieillarde. La scène hypothétique m’amusait. Avec la pandémie, l’approvisionnement irrégulier de certains produits et l’inflation qui en touche plusieurs autres, je trouve la blague un peu trop réaliste, elle me semble avoir perdu son vernis de potentiel sketch humoristique, voire de dessin animé. *Les meilleures jokes de Maskoutains s’intéresse à ces phrases punch et à l’amorce des blagues. « Une fois c’est un gars, com-prends-tu […] » comme disait Claude Blan-chard. Le babillement général d’un certain type d’humour où j’active les chutes avant qu’on ne tombe dans une langueur verbale, tout en puisant dans une violence langagière, qui devient de plus en plus courante sur les réseaux sociaux, une espèce de violence ordinaire qui apparaît avec la liberté de ré-pondre en temps réel, à chaud — la possibili-té d’écrire au premier ministre sans avoir à le déclarer comme « très honorable » en début de missive. L’exposition, construite de scènes que vous connaissez probablement déjà — des clichés humoristiques —, puise dans ce qui peut être parfois très drôle et parfois terrible. De petites bravades idiotes, qui tombent dans l’agression, la torture. Bref, juste du fun.  *Quand j’étais enfant, un oncle m’a racon-té qu’il avait eu de la difficulté à trouver un restaurant ouvert à l’heure du midi à Terre-Neuve, parce que les employé·es avaient droit à une pause de dîner. Je ne compre-nais pas la blague parce que l’information qu’elle véhiculait m’apparaissait davantage comme un fait anthropologique qu’une déri-sion. Il m’a fallu plusieurs années avant de comprendre que c’était une énième blague de newfie. *Être trop crédule est contreproductif pour l’humour qui fonctionne bien sûr quand on comprend la blague. Le cynisme ambiant face au politique carbure à cette connivence. Celui qui a l’impression de faire rire de lui s’arrangera en retour pour rire de l’autre. Blague pour blague, dent pour dent. *J’ai longtemps cru que le magazine Croc était installé à Drummondville. Il me semblait que c’était cohérent avec son acharnement à propos de cette ville. De mes yeux d’en-fant, ce running gag ne pouvait être qu’au-toréférentiel, on m’avait déjà appris qu’on ne s’acharne pas comme tel sur qui que ce soit. *Je n’ai rien contre Drummondville, évidem-ment. Jusqu’à tout récemment, c’est une ville que je ne connaissais que par son tron-çon de l’autoroute 20 et son Saint-Hubert halloweenesque. En découvrant la ville, elle m’a rappelé Saint-Hyacinthe, où je suis né et où j’ai habité jusqu’à mes 13 ans. La seule « rivalité » que j’ai rencontrée à l’égard de Drummondville est un senti-ment de fausseté qui me prenait lorsqu’un chargé de cours en architecture référait à l’édifice de l’École professionnelle de Saint-Hyacinthe, qu’on aperçoit par l’auto-route 20, en le situant à Drummondville. À chaque fois qu’il nommait cet exemple, celui d’un édifice qui s’enfonce dans le sol — à Drummondville, quelle infamie ! —, je crissais des dents. Notez toutefois que je n’ai jamais levé la main pour le rectifier. Dans le fond, pour la plupart des gens, Drummondville et Saint-Hyacinthe sont des villes qui ne servent que de décors pour l’au-toroute 20. Au moins à Saint-Hyacinthe, on a les encans de la ferme ! *À l’Halloween dernier, au Saint-Hubert, quand mon fils de vingt-deux mois s’est mis à avoir peur d’un écran mimant le por-trait peint d’un homme se transformant en squelette monstrueux, nous lui avons expli-qué que le monsieur faisait des blagues, ce qui l’a grandement rassuré. Ça m’apparaît comme l’exemple le plus sincère de la bonne entente entre le blagueur et son public.  *Ma grand-mère et marraine Marie-France poursuit l’œuvre de son homme, décédé il y aura bientôt trente ans. Son meilleur succès m’habite constamment par sa candeur ma-gnifique, je l’ai d’ailleurs cité dans mon der-nier livre. Que font les Italiens quand ils se couchent ? Ils parlent de lit à lit. Marc-Antoine K. PhaneufArtiste et écrivainFormé en histoire de l’art à l’Université du Québec à Montréal, Marc-Antoine K. Phaneuf est artiste et écrivain. Il a présenté son travail dans plusieurs centres d’artistes autogérés, galeries et musées au Canada. Il a publié plusieurs œuvres littéraires, dont Cavalcade en cyclorama (Le Quartanier, 2013) et le Carrousel encyclopédique des grandes vérités de la vie moderne (La Peuplade, 2020), ainsi que de nombreux livres d’artistes. Il est le concepteur et performeur du spectacle littéraire Fins périples dans les vaisseaux du manège global (2015).Le Maskoutain fait beaucoup de cabotinage dans son exposition.   Humour, Jokes,  Drummondville, ViolenceMy grandfather and godfather Roger used to crack jokes all the time and make puns that were often disarmingly simple. What do ac-countants say when they’re sad? It’s accrual world. I always loved that the punchline of his witticisms relied on one word or even a part of a word; I always loved how quickly the joke emerged, like a flash of lightning.I like to write similar puns, trying to reduce them to their most simple formulation, cut-ting them off from their preliminary ques-tions. Ancient Grease. A wrestling wring. A squeegeenecologist. That kind of thing. The meeting between two words elicits a novel image. *The aphorism has a similar punchline: the ensuing and sometimes surprising result of a prior assertion. The tweet has the same function, for better or for worse. I’ve been obsessed with Twitter in recent years. I haven’t been an avid tweet-er myself, yet often I’ve fallen into a bottom-less pit of humorous, demoralizing, or hateful comments that swarm this platform. To me, it seems unhealthy that anyone can respond in any way they want to anyone they want, nobodies or public figures all alike, in real time. It’s definitely an important democratic privilege but Twitter also shows that many people, anonymous or not, have nothing but nasty things to say. While roaming Twitter, I’ve realized that on this platform everyone, sooner or later, ends up proving that they are idiots. Even close friends, writers I admire, reliable journal-ists, among others, have seemed out of line and gratuitously callous. A type of postur-ing whereby everybody wins, but only for themselves; a game of tongues that goes nowhere.*A few years ago, my favourite joke was to tell my fiancée, when coming back from the grocery store, that I had grabbed the last cabbage out of an old woman’s hands. The hypothetical scene amused me. With the pandemic and the irregular availability of certain goods and the inflation that affected many others, I find the joke a bit too realistic; it seems to have lost its veneer of possible comedy sketch or cartoon.*Les meilleures jokes de Maskoutains is in-terested in punchlines and the begin-nings of jokes. As Claude Blanchard used to say: “There once was a guy, get it?”. The exhibition focuses on the general bab-bling of a certain type of humour, in which I deliver the punchlines before we have time to fall into verbal languor, while drawing on the linguistic violence that is becoming in-creasingly common on social media, a type of ordinary violence that emerges with the freedom to respond in real time, while the iron is hot—as in being able to write to the Prime Minister without having to put “Right Honourable” at the start of the missive.Composed of scenes—humorous clichés—with which you are probably already familiar, the exhibition draws on what can be either very funny or very terrible at times. Idiotic posturing that becomes aggression, torture. In short, just a bit of fun.  *When I was a child, my uncle told me that he had a hard time finding a restaurant open for lunch in Newfoundland because the employ-ees were entitled to a lunch break. I didn’t understand the joke because the information it conveyed seemed to me more like an an-thropological fact than mockery. It took me several years to understand that it was just another Newfie joke.*Being too gullible is counterproductive to humour, which of course only works when we get the joke. The prevailing cynicism around politics thrives on this complicity. People who feel that they’re being laughed at make certain that they in turn laugh at others. A joke for a joke, an eye for an eye.*For a long time, I thought that the magazine Croc was based in Drummondville. It made sense to me given its hostility toward this city. In my eyes as a child, this running gag could only be self-referential; I’d already been taught that one shouldn’t attack anyone like this. *I have nothing against Drummondville, ob-viously. Until very recently, I only knew the city by its stretch of Highway 20 and Halloween-like St-Hubert joint. Now that I’ve learned more about the city, it reminds me of Saint-Hyacinthe, the place where I was born and lived until the age of 13. The only “rivalry” I’ve ever encountered with regard to Drummondville is the sense of falsehood I felt when a sessional instructor in architecture used to refer to the building of the École professionnelle de Saint-Hy-acinthe, which can be seen from Highway 20, as located in Drummondville. Every time he would bring up the example of this building that is sinking into the ground—in Drummondville, what a shame!—I would grit my teeth. Note however that I never once raised my hand to correct him. Ultimately, for most people, Drummondville and Saint-Hya-cinthe are cities that serve no purpose other than a bit of decoration along Highway 20. At least in Saint-Hyacinthe, we have farm auctions! *Last Halloween, when we were at St-Hubert, my twenty-two-month-old son was fright-ened by a screen mimicking the painted por-trait of a man transforming into a monstrous skeleton, and we had to explain to him that the man was joking around, which greatly reassured him. To me, this seemed like the sincerest example of a good understanding between joker and audience.  *My grandmother and godmother Marie-France continues the work of her husband, dead now for almost thirty years. I often recall her best joke because of its wonderful candour; I even quoted it in my last book. What do Bedouins do when they go to sleep? They talk in bed.Marc-Antoine K. PhaneufArtist and writer Holding a degree in art history from the Université du Québec à Montréal, Marc-Antoine K. Phaneuf is an artist and writer. His work has been shown in several artist-run centres, galleries, and museums in Canada. He has published three books, including Cavalcade en cyclorama (Le Quartanier, 2013) and Carrousel encyclopédique des grandes vérités de la vie moderne (La Peuplade, 2020), as well as many artist’s books. He is the creator and performer of the literary show Fins périples dans les vaisseaux du manège global (2015). Translated from French by Oana AvasilichioaeiÀ propos de DRACLa mission de DRAC est de contribuer au développement des pratiques artistiques actuelles dans un cadre multidisciplinaire favorisant l’émergence de nouveaux savoirs tout en accordant une place prépondérante aux projets de partenariats et de collabora-tions ainsi qu’aux résidences.En présentant des œuvres accessibles et de qualité qui font écho aux communautés locales, DRAC conçoit et offre des activités de médiation qui participent au développement de ses publics et à l’émergence d’une communauté de pratique à Drummondville.DRAC est membre de la Société des musées du Québec. About DRACDRAC’s mission is to contribute to the development of current artistic practices within a multidisciplinary framework that encourages the emergence of new know-ledge, while giving a prominent place to partnership and collaboration projects as well as residencies.By presenting accessible and quality works that resonate with local communities, DRAC conceives and offers mediation activities that contribute to the development of its audiences and the emergence of a community of practice in Drummondville.DRAC is a member of the Société  des musées du Québec.DRAC warmly thanks its partners for their support.DRAC remercie chaleureusement ses partenaires pour leur soutien.DRAC est une institution muséale agréée par le ministère de la Culture  et des Communications.Dépôt légal 2023 / Legal Deposit 2023ISBN 978-2-920506-17-6 (imprimé/printed) / 978-2-920506-18-3 (numérique/digital)Bibliothèque et Archives nationales du QuébecBibliothèque et Archives Canada / Library and Archives CanadaDRAC is a museum institution accredited by the ministère  de la Culture et des Communications.Le Drummondvillois se sent pris dans une camisole de farces.    drac.ca

Marc-Antoine K. Phaneuf : les meilleurs jokes de Maskoutains

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