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From fear to anxiety in Shakespeare’s Macbeth
Jean Delumeau, in his seminal history of fear (Fear in the West, first published in 1978) points to the social configurations of fear in early modern societies: a nobleman was by definition fearless, while people of the “Vulgar sort” (Montaigne, “Of fear”) were taxed with being excessively fearful and cowardly. Fear, “a servile and base passion” (Coeffeteau, A Table of Human Passions, 1620) was thus determined by its traditional reverse, bravery, and placed within that dialectic frame. That social opposition structures most early modern discourses about fear and informs a vision of fear as being characteristic of the popular masses, while bravery is associated with aristocratic individuality, desire for fame and heroism. Bearing in mind this dominant discourse, I would like to look at the ways in which Shakespearean drama undermines this social framework by staging humble representations of acts of bravery, while at the same time using fear as a fundamental basis for the modern subject, no longer a defect but as a defining trait of humankind. Fear becomes a source of fiction on the Shakespearean stage. Key words:Jean Delumeau, dans sa célèbre histoire de la peur (La Peur en Occident, 1978), montre les aspects sociaux de la peur à l’époque moderne : un noble est par définition sans peur, alors que « le vulgaire » (Montaigne, « De la peur ») est considéré comme excessivement peureux et couard. La peur, passion « servile et honteuse » (Coeffeteau, Tableau des passions humaines, 1620) dépend donc de son contraire traditionnel, le courage, et se place dans ce cadre dialectique. On trouve cette opposition sociale dans la plupart des discours sur la peur de la première modernité : la peur est donc vue comme caractéristique des classes populaires, alors que le courage est associé à l’individualité aristocratique. A partir de ce constat, cet article étudie la façon dont le théâtre shakespearien sape cette opposition sociale en mettant en scène des actes de courage accomplis par des humbles, tout en faisant de la peur le fondement du sujet moderne, la peur n’étant plus un défaut mais le fondement d’une définition de l’humain. Enfin, Shakespeare fait de la peur le fondement d’une poétique
‘Oft turning others' leaves' : la contrainte de l' imitatio dans les sonnets anglais des XVIe et XVIIe siècles
International audienceIn the sixteenth and the seventeenth centuries, imitation was not usually considered a constraint by poets. Yet Sir Philip Sidney, in his sonnet cycle Astrophil and Stella, seems to advocate a new form of poetic writing based on personal experience and originality, even if he uses the traditional device of impossible love imitated from Petrarchan sonneteers. Stella appears as a new constraint, and her absence and coldness trigger a reflection on the impossibility to write.L'application des notions de code et de contrainte à la poésie anglaise des XVIe et XVIIe siècles paraît à première vue aller de soi, puisque la littérature de cette époque est fondée sur l'imitation de codes et de topoï. Sir Philip Sidney, dans son recueil de sonnets Astrophil and Stella, semble pourtant amorcer une révolte poétique contre cette obligation. Néanmoins, il se conforme à une nouvelle contrainte, celle de la poésie pétrarquienne1 de l'amour impossible, exprimée dans les poèmes par une réflexion sur l'écriture poétique qui semble vouée à l'échec
« The title of a poet » : autorité et auctorialité dans les sonnets de William Shakespeare, de Samuel Daniel et de sir Philip Sidney
Dans The Defense of Poesy, Sidney établissait une forme d’aristocratie poétique en introduisant une distinction de classe entre ceux qui sont « nés poètes » et les autres. Néanmoins, il affirmait aussi qu’il n’avait que récemment acquis le « titre de poète ». De plus, sa défense et pratique d’une poésie et d’une poétique aristocratiques ne se manifestèrent de son vivant que dans le cercle intime de ses proches. Cette expérience poétique ne pouvait qu’être problématique pour ses successeurs, vivant dans l’ombre du gentilhomme poète devenu héros national. On étudiera dans cette communication la pratique poétique de Samuel Daniel, proche du cercle de Sidney, et de William Shakespeare, pour se demander comment se manifeste, à la fois dans leur œuvre et dans le contexte de leurs publications, cette « poétique aristocratique » et comment ils se « glissent », comme l’écrivait Sidney, dans le « titre de poète ».In The Defense of Poesy, Sir Philip Sidney established a form of poetic aristocracy when he opposed those who were born poets and the others. However, he also wrote that he had only recently “slipped into the title of a poet”. Besides, his poetry and his aristocratic poetics only circulated amongst a small circle of family and friends. This typically aristocratic poetic practice could only be problematic for the poets who succeeded him, especially as he also became a national hero after his death. In this paper, I would like to look at the poetic practice of Samuel Daniel, who was close to the Sidney circle, and of William Shakespeare, both in their sonnets and in the context of their publications. I am particularly interested in the notion of authorship and how it evolved in the period between Sidney’s sonnet sequence Astrophil and Stella and the publication of Shakespeare’s Sonnets
« The safe memorie of dead men » : réécriture nostalgique de l’héroïsme dans l’Angleterre de la première modernité
Dans A Dedication to Sir Philip Sidney (plus connu sous le titre de l’édition de 1652, The Life of the Renowned Sir Philip Sidney), Fulke Greville dit vouloir, par l’écriture, se réfugier dans le « souvenir rassurant des morts ». Son texte le confirme, puisque ce qui ne devait être qu’une dédicace de ses œuvres à Sidney devient peu à peu une archive de l’héroïsme de Sidney, « vrai modèle de grandeur ». De « digression en digression », Greville écrit finalement une « vie » de Sidney qui affirme l’héroïsme de celui-ci tout en réinventant les codes de l’héroïsme classique, notamment ceux de la beauté du corps héroïque. Le texte de Fulke Greville est emblématique d’un discours nostalgique sur l’héroïsme, fondé sur la mémoire de grandes figures du passé. Il revisite des modèles anciens qui ne sont plus valides. L’impossibilité de décrire la beauté du corps, notamment à propos de la mort de Sidney, est le signe d’un changement irréversible dans la définition de l’héroïsme moderne.In A Dedication to Sir Philip Sidney (frequently referred to as The Life of the Renowned Sir Philip Sidney, the title of the 1652 edition), Fulke Greville writes that he wishes to retire from the world and find refuge in the “safe memorie of dead men”. This is confirmed by his text, since the “dedication” of his own works to Sidney becomes, “digression upon digression”, a “Life” of Sidney and a chronicle of his dead friend’s heroism. Fulke Greville defines Sidney as “a true modell of worth” and uses the codes of classical heroism in order to praise him. However, he never evokes the beauty of the heroic body, one of the main defining codes of classical heroism. That classical model is no longer valid and the absence of an attempt to describe the beauty of the body, especially at the death of Sidney, points to a shift in the definition of modern heroism
Pablo Maurette, The Forgotten Sense. Meditations on Touch
Pablo Maurette’s book is more than an academic work. Originally published in Spanish in 2015, this collection of six essays is presented by its author in the preface as a meditation on textual material and the sense of touch. It is that, along with many other things. For the reader, it could be envisaged as an experience, not only a reading experience but also a tactile one, since the cover of the book is made of soft material, which enhances the experience of reading by the particular feel o..
“I smell false Latin, dunghill for unguem”: Odours and Aromas in Love’s Labour’s Lost
The “smell” of Love’s Labour’s Lost could be assessed through its original staging and the context of early modern playhouses, but its olfactory content is mainly metaphorical. The pedants of the play try to impose the sweet smell of knowledge as a social marker that they oppose to the stench of ignorance characterising the lower social classes. The play is also studded with fragrant metaphors that can be traced back to the Petrarchan tradition. However, in both cases, the smells undergo a process of reversibility and the play is often steeped in scatological metaphors as well as images of pestilent air—probably reflecting the context of the plague in early modern London. More importantly, the olfactory metaphors inform us on the aesthetics of the play and give us a clue about the reversibility of language.On pourrait tenter de déterminer l’« odeur » de Love’s Labour’s Lost en pensant à sa mise en scène à l’époque de Shakespeare dans un théâtre londonien, mais en fait, son contenu olfactif est essentiellement métaphorique : les pédants de la pièce tentent d’imposer l’idée d’un savoir à l’odeur agréable dont ils font un marqueur social opposé à la puanteur de l’ignorance représentée par les personnages de classes sociales inférieures ; la pièce est également envahie de métaphores odorantes qui rappellent la tradition pétrarquiste. Cependant, dans les deux cas, Shakespeare fait subir à ces odeurs un processus de réversibilité : la pièce est souvent dominée par des métaphores scatologiques ou des images d’air pestilentiel—sans doute un rappel du contexte des épidémies de peste dans le Londres de la première modernité. Enfin, les métaphores olfactives sont un indice de l’esthétique de la pièce et nous éclairent sur la question de la réversibilité du langage
Samuel Daniel et le paradoxe de la frontière : « Thames doth out goe / Declined Tybur »
L’œuvre de Samuel Daniel, depuis sa traduction des devises de Paolo Giovio en 1585, jusqu’à sa pastorale dramatique Hymens Triumph en 1615, est entièrement tournée vers la littérature européenne de son temps, notamment italienne et française. Pourtant, sa poésie, son théâtre et son œuvre historique constituent une affirmation incessante de son désir de voir naître un véritable idiome poétique national, même s’il s’est nourri de littératures étrangères. Il accomplit ce projet de « défense et illustration » de la langue et de la littérature anglaises par la création d’un locus poétique, qui se superpose au lieu géographique qu’est l’Angleterre, et par son œuvre d’historien, l’écriture historique se confondant avec l’écriture poétique.Christine Sukic est maître de conférences en littérature anglaise des XVIe et XVIIe siècles à l’Université de Bourgogne (Dijon). Elle a dirigé deux recueils d’articles sur Antony and Cleopatra et A Midsummer Night’s Dream (éditions du Temps) et va publier un ouvrage sur les tragédies de George Chapman (éditions Peter Lang). Elle a traduit Bussy d’Amboise de George Chapman (à paraître dans un volume Théâtre Élisabéthain, éditions Gallimard, collection de la Pléiade) et prépare une traduction et édition critique de The Revenge of Bussy d’Amboise de George Chapman. Elle travaille notamment sur la traduction aux XVIe et XVIIe siècles chez Daniel et Chapman et sur les notions d’imitation, de naturalisation et d’emprunt. Samuel Daniel is well-known as an imitator of Italian and French poetry. He translated Italian works and borrowed from the pastorals of Tasso and Guarini as well as from the French sonneteers of the sixteenth century. And yet, his main concern seems to have been the creation of a national poetical idiom, that would allow England to gain its literary independence from its European neighbours. In his poetry, Daniel constantly reaffirmed the national status of the English language and literature and aimed at creating a poetical locus. This was confirmed by his work as historian of his own country, in both prose and verse
Le tombeau vide pour Shakespeare et Chapman : variations autour d’un signe théâtral
Le tombeau vide, signe théâtral primordial pour les représentations médiévales de la Passion du Christ dans lesquelles il montre le décalage entre l’insupportable apparence, l’absence du corps, et la réalité que masque cette apparence, la résurrection, se rencontre dans deux pièces de la première moitié du XVIIe siècle presque contemporaines, The Widow’s Tears de George Chapman, et Pericles de Shakespeare. Néanmoins, l’usage qui est fait de ce motif par les deux dramaturges se détache de son modèle médiéval. Malgré cette référence indirecte au texte de l’évangile, la présence du sépulcre dans la pièce de Chapman n’annonce pas une résurrection à venir, mais est le signe d’un vide irrémédiable qui se cache au cœur des apparences. L’image s’inscrit dans une vision nostalgique du monde, selon laquelle le poète considère que l’équivalence entre intérieur et extérieur a existé dans un passé idéalisé, mais qu’elle n’est plus possible désormais. En revanche, Shakespeare, comme souvent, ne se cantonne pas à une interprétation unique et figée. Les variations autour du contenant vide, ou dépourvu de son contenu originel, et du silène platonicien ainsi que du silène inversé érasmien sont au service d’une esthétique de la réversibilité
A Massacre at Paris in French Translation: from Page to Stage
In 2020, when we began working on plans for a special Marlowe Festival and conference to be held in Rheims and Paris that would bring together Marlowe specialists and historians of the French wars of religion on the occasion of the 450th anniversary of the Saint Bartholomew’s Day Massacre, it very quickly became obvious that we wished not just to discuss Marlowe’s last play, but also to stage it. What text, though, would serve for our French staging of Massacre at Paris? What was the history of the text in translation and what were the antecedents to our own project? These questions have led us to inquire into the different French translations of the play and gain insight both into Marlowe’s French reception as well as into the octavo edition of the English text that has come down to us
Introduction
An introduction to the special issue from our guest editors
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