L’apprentissage de l’écriture dans les écoles primaires soulève des inquiétudes fréquemment renouvelées tant dans la société francophone que dans la communauté éducative et dans les milieux de recherche. Aux questions que soulèvent la conceptualisation de la complexité de l’apprentissage de l’écriture littéraire et la conception d’activités didactico-pédagogiques concernant son enseignement dans les écoles primaires, s’ajoute celle de la relation qu’entretiennent chercheurs et enseignants à cet égard. Situant ma recherche dans le contexte d’un tournant actionnel et mobilisant principalement les cadres théoriques de l’interactionnisme symbolique et de la Théorie de l’action conjointe en didactique, je me suis intéressée aux interactions entre une enseignante et une chercheure à propos de l’enseignement de l’écriture littéraire à l’école primaire. J’ai envisagé l’écriture littéraire comme une activité complexe nécessitant, d’une part, que l’enfant mobilise un grand nombre de savoirs sur la langue et qu’il fasse preuve de créativité littéraire et, d’autre part, que l’enseignant lui apporte un soutien ajusté à ses besoins tout au long de la démarche d’écriture en adoptant à la fois le rôle de coauteur, de lecteur et de guide. Ma recherche doctorale s’est déroulée dans le contexte d’une étude longitudinale de type Recherche-Action-Formation et elle visait à comprendre comment les interactions entre enseignante et chercheure pouvaient, dans ce contexte de recherche, soutenir l’appropriation par une enseignante d’une approche didactico-pédagogique de l’enseignement de l’écriture littéraire. M’appuyant sur un paradigme constructiviste, j’ai fait le choix méthodologique d’une étude de cas. J’ai travaillé avec une enseignante durant une année scolaire, alternant les moments de coenseignement de l’écriture dans sa classe et les rencontres de travail permettant une réflexion commune concernant les interventions à déployer auprès de ses élèves. Les analyses que j’ai réalisées ont permis de comprendre, dans le cadre d’une collaboration enseignante-chercheure, la dynamique d’appropriation d’une approche didactico-pédagogique de l’enseignement de l’écriture littéraire. Le premier registre d’analyse m’a permis de documenter le déroulement des interactions enseignante-chercheure en situation de collaboration et les interventions de l’enseignante auprès des enfants lors d’activités d’écriture littéraire. Le second registre m’a quant à lui permis de documenter, au fil des interactions et de l’alternance des moments de formation et d’action, la transformation des regards portés par l’enseignante et la chercheure sur les objets de savoir placés au coeur de la relation didactique. Les résultats de ces analyses ont ainsi permis de comprendre que pour que les interactions enseignante-chercheure favorisent une négociation de l’approche didactico-pédagogique, il importait que les objets de savoirs placés au coeur des interactions répondent à un besoin de formation de l’enseignante. Comme chercheure, je pouvais toutefois contribuer à la construction de ce besoin en amenant l’enseignante à vivre des situations de déséquilibre ancrées dans ses expériences d’enseignement. Ma recherche a également conduit à dégager des niveaux de transaction enseignante-chercheure décrivant les significations graduellement négociées au fil des rencontres de travail ainsi que la dynamique des interactions ayant contribué à l’évolution des négociations de sens. Elle a ainsi montré qu’en ce qui concerne l’analyse des compétences des enfants, les significations ont pu être négociées dans le contexte d’ajustements mutuels. En ce qui concerne la négociation des pistes d’intervention auprès des enfants, l’analyse m’a permis de relever que les propositions didactico-pédagogiques avaient dû faire l’objet de débats d’expertes dans le cadre desquels enseignante et chercheure pouvaient croiser leurs points de vue et leurs expertises acquises dans leurs milieux respectifs. Enfin, ma recherche a contribué à comprendre que pour favoriser l’appropriation d’une approche didactico-pédagogique de l’écriture par une enseignante, il importait, d’une part, de construire une relation de confiance entre enseignante et chercheure et, d’autre part, d’offrir l’occasion d’alterner les moments de formation et d’action se déroulant dans la classe de l’enseignante