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Développement d'une méthode de Boltzmann sur réseau pour la simulation d'écoulements visqueux en cuves agitées
La caractéristique principale des écoulements visqueux est leur forte résistance à l’écoulement. Comme la prédominance des forces visqueuses empêche la génération de turbulence, la forme de l’écoulement est principalement affectée par la géométrie du problème, la rhéologie du fluide et la présence de plusieurs phases. La simulation de tels écoulements requiert donc l’utilisation d’un outil numérique capable de traiter précisément les géométries, les rhéologies et les interactions entre les phases. Dans la cadre de cette thèse, l’étude des méthodes numériques a pour objectif d’améliorer la simulation des écoulements visqueux en cuves agitées.
La simulation des écoulements dans les mélangeurs permet de compléter les informations obtenues lors des mesures expérimentales. Par exemple, les approches numériques permettent de visualiser facilement les écoulements à l’intérieur du système de mélange, ainsi que de caractériser des grandeurs globales comme le pompage. Pour autant, les résultats ne sont intéressants que si l’on maitrise l’impact des différents paramètres numériques sur la précision. Le cas des mélangeurs industriels spécialisés pour les liquides visqueux concentre un très grand nombre de difficultés. Premièrement, la géométrie du système de mélange est complexe et évolue au cours du temps. En effet, ce type de mélangeur utilise des formes de pales complexes afin de réaliser le mélange. De plus, les pales doivent racler la cuve pour prévenir la stagnation du liquide, ce qui crée des espacements faibles comparativement à la taille du système. Deuxièmement, les propriétés physiques du mélange sont généralement compliquées. La difficulté réside ici dans la modélisation de l’interaction entre les phases ou entre les différents liquides. Dans le cas de l’étude de l’agitation, caractérisée par la simulation d’une seule phase liquide homogène, la difficulté se concentre sur la rhéologie du liquide. Dans le cadre de cette thèse, nous nous limiterons à l’étude de l’agitation.
Malgré ces difficultés, plusieurs travaux de recherche ont été effectués sur la simulation du mélange visqueux dans des cuves agitées utilisées dans l’industrie. Il ressort de ces articles que ce sont principalement les méthodes d’éléments et de volumes finis qui sont utilisées. Malgré des simplifications astucieuses pour faciliter le traitement de la géométrie (tels que les changements de repère ou les conditions aux limites immergées), la simulation des systèmes de mélange entraine un compromis entre la précision des résultats et les temps de calcul. Cette contrainte peut devenir un facteur limitant pour des géométries très complexes et/ou des rhéologies largement non newtoniennes. Cela s’explique principalement par la taille et la complexité du système d’équations obtenu. Ainsi, dans la littérature, les travaux se situant à l’échelle industrielle se limitent généralement à une seule phase liquide. Certaines simulations polyphasiques sont pourtant réalisées, mais souffrent de temps de calcul très importants et/ou d’approximations affectant globalement la précision. Afin de dépasser ces contraintes, il semble pertinent d’utiliser une méthode efficace pour le calcul parallèle et qui permet de traiter facilement des géométries et des rhéologies complexes. C’est pour cette raison que la méthode de Boltzmann sur réseau est utilisée dans cette thèse.
La méthode de Boltzmann sur réseau « lattice Boltzmann method (LBM) », basée sur la théorie cinétique des gaz, part du principe que la simulation du mouvement de particules de fluide à une échelle physique plus petite (mésoscopique), va permettre d’obtenir le comportement macroscopique du fluide. Ainsi, à partir de l’équation de Boltzmann, la solution des équations de Navier-Stokes peut être obtenue. L’avantage de ce schéma numérique est qu’il est explicite et basé sur des calculs simples et locaux, ce qui lui confère une très bonne efficacité pour le calcul parallèle. À l’inverse, ce changement d’échelle physique comporte aussi des inconvénients, comme la difficulté d’imposer des conditions aux limites macroscopiques. Malgré des approximations sur les phénomènes aux frontières, la LBM a été appliquée avec succès pour la simulation d’écoulements en milieux poreux et de suspensions solide-liquide.
L’objectif principal de cette thèse est de développer une méthode de Boltzmann sur réseau efficace pour la simulation d’écoulements visqueux en cuves agitées. Pour ce faire, il est nécessaire d’étudier l’applicabilité des différentes stratégies pour l’imposition des conditions aux limites et de caractériser la précision de la LBM dans le cas de géométries complexes. Finalement, il est aussi intéressant d’étudier l’applicabilité de la LBM pour des rhéologies complexes.
L’article 1 montre que, dans le cas de géométries courbes (Couette cylindrique et mélangeurs), la précision du schéma LBM est largement affectée par le choix de la stratégie d’imposition de conditions aux limites. Par exemple, dans le cas des mélangeurs raclants, l’approche dite des conditions aux limites immergées « immersed boundary method (IBM) » apparait comme étant moins adaptée. À l’inverse, l’approche la plus simple « modified bounce back-rule (MBB) », basée sur la règle du rebond, et l’approche plus élaborée « extrapolation method (EM) », qui extrapole les populations en fonction de la distance à l’obstacle, donnent la même précision sur les grandeurs caractéristiques des mélangeurs. Cependant, comme seule la stratégie EM permet d’étudier précisément l’impact d’une petite variation de la géométrie, cette approche est sélectionnée pour la suite des travaux.
L’article 2 montre ensuite que la LBM, couplée avec la méthode d’extrapolation, permet d’obtenir une précision adéquate pour la simulation de la consommation de puissance et de la capacité de pompage du système de mélange Maxblend. Elle permet aussi d’étudier l’impact de paramètres géométriques comme l’espacement entre la pale et le fond de la cuve. De plus, dans le cas d’une géométrie variable dans le temps (configuration avec contre-pales), la précision reste bonne même si les vitesses sont perturbées aux alentours de la pale.
Finalement, l’article 3 montre que, sous certaines limitations sur nombre de Reynolds, la LBM peut être utilisée efficacement pour la simulation d’écoulements fortement non newtoniens. Ainsi, dans le cas du système de mélange Maxblend, un modèle rhéologique de type loi de Carreau-Yasuda avec un indice de puissance de 0.05 a pu être simulé sans affecter largement les temps de calcul.
En conclusion, cette thèse a permis de montrer que la LBM peut être utilisée efficacement pour la simulation des écoulements dans les mélangeurs industriels spécialisés pour les liquides visqueux. Il a même été montré que cette approche pouvait être utilisée pour faire de l’optimisation géométrique des systèmes de mélange. De plus, sous certaines contraintes relatives au régime d’écoulement, il a aussi été montré que la LBM permettait de simuler l’agitation de liquides avec des comportements fortement non newtoniens.
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The major feature of the viscous flow is its resistance to motion. As the viscous forces are dominant the turbulent phenomena disappear, whereby the shape of the flow is determined by the geometry of the problem, the rheology of the fluid and the presence of several phases. In order to simulate such flows, the selected numerical tool used should be capable of accurately managing the geometry, the rheology and interactions between phases. In the scope of this thesis, numerical methods are assessed in order to improve the simulation of viscous flows in stirred tanks.
In the case of mixing systems, computational fluid dynamics (CFD) is a facilitating tool which may be used to supplement experimental measurements. For instance, numerical simulations allow to readily visualize the flow inside the mixer and determine characteristic mixing numbers, such as the pumping capacity. However, simulation results are useful only if the impact of the numerical parameters on the accuracy is understood. Batch mixers for highly viscous fluids are quite tricky, rendering the simulation process highly challenging. First, the geometry of the mixing system is complex and time dependent. The complex shape of the geometry is though necessary and used to compensate the impossibility of achieving adequate mixing with the turbulence. Given that close clearance impellers are used to prevent the fluid stagnation near the tank, small gaps are found between the tank and impeller. Second, the physical properties of the mixture are also complex. The modelling approach should be able to account for the interaction between the phases (solid, liquid or gas). In the case of blending, only one single liquid phase is considered, thus the difficulty is concentrated on the rheology of the fluid. In this thesis, only blending will be examined.
Notwithstanding such difficulties, the simulation of viscous mixing in stirred tanks has been the subject of many articles. It can be inferred from the literature that the finite element method (FEM) and finite volume method (FVM) have been the most commonly used approaches. Despite the use of ingenious ways to treat the complexity of the geometry (change of reference frame or immersed boundary conditions), the simulation of industrial mixing flows leads to a compromise between accuracy and computation time. This can be explained by the size and complexity of the system of equations to be solved. This limitation can be rather restrictive in the case of particularly complex geometries or highly non-Newtonian behaviors. For instance, most simulations of industrial mixing process consider only one single liquid phase. Conversely, few multiphase simulations have been applied and suffer from considerable computational cost and/or approximations affecting the accuracy of the simulation. In order to go beyond these limitations, it seems pertinent to use a numerical approach efficient for massive parallel computations. In addition, this method must be able to easily integrate complex geometries and rheology. For the above reasons, the lattice Boltzmann method has been selected in this work.
The lattice Boltzmann method (LBM) is based on the kinetic theory of gas. The idea behind this approach is to obtain the macroscopic dynamics of a fluid from the simulated motion of mesoscopic fluid particles. The solution of the Navier-Stokes equations is then recovered from the Boltzmann equation. As the LBM is explicit and only requires simple and local computations, the resulting scheme is highly efficient for parallel computations. Inversely, the change in physical scale behind the LBM leads to several difficulties, such as the imposition of macroscopic boundary conditions. Despite approximations on the phenomena at the boundaries, the LBM has been successfully applied for the simulation of porous media flows and solid-fluid suspensions.
The main objective of this thesis is to develop an efficient lattice Boltzmann method for the simulation of viscous flows in stirred tanks. To do so, the applicability of the different strategies to impose boundary conditions is first compared. Second, the accuracy of the LBM in the case of complex geometry is characterized. Lastly, the applicability of the LBM for highly non-Newtonian fluid is investigated.
Article 1 illustrates that the accuracy of the scheme is largely affected by the selection of the boundary condition strategy. For instance, in the case of close clearance impellers, the immersed boundary method (IBM) seems to be less accurate. Inversely, the simplest approach, the modified bounce-back rule (MBB), and a more elaborate method, the extrapolation method (EM), which uses the distance from the obstacle to extrapolate missing populations, provide a similar accuracy on characteristic mixing numbers. However, only the EM allows investigating variations of the geometry lower than the lattice spacing. For this reason, this boundary condition strategy is used in the other articles.
Article 2 shows that the LBM accurately predicts the power consumption and pumping capacity of a mixing system. In addition, the impact of geometrical parameters, such as bottom clearance, can likewise be effectively investigated. Moreover, in the case of time dependent geometries, the LBM conserves an acceptable accuracy even if perturbations appear near the impeller.
Lastly, article 3 demonstrates that, under constraint on the maximum Reynolds number, the LBM can be used to simulate highly non-Newtonian fluid flows. For instance, a Carreau-Yasuda model with a power index of 0.05 was used without largely affecting the computational cost of the simulation.
In conclusion, this thesis has permitted to verify the degree of efficiency and utilization of the LBM for the simulation of viscous flows in stirred tanks. It has also shown that this approach can be used for the optimisation of process geometry. Moreover, under some limitations of the Reynolds number, it can be extended to the blending of highly non-Newtonian fluids