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    Les apories des modèles émotionnalistes en théorie de l’action

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    Réflexion de philosophie empirique, l’article questionne le statut des émotions dans la théorie de l’action contemporaine. Longtemps dénigrées, mises au banc de la pensée, passions et émotions font désormais l’objet de toutes les attentions en sciences sociales. L’essor de ce champ d’étude a entraîné un nombre considérable de travaux théoriques et expérimentaux. Malgré l’intérêt et les espoirs suscités par les modèles émotionnalistes, on peut légitimement s’interroger sur leurs dérives réductionnistes. Biais chauds, filtres cognitifs, « marqueurs somatiques », constitueraient la part prédominante de notre activité mentale. La promesse de réunir corps et esprit, de s’extraire du dualisme cartésien n’était finalement qu’un leurre. Un dogmatisme peut‑il en cacher un autre ? Peut‑on totalement dissoudre la raison dans les émotions ? L’entreprise de naturalisation du social est‑elle devenue inéluctable ? Soulignant les limites à la toute‑puissance des émotions, l’article défend une version faible de l’intentionnalisme. Pour ce faire, il s’intéresse notamment aux explications naturalistes du « wishful thinking » (I), c’est‑à‑dire la tendance à prendre ses désirs pour la réalité. Ces travaux montreraient que nous serions sans cesse victimes d’illusions. Les émotions régiraient notre vie psychique. L’irrationalité motivée permettrait alors de rendre compte de nos biais de jugement. Cette proposition repose sur la distinction de deux systèmes de traitement de l’information : un système automatique et inconscient d’une part, et un système contrôlé et intentionnel d’autre part. N’est‑ce pas réinstaurer le dualisme ontologique tant décrié ? A contrario, ces processus semblent liés par des intentions stratégiques. Le phénomène du « wishful thinking » s’expliquerait ainsi par des déraisons de trois ordres : inconscientes (II), conscientes (III) et métaconscientes (IV).Following empirical philosophy, this article questions the status of feelings in contemporary action theory. For a long time denigrated, passions and feelings are today the object of all attentions in social sciences. The development of such field of study entailed a considerable amount of theoretical and experimental work. In spite of the interests and hopes raised by emotionalist models, we can legitimately question their reductionist drift. Hot biases, cognitive filters, "somatic markers", constitute the dominant part of our mental activity. The promise to combine body and spirit, expunging Cartesian dualism, is finally but a delusion. Can a dogmatism hide another one? Can we totally dissolve reason in feelings? Has naturalization of the social become inevitable? Underlining the limits of the belief in the omnipotence of feelings, this article aims to defend a weaker version of intentionalism. We will first analyze the naturalistic explanations of “wishful thinking” (I), or the tendency to take one’s desires for reality. These explanations apparently show that we are victims of illusions and that feelings govern our psychic life. Motivated irrationality would explain our judgment biases. This assertion however rests on the distinction of two information processing systems: an automatic and unconscious system on one hand, and a controlled and deliberate system on the other hand. We argue that this distinction restores the ontological dualism at first criticized. These processes seem bound by strategic intentions. The phenomenon of wishful thinking can therefore be understood by three types of irrational reasoning: unconscious (II), conscious (III) and metaconscious (IV)
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