Bargach, T

Belmalih, M

Bennani, M

Elasri, F

Fiqhi, A

Messaoudi, R

Oubaaz, A

Reda, K

French

Revues Scientifiques Marocaines

FORMATION CONTINUE 75Journal de la Société Marocaine d’Ophtalmologie   -  n° 23- Janvier 2014Rétinopathie diabétique : quand opérer ?K Reda 1; M Belmalih1 ; T Bargach, A Fiqhi, R Messaoudi1 ; F Elasri1; A Oubaaz1; M Bennani21 Service d’ophtalmologie de l’hôpital militaire d’ophtalmologie,Rabat2 Clinique Rachidi, Casablanca La surveillance multidisciplinaire des patients diabétiques, et la connaissance des facteurs de risques d’aggravation de la rétinopathie diabétique ont connu de véritable progrès. Mais, Malgré ces avancées, on est toujours affronté, en tant qu’ophtalmologiste, à des patients ayant  des complications vi-tréo-rétiniennes avancées que seule une approche chirurgicale peut résoudre partiellement, voire intégralement.Les complications vitréo-rétiniennes,  qui se voient chez les patients diabétiques,  sont la conséquence des modifications qui se voient  dans le vitré. Le cortex vitréen constitue le sup-port  indispensable  au développement de la néovascularisa-tion rétinienne.En effet, le vitré du patient diabétique subit des modifications importantes secondaires à un taux élevé de glucose, ce qui ac-célère sa liquéfaction et conduit à son décollement postérieur précoce. Mais, l’envahissement de l’interface vitréo-rétinienne par un réseau néovasculaire ne permet qu’un décollement partiel du vitré, ce qui est à l’origine des complications trac-tionnelles de la rétinopathie diabétique, entrainant des saigne-ments des décollements de rétine et aggravant ainsi le stade de la rétinopathie diabétique.La Connaissance des indications chirurgicales devant une rétinopathie diabétique, par tout ophtalmologiste, permet de savoir quand exactement basculer du traitement médical  au traitement chirurgical au moment opportun pour faire profi-ter le patient de toutes les chances de récupération. Ce timing d’indication thérapeutique appropriée était le but recherché par l’étude DRVS qui a évalué le risque et les béné-fices de la vitréctomie précoce dans la prise en charge de la RDP avancée et à défini le rôle et le moment  approprié de la chirurgie rétino-vitrénne en comparant des yeux avec une RDP compliquée non traités, traités médicalement et traités chirurgicalement par vitréctomie.Les objectifs de la chirurgiePour bien peser une indication chirurgicale, il faut mettre en balance, d’une part les objectifs de la vitrectomie et de l ‘autre Les risques chirurgicaux.Les objectifs de la vitrectomie sont l’éclaircissement du vitré, la dissection de la composante fibro-vasculaire avec décolle-ment de la hyaloïde postérieure, la réapplication de la rétine en cas de décollement de rétine associé, la dissection d’une membrane prémaculaire en cas d’œdème maculaire traction-nel, et enfin la photocoagulation pan rétinienne(PPR) seule capable de désactiver le  processus néovasculaire.Ce qui est actuellement bien défini et qui n’est plus sujet à discussion, c’est le rôle bénéfique d’une photocoagulation panrétinienne au laser  aussi complète qu’elle soit. L’EDTRS a bien démontrée l’intérêt d’une PPR précoce pour un meilleur pronostic des RDP.Malheureusement, tous les patients ne sont pas vus à un stade précoce et souvent, surtout dans notre contexte avec des pa-tient mal- équilibrés  et mal suivis, on  est souvent  confronté à des RDP compliquéesLes indications chirurgicales devant une RDP compliquée :Les indications classiques de vitréctromie devant une RDP sont :•	Une	hémorragie	intravitréenne(HIV)•	Un	décollement	de	rétine	tractionnel(DRT)•	Un	décollement	de	rétine	mixte(DRM)•	Une	 hémorragie	 prémaculaire	 rétro	 hyaloïdienne	 cloi-sonnée•	Un	œdème	maculaire	tractionnel(OMT)•	 Aussi	 toute	 situation	 rendant	 impossible	 la	 réalisation	d’une PPR.Hémorragie Intra Vitréenne :Elle constitue de loin l’indication la plus fréquente de vitréc-tomie chez le diabétique, malgré que sa prévalence ait été ex-trêmement réduite par la réalisation de la  PPR. Elle est secon-daire aux tractions dues au DPV partiel sur les néovaisseaux. L’indication chirurgicale est posée devant :•	La	persistance	de	l’HIV,	malgré	un	délai	allant	de	6	se-maines à 3 mois. Une vitréctomie précoce est préconisée chez  les diabétiques type 1 à cause du potentiel agressif de la prolifération fibro-vasculaire.•	Une	PPR	non	réalisée	avant	la	survenue	de	l’HIV•	Le	caractère	bilatéral	de	l’HIV•	 La	 présence	 d’une	 rubéose	 irienne	 ou	 d’un	 glaucome	néovasculaire•	L’association	à	une	fibrose	importante•	Un	DR	associé.•	Enfin,	 il	 reste	 le	cas	particulier	et	 relativement	 rare	du	saignement récidivant chez un patient ayant déja bénéfi-cié d’une PPR correcte. En association à la vitréctomie, les antiVEGF trouvent leur vé-ritable intérêt dans les hémorragies intravitréennes associées à une rubéose irienne, un glaucome néovasculaire et dans la ré-tinopathie diabétique floride. L’efficacité des antiVEGF dans la rubéose irienne est connue. Il faut les répéter parallèlement à la PPR jusqu’à l’arrêt de l’activité néovasculaire. Dans la forme floride, leur association à la vitrectomie semble diminuer la fréquence de la prolifération fibrovasculaire antérieure éten-due post-opératoire.•Tableau 1 : facteurs modulant l’indication de vitrectomie chez le diabétiqueHémorragie intra-vitréenneUnilatérale Bilatérale RubéoseirienneAbsence de DR DR GlaucomenéovasculairePPR correcte PPR partielle ou absenteRD florideEn voie de résorptionAbsence de résorptionAbsence de Rubéose   Surveillance et PPR     Vitrectomie                (+/_ IVT)       AntiVEGF et vitrectomieen urgenceFORMATION CONTINUE 76 Journal de la Société Marocaine d’Ophtalmologie   -  n° 23- Janvier 2014DÉCOLLEMENT DE RÉTINE TRACTIONNEL :Seul un DRT décollant la macula constitue une indication chirurgicale ; et c’est au niveau de cette zone centrale  que s’exerce la plus forte traction lors du DPV. Ce qui explique la fréquence des DRT maculaires. Quand le décollement dépasse 6 mois, les chances de récupération visuelles sont faibles, à condition d’éliminer formellement un rétinoschisis maculaire (Figure 1). Ce dernier est une entité fréquente et méconnue au cours de la rétinopathie diabétique proliférante. Le diagnostic différentiel est fait facilement à l’OCT, si le vitré le permet en montrant dans le rétinoschisis une cavité hyporéflective, tra-versée par des ponts et des résidus à la surface de l’épithélium pigmentaire correspondant à la couche des photorécepteurs. A l’inverse, la cavité du décollement tractionnel (Figure 2) est optiquement vide, sans colonnes ni résidus à la surface de l’épithélium pigmentaire.Figure 1Figure 3 & 4Figure 2Les rétinoschisis maculaires présentent un bon pronostic fonctionnel même quand leur ancienneté dépasse 6 mois, d’où l’intérêt de rechercher un rétinoschisis devant tout soulève-ment maculaire chez le diabétique.La menace de décollement de rétine tractionnel maculaire constitue également une indication à la vitrectomie. Les pho-tographies du fond d’œil et surtout l’OCT sont d’un grand apport dans la surveillance des décollements tractionnels ex-tra-maculaires qui dépassent l’arcade temporale et qui pro-gresse lentement vers la macula.Décollement de rétine mixteEntité plus rare que le DRT. La déchirure est le plus souvent de siège postérieur, au pied d’une traction fibro-vasculaire. Il s’agit donc d’un DRT compliqué d’un DR rhégmatogéne. Le DR mixte, à la différence du DRT, se manifeste par une baisse d’acuité visuelle d’installation brutale due au décollement ma-culaire. Et à l’examen du fond de  l’œil, le décollement est le plus souvent mobile et étendu, pouvant aller jusqu’à l’ora se-ratta,  avec visualisation de la déchirure rétinienne.La vitréctomie, devant  un DRM est impérative et urgente, malgré que le pronostic reste beaucoup plus réservé que dans les DRT.Hémorragie prémaculaire rétro-hyalloidienne cloisonnée :Elle caractérisée par l’accumulation de sang entre la rétine et la hyaloïde partiellement décollée. La hyaloïde reste attacher à la rétine entourant ainsi l’hémorragie (Figure 3 et 4).On distingue 2 formes d’hémorragies rétro-hyaloidiennes  :L’hémorragie en nid de pigeon : avec un niveau horizontal et une poche inférieure arciforme. Elle s’associe rarement à une fibrose vasculaire.Et l’hémorragie cloisonnée en caillots : à limites irrégulières. Dans cette forme la participation fibreuse est toujours très im-portante et rapidement évolutive.Le moment opportun d’une vitréctomie reste mal défini, vu la possible disparition de ces hémorragies, mais une vitrecto-mie précoce facilite la séparation du vitré attaché à la rétine et évite le développement de la fibrose. Par contre, une PPR complète est toujours réalisée en première intention.FORMATION CONTINUE 77Journal de la Société Marocaine d’Ophtalmologie   -  n° 23- Janvier 2014Devant l’impossibilité de réaliser une PPR :Cette situation peut se voir dans deux cas de figures, devant une cataracte : si la cataracte est obturente, il est impératif d’opérer la cataracte et de démarrer la PPR dans la semaine qui suit la phacoémulsification. Certains auteurs préconisent une injection intravitréenne d’anti-VEGF en fin d’interven-tion, à condition d’être assuré de l’absence de prolifération rétino-vitréenne. Une vitrectomie avec endolaser peut être as-sociée à la chirurgie de la cataracte dans le cas d’une néovas-cularisation  du segment  antérieur.Et aussi devant une dilatation pupillaire médiocre  qui rend impossible la réalisation du laser transpupillaire en périphé-rie rétinienne. Cette situation peut être facilement contour-née grâce à l’utilisation en peropératoire des systèmes grand-champ pour la réalisation d’une vitrectomie et d’un endolaser. Dans les cas extrèmes de mauvaise dilatation pupillaire, on peut s’aider  de rétracteurs à iris.Cas de Prolifération Fibro-Vasculaire :La PFV peut constituée à elle seule, une indication de vitréc-tomie, c’est le cas d’une PFV rapidement évolutive et étendue, masquant  le pôle postérieur (Figure 5). Mais, le plus souvent, la véritable indication chirurgicale devant une PFV reste la PFV compliquée, notamment d’un DMT, un DRM ou d’une HIV.Il nous parait important aussi de rappeler que la PFV même étendue ne constitue pas de contre indication à une PPR, mais tout en expliquant au patient la possibilité de recours à la chirurgie dans un deuxième temps ; sachant que les résultats de la vitrectomie des PFV après PPR a un meilleur pronostic.Œdème maculaire :Il constitue la principale cause de baisse d’acuité visuelle chez le diabétique. Mais, pas tout œdème maculaire doit être opéré. L’indication de vitrectomie est indiscutable devant une vraie trac-tion maculaire, due à une hyaloïde épaissie et tendue (figure7).Figure 6 :  Fibrose sur les arcades: absence d’indication chirurgicaleFigure 5 :  L’OMT constitue une entité clinique rare, moins de 1% des œdèmes maculaires du diabétique. L’avènement de l’OCT en spectral domain a permis de mieux comprendre et de visuali-ser cette hyaloïde tendue et épaissie, adhérente au sommet de la macula et sur laquelle elle exerce une traction, matérialisée par l’aspect raide quelle procure aux bords de la macula.En l’absence de vraie traction maculaire, c’est le cas d’un œdème diffus avec ou sans la présence d’une membrane épi-maculaire, l’indication de vitréctomie reste très discuter.Devant certaines situations difficiles :Certaines situations compliquées peuvent contre indiquées une prise en charge chirurgicale, notamment devant une ré-tine ischémique laissant voir des vaisseaux déshabités, une fibrose étendue couvrant tout le pôle postérieur (figure 8). et un DRT associé ; mais malgré un pronostic très réservé de ces situations, on peut toujours proposer cette vitrectomie  dif-ficile et non sans risque à un patient monophtalme, car on peut transformer une situation évolutive et instable, en une situation stable.Figure 7 :  Figure 8 :  FORMATION CONTINUE 78 Journal de la Société Marocaine d’Ophtalmologie   -  n° 23- Janvier 2014Les complications de la chirurgie :Les complications de la vitrectomie chez le diabétique ne sont pas négligeables. La récidive hémorragique est très fréquente mais le plus souvent spontanément réversible. Le risque de déchirure rétinienne n’est pas nul surtout dans les dissections difficiles, mais le plus important est de les voir pendant la chirurgie pour les traiter. La cataracte est quasi constante après vitrectomie mais on peut la considérer actuellement comme un incident mineur grâce aux progrès de la chirurgie. L’endophtalmie reste une complication exceptionnelle. Enfin, la complication la plus redoutable et redoutée par les chirur-giens est la prolifération fibrovasculaire antérieure étendue qui est l’apanage des formes graves, du sujet jeune et de la rétinopathie diabétique floride.Il est également nécessaire de bien évaluer le pronostic vi-suel du patient avant de décider de l’indication chirurgicale. La perception lumineuse, l’ancienneté d’un éventuel décolle-ment tractionnel maculaire, l’état vasculaire et l’état de la paille doivent être bien étudiés pour ne pas faire prendre un risque inutile au patient. Il faut savoir se contenter de la précieuse perception lumineuse du patient quand le pronostic chirur-gical est sombre.ConclusionLe diabète est l’une des principales causes de cécité dans le monde. Le mauvais équilibre glycémique et une surveillance aléatoire conduisent inévitablement vers l’apparition de com-plications. L’avènement des nouvelles machines  et d’une nouvelle instrumentation a amélioré encore plus la prise en charge de ces patientsReste à bien connaitre les indications thérapeutiques médi-cales et le moment opportun de passer au traitement chirur-gical par tout ophtalmologiste amener à suivre un patient diabétique.Les indications absolues de vitréctomie chez le diabétique restent le décollement maculaire tractionnel, le décollement de rétine mixte et l’hémorragie rétrohyaloïdienne cloisonnée. Il est important de reconnaître les cas de rétinopathies diabé-tiques relevant d’un traitement chirurgical urgent, car le pro-nostic dépend de la précocité du geste.BIBLIOGRAPHIE :1) Ahmadieh H, et al. Intravitreal bevacizumab for prevention of ear-lypostvitrectomyhemorrhage in diabetic patients: a randomized cli-nical trial.Ophthalmology 20092) ArevaloJF, et al  Tractional retinal detachment following intravitreal bevacizumab (Avastin) in patients with severeproliferative diabetic retinopathy .Br J Ophthalmol. 2008 3) Douat J, Pagot-Mathis V, Mathis A.[Intra vitreal bevacizumab for treatment of neo vascular glaucoma. Report of 20 cases]J Fr Ophtalmol. 20094)Lincoff H, Sebag Y, Chang S, Silverman R, Tractional elevations of the retinain patients with diabetes. Am J Ophthalmol 1992, 113 : 235-2425) Massin P, Haouchine B, Gaudric A, Macular traction detachment and diabetice dema associated with posteriorhyaloid traction Am J ophthalmol 2001, 132 : 599-600Dr Karim REDAProfesseur agrégé en OphtalmologieSpécialiste du Val-De-Grace

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