Schoch, Lucie

Serveur académique lausannois

C M Y KVENDREDI 8 MARS 2019 LE TEMPSSport 21PUBLICITÉLes femmes semblent parvenir à s’imposer toujours davantage sur les terrains sportifs et représentaient ainsi près de la moitié des athlètes engagés lors des derniers Jeux olympiques à Rio en 2016. La situation est en revanche moins réjouissante du côté de leur participation aux ins-tances décisionnelles sportives, où elles restent largement sous-représentées. Se pose alors la question d’une meilleure gouvernance des organisations sportives, car les études, comme celle de Nielsen et Huse au sein des entreprises norvégiennes publiée dans Corporate Governance (2010), montrent qu’une présence équilibrée d’hommes et de femmes au sein des instances de direction contribue à une meilleure performance des organisations, qu’elles soient sportives ou non.Le Comité international olympique (CIO) s’est saisi de la question dans les années 1990. Il crée alors un groupe de travail, «Femmes et sport», qui deviendra plus tard une commission permanente, et introduit en 1996 des objectifs sur la participation des femmes aux instances décision-nelles des comités nationaux olympiques ainsi que des fédérations nationales et internationales lui étant affiliées.Sous son impulsion, certains pays, comme la Finlande, la Suède, l’Allemagne ou la France (mais pas la Suisse), ont mis en place des politiques visant une plus grande parité dans les instances sportives. C’est aussi le cas du côté des fédérations sportives. Aujourd’hui, celles qui n’ont pas de «Commission femmes» ou de «Commission égalité» se pré-occupant de cette question font figure de mauvaises élèves.Chasse gardée pour les postes clésCes mesures ont permis une progression sensible des femmes dans les instances dirigeantes du sport. Mais pour autant, elles y demeurent encore largement sous-représentées dans les organisations sportives locales, nationales et mondiales. L’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes a révélé que la proportion de femmes occupant un poste déci-sionnel en 2015 dans les fédérations nationales des pays de l’Union européenne était de 14%. Au niveau des fédé-rations internationales, une récente enquête menée au sein de l’Institut des sciences du sport de l’Université de Lausanne montre que, concernant celles qui sont reconnues par le CIO, les femmes ne représentent que 17% des membres du conseil d’administration en 2018.Le bât blesse encore davantage du côté des postes clés, qui demeurent occupés très majoritairement par des hommes. Parmi les fédérations sportives internatio-nales affiliées au mouvement olympique, seule celle de triathlon a actuellement une femme présidente, et quatre autres (football, sports équestres, handball et cyclisme) ont une secrétaire générale. Les femmes restent ainsi souvent cantonnées à des fonctions plus secondaires, comme présidente de commission ou adjointe de secrétaire général, qui ne leur permettent pas une pleine participation aux prises de décisions stratégiques. Un épais plafond de verre semble donc se maintenir.Le principal outil utilisé pour combler le retard accu-mulé est l’instauration d’objectifs (proportion de femmes souhaitée) ou de quotas (ratios à respecter). Ils symbo-lisent le glissement d’une conception libérale classique de l’égalité, reposant sur l’idée de concurrence équi-table, à une vision se fondant sur la notion d’égalité des résultats qui suppose qu’il ne suffit pas d’éliminer les barrières formelles pour créer une authentique égalité des chances. Des objectifs ou quotas ne signifient pas forcément une discrimination positive. Ils impliquent uniquement qu’en cas de qualifications égales les femmes doivent être privilégiées car elles sont sous-représentées.Le pouvoir et ses qualités supposéesSi la mise en place de ce type de mesure a tout de même eu le mérite d’améliorer la représentativité des femmes au sein des instances décisionnelles du sport, elle n’y a pour autant pas permis une réelle redistribution du pouvoir. Ce n’est pas que les femmes dirigeantes soient jugées moins compétentes, c’est plutôt que les quali-tés qui leur sont reconnues, leur approche humaine et pragmatique notamment, sont jugées «féminines» et inadéquates pour les postes de pouvoir. La figure du «bon» leader reste un homme.Faire évoluer ces représentations pour permettre aux femmes d’être plus nombreuses dans les instances diri-geantes du sport et de ne plus être tenues à l’écart de la prise de décisions prendra du temps. Cela nécessite de réelles transformations de la culture des instances décisionnelles des organisations sportives, et du milieu sportif en général, qui ne peuvent se faire sans un vrai engagement des hommes. Car la question de l’égalité homme-femme est aussi, et peut-être avant tout, de leur responsabilité. nLa parité dans la gouvernance du sport: un défi de tailleSport étudeLUCIE SCHOCH, SOCIOLOGUEMÉLANIE BENEYEn Suisse, le ski-alpinisme est souvent synonyme de Patrouille des glaciers. Nombre de popu-laires pratiquent ce sport, mais peu savent que nos montagnes abritent de grands champions, les principaux fabricants de matériel et des stations qui soutiennent de plus en plus le ski de randonnée. L’une d’elles, Villars, accueille la crème mondiale du ski-alpinisme dès dimanche.En Coupe du monde, trois nations se partagent les podiums de ski-alpinisme: l’Italie, la France et la Suisse, qui a des chances de médailles dans plusieurs disci-plines. «Nos coureurs sont très polyvalents», assure Pierre-Ma-rie Taramarcaz, entraîneur assis-tant de l’équipe de Suisse et de la relève. Le Bernois Werner Marti et le Gruérien Rémi Bonnet, un spécialiste de vertical race, pour-raient bien s’imposer à la mai-son. Côté féminin, l’étoile mon-tante neuchâteloise, Marianne Fatton, troisième mondiale et meilleure sprinteuse du monde, se démarquera certainement durant l’épreuve de dimanche. Spécialiste des montées sèches, la Haut-Valaisanne Victoria Kreuzer a toutes ses chances dans la course verticale de mercredi. Mais l’of-fensive viendra certainement des jeunes, les Valaisans Aurélien Gay (qui domine le circuit de Coupe du monde en catégorie junior) et Emi-lie Farquet.Il n’y a pas de hasard dans ce haut niveau d’ensemble. «Nos jeunes profitent d’un suivi pro-fessionnel dès l’âge de 14 ans, ils peuvent s’entourer de structures privées comme Mountain Per-formance en Valais, puis, après sélection, intégrer l’un des trois centres régionaux de Suisse», explique Pierre-Marie Tara-marcaz. Les meilleurs athlètes accèdent ensuite au Swiss Team. «A chaque étape, d’anciens ath-lètes et préparateurs physiques les cadrent, adaptent le volume d’entraînement, retiennent les jeunes qui ont tendance à trop s’entraîner et leur apportent des conseils sur la technique.»Arnaud Gasser (22 ans, Verbier) est l’un des premiers produits de Mountain Performance, créée en 2015. «Quand j’ai commencé, la structure n’existait pas. Comme je rêvais d’intégrer l’équipe de Suisse, je me suis entraîné par mes propres moyens», explique cet étudiant en HEC. «Un jour, j’ai eu la chance de côtoyer Pierre-Ma-rie, qui m’a permis de progresser, surtout techniquement. Avec cette nouvelle structure, les marches sont moins hautes et le Swiss Team est plus facile d’accès.»Nocturnes à la verticaleLe jeune Bagnard sera au départ des trois courses individuelles, mais prendre part à une course par équipe lui ferait particulière-ment plaisir. «La notion d’équipe est très importante pour notre sport. C’est l’esprit de cordée et de montagne.» Ces courses par équipe ou en relais ne sont pas des disciplines de Coupe du monde. Elles rencontrent en revanche un engouement populaire grandis-sant: la fameuse Patrouille des glaciers, le Trophée du Muve-ran ou encore l’Intégrale du Rogneux sont des compétitions qui accueillent de plus en plus de concurrents.Pour s’adapter à ce nouveau paradigme, des dizaines de ran-doparcs ont été mis en place en Suisse romande et des pistes restent ouvertes au public la nuit tombée. En début de saison, plus de vingt stations accueillent des nocturnes de type verticales. Objectif: sécuriser la pratique du ski-alpinisme en proposant des itinéraires balisés, tout en auto-risant les pratiquants à utiliser les pistes damées pour la descente. «Ces offres sont indispensables pour l’expansion du ski-alpi-nisme en Suisse. On n’y retrouve pas forcément la notion de com-pétition et c’est certainement ce qui attire de nouveaux adeptes», argumente Arnaud Gasser.Entraînement pour les JOJCôté équipement, les leaders du marché mondial sont suisses. Ils produisent du matériel de pointe pour offrir des skis tou-jours plus légers (Movement et Faction), des peaux (Colltex et Pomoca) qui adhèrent aux skis et des fixations (Fritschi) polyva-La Suisse, cet incubateur  de skieurs-alpinistesMONTAGNE  Après les Portes du Soleil en 2008 et Verbier en 2015, la Suisse accueille une troisième fois les meilleurs skieurs-alpi-nistes du monde du 9 au 16 mars à Villars-sur-Ollon. La station vau-doise sera le fief du ski-alpinisme lors des JOJ 2020lentes. Le constructeur neuchâ-telois Alpride s’occupe, lui, d’of-frir des airbags aux pratiquants de hors-piste.Le rôle de la Suisse devrait sortir renforcé de ces Mon-diaux, que les organisateurs ont préparés avec grand soin. Les 17 membres du comité d’organisa-tion de Skimo-Villars œuvrent bénévolement. Pour eux, c’est aussi l’occasion d’une dernière répétition avant les Jeux olym-piques de la jeunesse (JOJ) en 2020, où le ski-alpinisme sera la huitième discipline au pro-gramme. «Avec des Champion-nats suisses en 2017 et une Coupe du monde l’année dernière, les Championnats du monde sont une expérience de plus en vue des JOJ», estime l’organisatrice Marie Tâche. Dimanche, plus de 130 VIP et des membres du CIO viendront observer le sprint. Côté médias, Canal9 produira des images du sprint qui seront retransmises en direct sur Ski-mo-villars.ch et l’application RTS Sport.Armée de bénévolesL’entraîneur Pierre-Marie Taramarcaz faisait également partie du comité d’organisation des Mondiaux de Verbier. Il n’a pas remarqué de retombées financières directes, mais un engouement grandissant pour ce sport: «C’est avant tout un évé-nement fédérateur qui mobilise beaucoup de bénévoles et donne une belle vitrine pour le ski-al-pinisme suisse.» nEn Coupe du monde, trois nations se partagent les podiums de ski-alpinisme: l’Italie, la France et la Suisse, qui a des chances de médailles dans plusieurs disciplines. (GÉRARD BERTHOUD)«La notion d’équipe est très importante pour notre sport. C’est l’esprit de cordée et de montagne»ARNAUD GASSERAvec un budget de 450 000 fr. (contre plus de 1 million à Ver-bier), ces Championnats du monde seront à taille humaine et l’accent sera mis sur les courses et les athlètes: «Nous voulons pré-senter des compétitions à notre image, montagnarde», annonce fièrement Sergei Aschwanden, responsable de l’office du tou-risme de Villars. Les retombées d’une telle organisation sont difficilement mesurables. «Nous estimons un impact de 3000 nui-tées et la consommation dans les commerces de la station qui en découle.»Selon Sergei Aschwanden, la station de moyenne montagne est le lieu adapté à la pratique du ski-alpinisme: «Les condi-tions d’enneigement sont beau-coup moins exigeantes que pour d’autres sports d’hiver, une fine couche de 10 cm suf-fit amplement. De plus, toutes les compétitions partiront du sommet de la gare du train au col de Bretaye, qui se trouve à 1800 m.». n M. B.Une épreuve  à taille humaineAMBITION

La parité dans la gouvernance du sport: un défi de taille

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