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Le sourcier du village est cadre à Dakar : la circulation de l’eau au Sénégal entre privatisation et attachement au terroir
Cette recherche aborde la problématique de la circulation de l’eau en milieu rural sénégalais à partir du dysfonctionnement : la cessation du service d’eau. Lors de ces moments de crise, les habitants font régulièrement appel à un « fils du village », un cadre de l’administration, natif de la zone et établi à Dakar. Ces épisodes permettent d’éclairer aussi bien les registres de pouvoir et de légitimité locaux que les rapports du rural à l’urbain à un moment clé : la privatisation communautaire du service d’eau rural dans le cadre des Objectifs du millénaire pour le développement que poursuit actuellement le Sénégal. L’eau se révèle ainsi sujet et médium d’une histoire à la fois locale et nationale et permet d’explorer le processus de formation de l’État sénégalais en donnant accès au domaine de l’immatériel : le pouvoir et l’affect.This paper explores local water management in Senegal through water supply failure. When water supply problems occur in a community, the « son of the soil » is seen as the preferred solution to end the crisis. « Sons of the soil » have several points in common: they were born in the village and now work as administrative executives in Dakar. As Senegal is achieving the Millenium Development Goals by privatizing rural water supply, the lack of access to water sheds a light on local norms of power and its legitimacy as well as on urban and rural interaction. In this sense, water gives us the opportunity to explore the process of state formation by allowing us to study the immaterial, namely power and affect
La mise en camp de la Guinée
En 2014, la première épidémie massive de maladie à virus Ebola en Afrique de l’Ouest fut un événement exceptionnel tant par son étendue et sa durée que par l’ampleur de l’engagement des organisations humanitaires, mais aussi du point de vue des populations guinéennes qui tentèrent de résister, parfois violemment, au dispositif de réponse à l’épidémie. À partir d’une ethnographie comparée de deux centres de traitement Ebola (Cte) mis en place par Médecins sans frontières, nous rendrons compte de l’organisation des soins à l’intérieur de ces centres et nous montrerons que les Cte partagent plusieurs points communs avec les multiples « formes-camp » qui peuplent le monde contemporain : la frontière, la logique épidémiologique, le triage des populations et, enfin, la suppression de l’éthique ordinaire. C’est pourquoi l’expérience d’Ebola révèle en fait l’avènement d’un régime global de gouvernance de la santé qui s’inscrit dans un contexte postcolonial et renvoie les populations guinéennes à l’histoire longue de leur relation au pouvoir caractérisée par la violence et l’extraction. Elle est aussi emblématique d’un gouvernement du monde qui conjugue biopolitique et nécropolitique.In 2014, West Africa was hit by the first large-scale outbreak of the Ebola virus epidemic. The event was widely recognized as exceptional, not only for how rapidly it spread, how long it lasted, and the scale of the humanitarian response but also, from the point of view of people in Guinea, for the attempt to resist, sometimes violently, the means used to respond to it. Our comparative ethnographic study of two Ebola Treatment Centres (Etc) set up by Doctors Without Borders in Guinea will detail how care was set up and organized. We will show that Etcs have several traits in common with the « camp-forms » that inhabit the contemporary world : border regions, epidemiological reasoning, the triage of populations and finally, the suppression of ordinary ethics. This is why the Ebola experience actually reveals the coming of a regime of global health governance inscribed within a postcolonial context that has populations in Guinea revisit their long historical relation to power characterized by violence and extraction. It is also emblematic of a world government that conjugates bio-politics with necro-politics
La mise en camp de la Guinée: Ebola et l'expérience postcoloniale.
International audienceIn 2014, West Africa was hit by the first large-scale outbreak of the Ebola virus epidemic. The event was widely recognized as exceptional, not only for how rapidly it spread, how long it lasted, and the scale of the humanitarian response but also, from the point of view of people in Guinea, for the attempt to resist, sometimes violently, the means used to respond to it. Our comparative ethnographic study of two Ebola Treatment Centres (Etc) set up by Doctors Without Borders in Guinea will detail how care was set up and organized. We will show that Etcs have several traits in common with the « camp-forms » that inhabit the contemporary world : border regions, epidemiological reasoning, the triage of populations and finally, the suppression of ordinary ethics. This is why the Ebola experience actually reveals the coming of a regime of global health governance inscribed within a postcolonial context that has populations in Guinea revisit their long historical relation to power characterized by violence and extraction. It is also emblematic of a world government that conjugates bio-politics with necro-politics.En 2014, la première épidémie massive de maladie à virus Ebola en Afrique de l’Ouest fut un événement exceptionnel tant par son étendue et sa durée que par l’ampleur de l’engagement des organisations humanitaires, mais aussi du point de vue des populations guinéennes qui tentèrent de résister, parfois violemment, au dispositif de réponse à l’épidémie. À partir d’une ethnographie comparée de deux centres de traitement Ebola (Cte) mis en place par Médecins sans frontières, nous rendrons compte de l’organisation des soins à l’intérieur de ces centres et nous montrerons que les Cte partagent plusieurs points communs avec les multiples « formes-camp » qui peuplent le monde contemporain : la frontière, la logique épidémiologique, le triage des populations et, enfin, la suppression de l’éthique ordinaire. C’est pourquoi l’expérience d’Ebola révèle en fait l’avènement d’un régime global de gouvernance de la santé qui s’inscrit dans un contexte postcolonial et renvoie les populations guinéennes à l’histoire longue de leur relation au pouvoir caractérisée par la violence et l’extraction. Elle est aussi emblématique d’un gouvernement du monde qui conjugue biopolitique et nécropolitique
Ensemble, soyons raisonnables : la facturation de l’eau
« Nous, ici, on facture comme à la SENELEC. » C’est par ce slogan que le secrétaire de l’ASUFOR, Mustapha Faye, ponctue régulièrement les discussions de notre matinée de travail. En l’aidant à mettre de l’ordre dans les papiers, je remarque pourtant, dans la comptabilité de l’association, que de nombreux ménages n’ont pas honoré plusieurs factures. Dans le contraste entre les propos du secrétaire et la facturation pratique de l’eau dans la localité apparaît un paradoxe que je rencontre dans t..
L’État, c’est ça : l’ordinaire bureaucratique pour terrain
Ce chapitre constitue le premier des deux volets consacrés à la DEM. Cette direction dépend du ministère de tutelle de l’Hydraulique rurale. Ses agents ont pour mission le bon fonctionnement des forages ruraux à travers l’encadrement des usagers et la maintenance des installations. Par une plongée au cœur du « state-system », ces deux chapitres interrogent le fonctionnement l’État à travers l’exemple de la maintenance des installations d’exhaure en zone rurale. La DEM intervient sur le territ..
Plonger dans le forage : une introduction
Nous sommes dans la région de Kaffrine, au centre du Sénégal, un soir d’avril 2011. J’ai accompagné les agents de l’État chargés de la maintenance des infrastructures hydrauliques. Ils sont venus réparer un forage en panne depuis des mois. La pompe doit être remplacée. Quelques heures plus tôt, nous sommes partis de la ville de Kaolack – où se trouvent les locaux de l’Hydraulique. Le service public ne semble pas connaître d’heures pour ses interventions. Les agents travaillent de nuit, le dim..
Reconstruire depuis le forage : perspectives historiques
« L’eau va avec la vie ». Voici un énoncé récurrent dans le discours de mes interlocuteurs kaolackois. L’assertion peut paraître quelque peu banale. Pourtant, avant de devenir un service fourni par l’État, l’eau est un besoin inhérent à la vie sur terre. En tant que telle, elle a toujours accompagné l’établissement des hommes dans les zones rurales du pays. Sans eau, pas de vie. Si l’eau « va avec la vie », elle ne constitue pas toujours pour autant un bien accessible en soi. Dans la région d..