Pour un modèle alternatif de développement du Maroc

Abstract

À partir d’une large revue des écrits théoriques et empiriques ainsi que des divers constats etdiagnostics établis à propos du modèle économique marocain, nous développons des analysespour expliciter les raisons et les mécanismes à l’origine des limites que connait le modèle qui aprévalu et qui prévaut au Maroc ; ensuite nous formulons des propositions de stratégiescorrectives avec un argumentaire fondé sur les conclusions des précédentes analyses.Dans ce mémorandum, nous mettons en exergue et tentons de justifier le rôle central que joueselon nous le partage primaire des richesses, en l’occurrence celui de la valeur ajoutée qui sefait au détriment des salaires. Les comparaisons internationales, dans une perspectivehistorique, permettent de rapprocher le Maroc de la situation dans laquelle se trouvaient despays ayant réussi leur émergence et développement.Nous montrons comment le partage actuel au Maroc perpétue les inégalités selon plusieurscanaux : il freine les progrès en matière d’éducation, favorise la concentration sur une classe del’accumulation du capital (qui se traduit par une transmission intergénérationnelle desinégalités), ce qui compromet de ce fait la promotion de l’investissement productif, au profit deplacements de rentes (comme dans l’immobilier) et donc inhibe les possibilités de gains deproductivité et in fine explique l’atonie de la croissance. Mise en regard avec le rythme deprogression de la population en âge de travailler, celle-ci explique pour une grande partl’importance du chômage au Maroc et la persistance de poches de précarité.Les recommandations auxquelles nous parvenons et que nous exposons sous forme depropositions touchent plusieurs volets. Par exemple la fiscalité du patrimoine : nous discutons 3RéfÉco Working Paper n° 01/2019du bien-fondé de la mise en place d'une telle fiscalité mais aussi des précautions à considérer.Nous relevons ensuite ce qui pourrait-être réalisé au niveau d’une politique nationale desrémunérations et en matière de politique de la concurrence. Un argumentaire est développé pourjustifier les mesures que nous préconisons pour une réorientation de l’appareil productifnational, ou pour un renouveau du syndicalisme et encore pour une moralisation des entreprises(avec notamment un encadrement de la sous-traitance).Soulignons cependant que chacune de ces propositions nécessite, pour être déclinée en mesuresconcrètes et nuancées, une analyse spécifique et de larges concertations, qui devraient interveniraprès le débat national sur les grands traits du modèle de développement alternatif.Conscients du rôle tout aussi crucial de l’investissement en capital humain et en capitalphysique, deux annexes sont consacrés l’une à la politique éducative et l’autre aux conditionsde promotion et de réussite de l’investissement productif (parmi lesquelles le rôle dévolu à lacomposante publique de l'investissement productif).Le choix de traiter ces deux grandes questions à part est inhérent au souci de maintenir uneunité de la réflexion et des conclusions qui ressortent de la question du partage primaire desrichesses. Cependant à l’image de la démarche adoptée pour traiter cette dernière, chacune desannexes comporte à la fois des analyses et argumentaires pour expliquer les raisons desdiagnostics d’échec relevés et pour préparer et justifier les propositions que nousrecommandons.De nos analyses à propos de l’investissement, il ressort que pour sortir l'économie marocainede son actuelle atonie, il importe de repenser les choix en matière d’investissement public quidoivent privilégier les branches ayant des effets d’entraînement les plus larges sur l’économieet nous énonçons quelques critères de référence. Nous insistons sur l’opportunité de pousser lesbanques à mieux remplir leur rôle de financement du secteur productif.L’annexe relative à la politique éducative montre comment les biais proviennent en partie dessources d’inspiration sur lesquelles elle a été fondée au cours de l’histoire récente. Enl’occurrence des rapports et orientations qui ne prennent pas suffisamment en compte lesréalités propres du pays. Nous concluons qu’il importe de ne pas se contenter d’objectifsquantitatifs (nombre d’élèves inscrits), mais qu’au contraire, une place essentielle doit êtreréservée à l’acquisition de compétences et savoir-faire (mesurées, à tous les niveaux du systèmeéducatif, par des tests mondialement reconnus)

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