Les quantités importantes d’aliments consommés et la proportion élevée de concentrés devant être incorporée aux rations pour soutenir les besoins des vaches hautes-productrices induisent bien souvent des perturbations de l’équilibre ruminal. Ces changements se répercutent sur la biohydrogénation ruminale des acides gras insaturés de la ration, qui entraînent à leur tour une inhibition de la synthèse des matières grasses par le tissu mammaire. Plusieurs stratégies nutritionnelles ont été mises de l’avant pour mieux tirer profit des rations riches en concentrés. Récemment, des études ont montré la capacité du carbonate de potassium (K2CO3) à prévenir la chute de matière grasse associée à des régimes à forte teneur en concentrés. Toutefois, on comprend encore mal l’origine de ces effets. Les travaux de cette thèse visaient donc, dans un premier temps, à départager si les effets observés en ajoutant du K2CO3 aux rations des vaches laitières étaient dus à une augmentation de la différence alimentaire cation anion (DACA), de la teneur en ions K+ ou encore du pouvoir tampon de la ration. Un autre objectif de cette thèse était de déterminer les effets d’un ajout de K2CO3 sur la synthèse de matières grasses du lait lorsque des sources d’acides gras polyinsaturés (AGPI) sont introduites dans l’alimentation de la vache laitière. Enfin, les travaux cherchaient à déterminer l’effet d’un ajout de K2CO3 à la ration sur les populations microbiennes du rumen, particulièrement celles reconnues pour être impliquées dans le métabolisme lipidique. Pour répondre à ces questions, une première expérience a été mise en place, où 35 vaches Holstein en début de lactation ont été distribuées selon un plan en blocs complets aléatoires. La période expérimentale était de 28 jours et précédée d’une collecte de 5 jours (covariable). Les cinq rations expérimentales étaient constituées en vue de départager les effets du K2CO3 (témoin vs K2CO3), de la capacité tampon (K2CO3 vs KHCO3), de la DACA (K2CO3 vs KCl) et du type de cations (K2CO3 vs Na2CO3). Dans cette expérience, et contrairement aux études antérieures, l’ajout de K2CO3 aux rations riches en concentrés n’a pas permis d’augmenter la production de lait ou la matière grasse des vaches en début de lactation. De plus, les résultats suggèrent qu’une augmentation du K alimentaire via l’ajout de K2CO3 pourrait induire un déséquilibre ionique cellulaire qui pourrait affecter le transport des nutriments dans les cellules épithéliales mammaires et ainsi affecter la synthèse du lait. Une seconde expérience a ensuite été menée, où 28 vaches Holstein en début de lactation ont été distribuées selon un plan en blocs complets aléatoires. La période expérimentale était également de 28 jours et précédée d’une collecte de 5 jours (covariable). Les quatre rations expérimentales étaient offertes selon un arrangement factoriel 2 × 2, soit 0 ou 1,5 % K2CO3 et 0 ou 2 % d’huile de soya, comme source d’acides gras polyinsaturés. Les résultats ont montré que l’ajout de K2CO3 peut entraîner une augmentation de la sécrétion des matières grasses laitières chez des animaux recevant de grandes quantités de concentrés. Cette augmentation dépend toutefois de la teneur en lipides de la ration. Cette étude a également permis de mettre en lumière une relation positive entre la production laitière et la teneur en chlore du lait. Lors de cette seconde expérience, des échantillons de contenu ruminal ont également été prélevés chez 24 vaches (n = 6) afin d’étudier l’impact d’un supplément de K2CO3 sur l’environnement et les populations microbiennes du rumen des vaches en début de lactation recevant des rations riches en concentrés avec ou sans huile de soya. Ces travaux ont permis de comprendre que le K2CO3 et l’huile de soya ont des effets distincts sur les populations microbiennes. L’ajout de K2CO3 a stimulé la croissance de Butyrivibrio hungatei, bactérie productrice de 18:1 trans-11. L’ajout d’huile de soya a, quant à elle, réduit la présence de Butyrivibrio/Pseudobutyrivibrio, un groupe de bactéries productrices de 18:1 trans-11, de Fibrobacter succinogenes, une bactérie fibrolytique, de Butyrivibrio proteoclasticus, une bactérie productrice de 18:0, et de Streptococcus bovis, une bactérie amylolytique Les travaux regroupés dans cette thèse apportent un éclairage nouveau sur le rôle de la supplémentation minérale sur les performances de production des vaches laitièresNegative energy balance typically appears in early-lactation dairy cows as a consequence of a reduction of dry matter intake, as well as of an increase in energy demand for milk production. To compensate this energy deficit, cows are fed with high-concentrate diets. However, highly fermentable carbohydrates introduced in diets can result in a decreased milk fat synthesis. Previous studies reported that addition of potassium carbonate (K2CO3) to high-concentrate diets helps to maintain milk fat, although the mechanism is yet to be established. Consequently, the objective of the current thesis was, firstly, to investigate the effects of dietary cation-anion difference (DCAD), cation source, and buffering ability of the mineral supplement on rumen biohydrogenation of fatty acids (FA) and production performance of dairy cows fed a high-concentrate diet. Secondly, this thesis aimed at evaluating the effect of K2CO3 on production performance, biohydrogenation of fatty acids, and mineral composition of milk in early-lactation dairy cows fed a high-concentrate diet with or without soybean oil (SBO), as a source of polyunsaturated fatty acid. A third objective of this thesis was to evaluate the effect of K2CO3 supplementation, in diets containing soybean oil (SBO) on rumen microbial population associated with lipid metabolism. Consequently, a first experiment was set up, where 35 early-lactation Holstein cows were used in a randomized complete block design with 33-d periods, including a 5-d pretreatment collection period used as a covariate. Five different dietary treatments were used to assess the effects of K2CO3 (control vs. K2CO3), buffering ability (K2CO3 vs. KHCO3), DCAD (K2CO3 vs. KCl), and cation type (K2CO3 vs. Na2CO3). In this experiment, and as opposed to previous studies, supplementing high-concentrate diets with K2CO3 did not increase milk or milk fat yield in early-lactation cows. Also, results suggested that increasing dietary K through the addition of K2CO3 could lead to a disequilibrium in cellular ion composition that can impair nutrient transport into and out of the mammary epithelial cells, and consequently affect milk synthesis. A second experiment was conducted where 28 ruminally fistulated Holstein cows were used in a randomized complete block design. The experiment lasted 33 d, including a 5-d pre-treatment collection period used as a covariate. Experimental treatments were arranged as a 2 × 2 factorial with 0 or 1.5% K2CO3 and with 0 or 2% SBO. Results of this experiment revealed that potential effect of K2CO3 on milk fat synthesis is dependent on the levels of dietary polyunsaturated FA. Moreover, a positive relation was established between milk Cl concentration and milk yield, suggesting that the equilibrium of this ion is linked to the efficiency of lactogenesis Finally, rumen samples were collected from the rumen of 24 cows enrolled in the second experiment (n = 6) to assess treatment effects on rumen microbial population associated with lipid metabolism. Feeding K2CO3 and SBO had distinct effects on rumen bacteria. Dietary K2CO3 stimulated the growth of Butyrivibrio hungatei, a bacterium recognized to produce trans-11-18:1 during biohydrogenation. Conversely, feeding SBO reduced the growth of Butyrivibrio/Pseudobutyrivibrio bacterium group, known to produce trans-11-18:1, of Fibrobacter succinogenes, a fibrolytic bacterium, of Butyrivibrio proteoclasticus, a bacterium involved in 18:0 production, and of Streptococcus bovis, an amylolytic bacterium. Overall, the experiments conducted and reported in this thesis provide new insights on the impact of mineral supplementation on milk performance in dairy cows