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«La relation de limitation et d’exception dans le français d’aujourd’hui : excepté, sauf et hormis comme pivots d’une relation algébrique »
L’analyse des emplois prépositionnels et des emplois conjonctifs d’ “excepté”, de “sauf” et d’ “hormis” permet d’envisager les trois prépositions/conjonctions comme le pivot d’un binôme, comme la plaque tournante d’une structure bipolaire. Placées au milieu du binôme, ces prépositions sont forcées par leur sémantisme originaire dûment métaphorisé de jouer le rôle de marqueurs d’inconséquence systématique entre l’élément se trouvant à leur gauche et celui qui se trouve à leur droite. L’opposition qui surgit entre les deux éléments n’est donc pas une incompatibilité naturelle, intrinsèque, mais extrinsèque, induite. Dans la plupart des cas (emplois limitatifs), cette opposition prend la forme d’un rapport entre une « classe » et le « membre (soustrait) de la classe », ou bien entre un « tout » et une « partie » ; dans d’autres (emplois exceptifs), cette opposition se manifeste au contraire comme une attaque de front portée par un « tout » à un autre « tout ». De plus, l’inconséquence induite mise en place par la préposition/conjonction paraît, en principe, tout à fait insurmontable. Dans l’assertion « les écureuils vivent partout, sauf en Australie » (que l’on peut expliciter par « Les écureuils vivent partout, sauf [qu’ils ne vivent pas] en Australie »), la préposition semble en effet capable d’impliquer le prédicat principal avec signe inverti, et de bâtir sur une telle implication une sorte de sous énoncé qui, à la rigueur, est totalement inconséquent avec celui qui le précède (si « les écureuils ne vivent pas en Australie », le fait qu’ils « vivent partout » est faux). Néanmoins, l’analyse montre qu’alors que certaines de ces oppositions peuvent enfin être dépassées, d’autres ne le peuvent pas. C’est, respectivement, le cas des relations limitatives et des relations exceptives. La relation limitative, impliquant le rapport « tout » - « partie », permet de résoudre le conflit dans les termes d’une somme algébrique entre deux sous énoncés pourvus de différent poids informatif et de signe contraire. Les valeurs numériques des termes de la somme étant déséquilibrées, le résultat est toujours autre que zéro. La relation exceptive, au contraire, qui n’implique pas le rapport « tout » - « partie », n’est pas capable de résoudre le conflit entre deux sous énoncés pourvus du même poids informatif et en même temps de signe contraire : les valeurs numériques des termes de la somme étant symétriques et égales, le résultat sera toujours équivalent à zéro
Vers une écriture rhizomatique : style et syntaxe dans La Bataille de Pharsale de Claude Simon
Dans notre exposé, qui constitue le prolongement direct dune série de travaux plus ou moins récents sur Claude Simon, nous nous fixons trois objectifs :
(a) Proposer une description synthétique et raisonnée des transgressions syntaxiques qui se font jour dans La Bataille de Pharsale, et qui constituent autant de phénomènes de « variation » par rapport à une norme qui sert de repoussoir aux Nouveaux Romanciers (les canons scripturaux du roman « réaliste »).
(b) Montrer en quoi la mise en uvre dune syntaxe sui generis renvoie par « méréomorphisme » (F. Rastier) à un projet compositionnel densemble, le roman simonien étant construit à tous les niveaux comme un « rhizome » deleuzien. La mise en place dun rhizome scriptural entraîne trois conséquences majeures sur le plan syntaxique :
un dépassement de la linéarité syntagmatique, du fait de la multiplication des connexions entre les différents constituants phrastiques (utilisation de procédés relevant dune « syntagmatisation du paradigmatique », utilisation massive dhyperbates, effets de « segmentation floue »)
une abolition de toute forme de hiérarchie discursive [juxtaposition déléments recteurs et déléments « régis » (subordonnées relatives, subordonnées circonstancielles, subordonnées participiales ) qui tendent à sautonomiser, emploi « déviant » des connecteurs logiques, qui permettent de coordonner entre eux des segments de statut sémantique et/ou énonciatif différent, développement de connexions syntaxiques « adventives », tendance à transformer les subordonnants (conjonctions de subordination, pronoms relatifs, prépositions) en connecteurs ] ;
une reconfiguration permanente de l« ordre » sémantico-syntaxique (effets d« anamorphose » syntaxique et/ou agencements phrastiques « en cube de Necker », utilisation de règles variables etc.) qui confère au texte simonien une dimension holistique, dans la mesure où le réseau dunités discursives qui le constitue se présente comme « une multiplicité qui change nécessairement de nature à mesure quelle augmente ses connexions » (G. Deleuze et F. Guattari)
(c) Replacer le projet décriture ainsi dégagé dans un contexte conceptuel et historique plus vaste, en rattachant luvre simonienne à la vision du monde / aux invariants thématiques et stylistiques mis en avant dans les uvres de fiction postmodernes en général
