4 research outputs found

    Cinéma et lien : une enquête intime auprès d'une famille italienne en Lorraine

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    Au cours de ces dix dernières années, deux chercheurs français – Fabrice Montebello et Jean-Marc Leveratto – se sont intéressés aux rapports qu'entretiennent les ouvriers lorrains d'origine italienne avec le cinéma et aux pratiques sociales qui en découlent. Nous nous proposons de poursuivre ce travail d’enquête. En procédant à des entretiens approfondis avec les membres d’une même famille à la culture essentiellement audiovisuelle, nous retracerons leur mémoire de spectateurs issus des communautés immigrées italiennes dans les années 1970 et 1980 en nous fondant sur l’hypothèse que cette expérience est en lien avec leur histoire migratoire héritée ou directement vécue. Les recherches sur les diasporas mettent en effet en valeur le lien entre cette expérience migratoire (de la perte, de la désorientation, de l’aller-retour) et l’intensité affective et émotive avec laquelle les personnes vivent leur contact avec la société d’accueil. Le cinéma, de ce point de vue, joue un rôle évident de médiation imaginaire qui permet de vivre sur le mode du plaisir ce qui, dans l’expérience réelle, est souvent vécu sur le mode du malaise. À travers ses comédies (dramatiques, sociales), il est, de plus, une source non négligeable d’informations importantes au sujet des civilités dont il faut maîtriser le langage pour vivre dans la discontinuité du tissu social imposée par l’immigration.  Enfin, le cinéma fournit l’occasion de renouer avec des problèmes aux résonances universelles qui relancent et motivent à nouveau la conscience morale dans sa recherche du « juste », dans une situation de rupture où les repères éthiques sont ébranlés par la rencontre des cultures. Les interviews ont été réalisées par un membre de cette famille, née en France, mais émigrante au Canada, avec laquelle il était aussi important, pour sa famille, de maintenir un lien en répondant à l’enquête et de transmettre et communiquer l’expérience originelle. Cette remarque nous permet d’introduire l’élément de nouveauté apportée par notre étude : le cinéma est une expérience de sociabilité imaginaire, ce qui signifie à la fois qu’il permet de (re)vivre les émotions et les affects liés à une expérience vécue, mais aussi de vérifier, dans le partage émotionnel avec autrui – et plus particulièrement avec celle ou celui qu’on aime – une connivence dont la parole ne permet pas toujours de s’assurer, et les circonstances de la vie, d’éprouver.For the past ten years, two French researchers – Fabrice Montebello et Jean-Marc Leveratto - have been taking an interest in the relations between workers of Italian origins living in Lorraine and cinema, as well as the social practices which derive from them. Our article will consist of continuing their research by interviewing members of the same family whose culture is essentially audiovisual in order to re-create their memory as spectators and as members of the Italian community from the 70's to the present. Research on the diasporas underlines the strong connection existing between the experience of migration and how migrants emotionally respond to their host country. Our hypothesis would thus be that the family's cinematographic experience is closely related to their migrants' history – be it directly or indirectly lived. Hence, cinema appears to be an imaginary space of mediation where migrants can experience in a less painful way the social inadequency they can feel in real life. Moreover, cinema can be seen as an ideal and useful source of information for migrants since it often portrays the new manners and social habits of the host country. But it can also give migrants the opportunity to ponder on moral issues of a universal kind. Cross-cultural experiences often shake the foundation of the migrants' values, yet cinema makes it possible to overcome this state of alienation since every film stimulates ethical reflection – and thus the search for justice – by creating a sense of universal solidarity. The interviews have been done by a member of the family while she was studying in Canada. By accepting to participate in the project, the family proved how important it was for them to pass on their personal and authentic experience. This last remark leads us to our final point: cinema could also be considered as an experience of imaginary sociability – which is closely linked to the experience of social disruption. Moreover, it can make one relive emotions one may have once felt in the past or still feels, and makes it possible to share them with others – especially with the ones we cherish – and experience a kind of mute understanding while watching a movie with them

    Cinéma et lien : une enquête intime auprès d'une famille italienne en Lorraine

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    For the past ten years, two French researchers – Fabrice Montebello et Jean-Marc Leveratto - have been taking an interest in the relations between workers of Italian origins living in Lorraine and cinema, as well as the social practices which derive from them. Our article will consist of continuing their research by interviewing members of the same family whose culture is essentially audiovisual in order to re-create their memory as spectators and as members of the Italian community from the 70's to the present. Research on the diasporas underlines the strong connection existing between the experience of migration and how migrants emotionally respond to their host country. Our hypothesis would thus be that the family's cinematographic experience is closely related to their migrants' history – be it directly or indirectly lived. Hence, cinema appears to be an imaginary space of mediation where migrants can experience in a less painful way the social inadequency they can feel in real life. Moreover, cinema can be seen as an ideal and useful source of information for migrants since it often portrays the new manners and social habits of the host country. But it can also give migrants the opportunity to ponder on moral issues of a universal kind. Cross-cultural experiences often shake the foundation of the migrants' values, yet cinema makes it possible to overcome this state of alienation since every film stimulates ethical reflection – and thus the search for justice – by creating a sense of universal solidarity. The interviews have been done by a member of the family while she was studying in Canada. By accepting to participate in the project, the family proved how important it was for them to pass on their personal and authentic experience. This last remark leads us to our final point: cinema could also be considered as an experience of imaginary sociability – which is closely linked to the experience of social disruption. Moreover, it can make one relive emotions one may have once felt in the past or still feels, and makes it possible to share them with others – especially with the ones we cherish – and experience a kind of mute understanding while watching a movie with them

    Publics de cinéma. Pour une histoire des pratiques sociales

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    Longtemps considéré comme le continent oublié – sinon perdu – de l’histoire du cinéma, le public retient désormais l’attention des chercheurs, comme en témoignent les études parues depuis une dizaine d’années sur la cinéphilie « savante » et, plus récemment, sur la cinéphilie « populaire ». L’attention s’est jusqu’à présent portée, de façon privilégiée, sur le phénomène de la réception, à travers l’analyse des jugements des spectateurs, de la manière dont ils se forment et de celle dont ils sont partagés. De nombreuses recherches restent à mener en ce domaine. L’ambition de ce numéro est cependant de déplacer la réflexion en interrogeant très concrètement les pratiques liées au cinéma, saisies dans un contexte social et culturel large, incluant la question de la réception et de la sociabilité cinéphile sans pour autant s’y limiter. Un texte introductif revient d’abord sur la définition de ce champ de recherche, ses enjeux et sa délimitation. Un premier ensemble d’articles est ensuite consacré aux pratiques liées à la salle de cinéma, lieu privilégié du spectacle cinématographique, de plus en plus concurrencé, depuis la seconde moitié du xxe siècle, par d’autres formes de diffusion. À partir d’une enquête menée sur le terrain, Claude Forest interroge les stratégies d’occupation des sièges dans les salles de cinéma. Jean-Baptiste Massuet s’intéresse pour sa part à un public précis, celui d’un film en 3D relief interprété par une star récemment disparue et projeté dans une salle située au cœur d’un parc d’attraction. À travers l’étude d’un lieu particulier également, Anne Kerlan met en lumière le lien entre l’adoption par les spectateurs de nouvelles pratiques et l’expérience de la modernité occidentale dans une salle de cinéma pékinoise, entre la fin des années 1910 et le début des années 1920. Enfin, Wendy Cutler analyse le rôle des spectateurs – ou « spectacteurs » – indiens et la manière dont ceux-ci peuvent interagir avec le film projeté à l’écran. Un second ensemble réunit des contributions qui ont pour cadre des moments où le spectacle cinématographique a été affecté par des changements – ou une volonté de changement – majeurs. Deux articles reviennent sur la transition du muet au parlant. Valentin Stimpfl analyse la programmation de cinq salles parisiennes lors de la saison 1929-1930, mettant au jour des différences qui suggèrent des pratiques elles-mêmes très diversifiées. Marylin Marignan montre qu’en dépit de l’attrait considérable exercé par le parlant, les pratiques spectatorielles des deux théâtres municipaux et des établissements cinématographiques de la ville de Lyon sont restées assez stables et, dans une certaine mesure, analogues. Changeant d’époque et d’ère culturelle, Irina Tcherneva étudie comment, au début des années 1950, la figure du spectateur a irrigué les réformes du gouvernement khrouchtchévien dans le secteur cinématographique, révélant une méconnaissance des réalités sur le terrain, mais aussi la persistance de l’idée selon laquelle le cinéma a un rôle social. Les textes suivants permettent de mieux cerner de quelles manières et à quelles échelles le cinéma peut être pensé comme un fait social. Emmanuel Plasseraud montre comment la notion de foule a pu empêcher théoriciens et cinéastes de penser la diversité du public en France à l’époque muette. Christophe Trebuil analyse la façon dont le cinéma imprègne les lieux, les communautés et les individus dans les romans d’Emmanuel Bove. Au moyen d’une enquête auprès d’amateurs de comédie musicale hollywoodienne, Fanny Beuré observe l’émergence, par le biais d’Internet, de pratiques cinéphiles nouvelles mais aussi diversifiées. Émilie Tullio et Marion Froger proposent pour leur part une étude du cinéma comme « expérience de sociabilité imaginaire » au sein d’un cercle plus restreint, celui de la famille, à partir d’entretiens menés avec des personnes apparentées issues de la communauté immigrée italienne en Lorraine. Deux contributions s’interrogent ensuite sur la formation des publics et l’encadrement de leurs pratiques. Mélisande Leventopoulos étudie l’émergence d’un public catholique missionnaire dans le diocèse de Paris entre 1927 et 1939. Puis Pascal Laborderie tente d’évaluer l’efficacité des dispositifs mis en œuvre par les Offices du cinéma scolaire et éducateur dans la France de l’entre-deux-guerres. Des extraits de mémoires de spectateurs évoquant le cinéma en France à la même période concluent enfin ce numéro qui entend rappeler – s’il en était besoin – que le cinéma est non seulement un art et une industrie, mais également, selon l’expression de Marcel Mauss, un fait social total. Les coordinateurs du numéro tiennent à remercier chaleureusement tous ceux qui ont permis à ce dernier d'aboutir et – ils l'espèrent – d'être une réussite : les auteurs bien sûr ; les évaluateurs, dont le rôle est essentiel ; l'équipe de Conserveries mémorielles et en premier lieu son rédacteur en chef, Vincent Auzas, qui nous a accompagnés tout au long de ce projet ; tous ceux enfin, nombreux, qui nous ont encouragés et manifesté leur intérêt, parmi lesquels Stéphanie Louis, dont le·a « spectateur·rice anachronique » fut à l'origine du numéro dont il·elle demeure en quelque sorte l'homme·la femme invisible

    Publics de cinéma. Pour une histoire des pratiques sociales

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    Longtemps considéré comme le continent oublié – sinon perdu – de l’histoire du cinéma, le public retient désormais l’attention des chercheurs, comme en témoignent les études parues depuis une dizaine d’années sur la cinéphilie « savante » et, plus récemment, sur la cinéphilie « populaire ». L’attention s’est jusqu’à présent portée, de façon privilégiée, sur le phénomène de la réception, à travers l’analyse des jugements des spectateurs, de la manière dont ils se forment et de celle dont ils sont partagés. De nombreuses recherches restent à mener en ce domaine. L’ambition de ce numéro est cependant de déplacer la réflexion en interrogeant très concrètement les pratiques liées au cinéma, saisies dans un contexte social et culturel large, incluant la question de la réception et de la sociabilité cinéphile sans pour autant s’y limiter. Un texte introductif revient d’abord sur la définition de ce champ de recherche, ses enjeux et sa délimitation. Un premier ensemble d’articles est ensuite consacré aux pratiques liées à la salle de cinéma, lieu privilégié du spectacle cinématographique, de plus en plus concurrencé, depuis la seconde moitié du xxe siècle, par d’autres formes de diffusion. À partir d’une enquête menée sur le terrain, Claude Forest interroge les stratégies d’occupation des sièges dans les salles de cinéma. Jean-Baptiste Massuet s’intéresse pour sa part à un public précis, celui d’un film en 3D relief interprété par une star récemment disparue et projeté dans une salle située au cœur d’un parc d’attraction. À travers l’étude d’un lieu particulier également, Anne Kerlan met en lumière le lien entre l’adoption par les spectateurs de nouvelles pratiques et l’expérience de la modernité occidentale dans une salle de cinéma pékinoise, entre la fin des années 1910 et le début des années 1920. Enfin, Wendy Cutler analyse le rôle des spectateurs – ou « spectacteurs » – indiens et la manière dont ceux-ci peuvent interagir avec le film projeté à l’écran. Un second ensemble réunit des contributions qui ont pour cadre des moments où le spectacle cinématographique a été affecté par des changements – ou une volonté de changement – majeurs. Deux articles reviennent sur la transition du muet au parlant. Valentin Stimpfl analyse la programmation de cinq salles parisiennes lors de la saison 1929-1930, mettant au jour des différences qui suggèrent des pratiques elles-mêmes très diversifiées. Marylin Marignan montre qu’en dépit de l’attrait considérable exercé par le parlant, les pratiques spectatorielles des deux théâtres municipaux et des établissements cinématographiques de la ville de Lyon sont restées assez stables et, dans une certaine mesure, analogues. Changeant d’époque et d’ère culturelle, Irina Tcherneva étudie comment, au début des années 1950, la figure du spectateur a irrigué les réformes du gouvernement khrouchtchévien dans le secteur cinématographique, révélant une méconnaissance des réalités sur le terrain, mais aussi la persistance de l’idée selon laquelle le cinéma a un rôle social. Les textes suivants permettent de mieux cerner de quelles manières et à quelles échelles le cinéma peut être pensé comme un fait social. Emmanuel Plasseraud montre comment la notion de foule a pu empêcher théoriciens et cinéastes de penser la diversité du public en France à l’époque muette. Christophe Trebuil analyse la façon dont le cinéma imprègne les lieux, les communautés et les individus dans les romans d’Emmanuel Bove. Au moyen d’une enquête auprès d’amateurs de comédie musicale hollywoodienne, Fanny Beuré observe l’émergence, par le biais d’Internet, de pratiques cinéphiles nouvelles mais aussi diversifiées. Émilie Tullio et Marion Froger proposent pour leur part une étude du cinéma comme « expérience de sociabilité imaginaire » au sein d’un cercle plus restreint, celui de la famille, à partir d’entretiens menés avec des personnes apparentées issues de la communauté immigrée italienne en Lorraine. Deux contributions s’interrogent ensuite sur la formation des publics et l’encadrement de leurs pratiques. Mélisande Leventopoulos étudie l’émergence d’un public catholique missionnaire dans le diocèse de Paris entre 1927 et 1939. Puis Pascal Laborderie tente d’évaluer l’efficacité des dispositifs mis en œuvre par les Offices du cinéma scolaire et éducateur dans la France de l’entre-deux-guerres. Des extraits de mémoires de spectateurs évoquant le cinéma en France à la même période concluent enfin ce numéro qui entend rappeler – s’il en était besoin – que le cinéma est non seulement un art et une industrie, mais également, selon l’expression de Marcel Mauss, un fait social total. Les coordinateurs du numéro tiennent à remercier chaleureusement tous ceux qui ont permis à ce dernier d'aboutir et – ils l'espèrent – d'être une réussite : les auteurs bien sûr ; les évaluateurs, dont le rôle est essentiel ; l'équipe de Conserveries mémorielles et en premier lieu son rédacteur en chef, Vincent Auzas, qui nous a accompagnés tout au long de ce projet ; tous ceux enfin, nombreux, qui nous ont encouragés et manifesté leur intérêt, parmi lesquels Stéphanie Louis, dont le·a « spectateur·rice anachronique » fut à l'origine du numéro dont il·elle demeure en quelque sorte l'homme·la femme invisible
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