Université de Lausanne, Faculté de biologie et médecine
Abstract
Contexte
Une importance croissante est accordée aux soins à domicile professionnels dans les politiques publiques dédiées aux personnes âgées. Dans ce contexte, l’étude des caractéristiques individuelles déterminant l’utilisation des services de soins à domicile revêt un intérêt particulier. L’objectif principal de cette recherche était de quantifier, sur une période de 6 ans, les trajectoires d’utilisation de soins à domicile suivies par les personnes âgées appartenant à une étude de cohorte. L’objectif secondaire était d’identifier les facteurs associés à l’utilisation des soins à domicile au moyen du Modèle comportemental d’utilisation des services de santé développé par Andersen.
Méthodologie
Ce travail repose sur l’analyse de données récoltées de manière prospective dans le cadre de l’étude de cohorte Lc65+, menée à Lausanne (Suisse). Le recours à des soins à domicile professionnels en 2012 et 2018 (information auto-rapportée) a permis de définir des trajectoires d’utilisation durant cet intervalle de temps (non-utilisation, utilisation nouvelle, utilisation interrompue et utilisation continue). Les nouveaux utilisateurs ont été comparés aux non-utilisateurs au moyen d’analyses bivariées incluant les trois dimensions du modèle d’Andersen (facteurs prédisposants, facteurs favorisants et facteurs liés au besoin, mesurés au début de l’intervalle étudié). Une approche multivariée (régression logistique binomiale) a ensuite été utilisée dans deux modèles successifs : un ajustement pour les facteurs liés au besoin a été effectué dans un premier temps, avant d’ajouter les facteurs prédisposants et favorisants dans un second modèle.
Résultats
Parmi les 2155 participants inclus dans cette analyse (âgés entre 69 et 78 ans en 2012), 82.8% sont restés non-utilisateurs durant l’intervalle 2012-2018, alors que 11.2% ont rapporté une utilisation nouvelle de soins à domicile professionnels. Quelque 3.3% des participants ont fait part d’une utilisation continue durant la période et 2.7% d’une utilisation interrompue. Les nouveaux utilisateurs rapportaient davantage de plaintes physiques et psychologiques au début de l’intervalle étudié, ainsi que de problèmes de santé chroniques et de limitations fonctionnelles. Après ajustement pour ces facteurs liés au besoin, seuls les participants se déclarant dans une situation financière difficile présentaient un odds de recours aux soins à domicile plus élevé (OR 1.65, IC 95% 1.12–2.45).
Conclusions
Dans le contexte d’une ville suisse, le recours des personnes âgées à des soins à domicile professionnels était essentiellement déterminé par les facteurs liés au besoin. Des facteurs modifiables tels que les croyances personnelles et les connaissances en rapport avec les services de soins à domicile ne jouaient pas un rôle significatif. Après ajustement pour les facteurs liés au besoin, l’odds de recours aux soins à domicile restait plus élevé parmi les participants se déclarant dans une situation financière difficile, laissant penser que cette vulnérabilité n’entrave pas l’accès aux soins à domicile professionnels dans ce contexte spécifique.
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Background: Given the increasing importance of formal home care services in policies dedicated to elder care, there is major interest in studying individuals’ characteristics determining their utilization. The main objective of this research was to quantify, during a 6-year timeframe, home care use trajectories followed by community-dwelling participants in a cohort study of older adults. The secondary objective was to identify factors associated with home care utilization using Andersen’s Behavioural Model of Health Services Use.
Methods: We proceeded to an analysis of data prospectively collected in the setting of the Lc65+ population- based study conducted in Lausanne (Switzerland). Self-reported utilization of professional home care in 2012 and 2018 was used to define trajectories during this timeframe (i.e. non-users, new users, former users and continuing users). Bivariable analyses were performed to compare new users to non-users regarding the three dimensions of Andersen’s model (predisposing, enabling and need factors) measured at baseline. Then, binomial logistic regression was used in a series of two hierarchical models to adjust for need factors first, before adding predisposing and enabling factors in a second model.
Results: of 2155 participants aged between 69 and 78 in 2012 82.8% remained non-users un 2018, whereas 11.2 % started to use professional home care.
Conclusions: In the setting of a Swiss city, incident utilization of formal home care by older adults appeared to be largely determined by need factors. Modifiable factors like personal beliefs and knowledge about home care services did not play a role. After adjusting for need, odds of becoming home care user remained higher in participants reporting a difficult financial situation, suggesting such vulnerability does not hamper access to professional home care in this specific context