7 research outputs found
Bettina Ghio, Sans fautes de frappe. Rap et littérature
D’abord approché par les sciences sociales en laissant peu de place à sa dimension artistique, le rap français a fait l’objet dans les années 2000 d’une reconnaissance esthétique grandissante. Ce processus a largement pris la forme d’une mise en lumière des qualités d’écriture de certains rappeurs : en témoigne la multiplication de publications telles que des anthologies (Perrier, 2010 ; Jousserand, 2016), et autres approches pionnières mettant en lumière l’intérêt stylistique du genre (Marc ..
Erik Nielson & Andrea L. Dennis, Rap on trial. Race, Lyrics, and Guilt in America
Cet ouvrage paru en 2019 part d’une constatation empirique et d’un sentiment d’urgence politique : ces dernières années, le rap est utilisé de manière croissante comme preuve au sein de procès criminels, devenant un appui à la surcarcéralisation, surcriminalisation (pouvant aller jusqu’à la peine de mort) des jeunes hommes majoritairement africains-américains. Les auteur·rices – l’une ancienne avocate pour les personnes démunies, confrontée lors de son travail à cette pratique de criminalisat..
Norbert Lenoir, Marx et la double structure de la religion. De l'opium du peuple au fétichisme de la marchandise
La critique de la religion chez Marx est aujourd'hui souvent simplifiée, critiquée, y compris au sein du paysage politique de « gauche », au nom du refus de la négation de la liberté de conscience. Chez les marxistes eux-mêmes, selon la théorie de la « coupure épistémologique » élaborée par Althusser qui distinguerait l'oeuvre d'un « jeune Marx » -celui des Manuscrits de 1844- encore entaché d'humanisme et d'idéalisme et un Marx parvenu à maturité qui serait véritablement scientifique -celui ..
Rap on Trial: The Political and Legal Battles Over Jo le Phéno and Nick Conrad’s Music Videos
Through the ethnography of two trials—of rapper Jo le PhĂ©no, under investigation for his track “Bavure”, and of Nick Conrad for “PLB”—this article analyses the role of the law in the social construction of the rap genre. While recent commentary by legal experts emphasizes the idea of a “legal shield” for rap, both artists were sentenced in the court of first instance. The article aims to shed light on the paradox of apparently protective case law yet still-frequent convictions. Comparative analysis of the two cases identifies the position taken by the legal institution by which it defines incriminated tracks’ access to the status of work of art and to legitimate and legal politically engaged speech, drawing from interactions, categories, and cross-representations of social relations of power (age, class, sex, and race). The hearings, perceived as a space of symbolic violence, document a dynamic common to both trials: the court’s reversal of the artists’ use of a confessional style and an anchoring in reality as artistic choices made to illegitimise the work and the defendants. The latter are then categorized via the assignment of marginalizing labels which devalue and distance them from the status of artist as it is nevertheless recognized in case law. Through these two cases, we see how the law constructs the “paradoxical (il)legitimacy” of rap, as identified by Karim Hammou in the 2010s (2012, 2016): a genre that is neither fully legitimized nor fully illegitimate, but which is singled out as a minority-group art form—an ambivalence that explains the coexistence of protective case law and convictions.Par l’ethnographie de deux procès, celui du rappeur Jo le PhĂ©no, mis en examen pour son titre « Bavure », et celui de Nick Conrad pour « PLB », cet article analyse le rĂ´le de l’institution judiciaire dans la construction sociale du genre rap. Alors que les commentaires rĂ©cents de spĂ©cialistes du droit insistent sur l’idĂ©e d’un « bouclier juridique » octroyĂ© au rap, les deux artistes sont condamnĂ©s en première instance. L’article propose donc d’élucider le paradoxe d’une jurisprudence apparemment protectrice et de condamnations encore frĂ©quentes. L’analyse comparĂ©e des deux affaires permet d’identifier des « prises » par lesquelles l’institution judiciaire dĂ©finit l’accès des titres incriminĂ©s au statut d’œuvre d’art et Ă la parole engagĂ©e lĂ©gitime et lĂ©gale en s’appuyant sur des interactions, catĂ©gories et reprĂ©sentations traversĂ©es de rapports sociaux de pouvoir (âge, classe, sexe, race). Les audiences, envisagĂ©es comme espaces de violence symbolique, permettent de documenter une dynamique commune aux deux procès : le retournement – par le tribunal – de la revendication – par les artistes – de la frontalitĂ© et l’ancrage dans un vĂ©cu rĂ©el comme choix artistiques en tant que prises pour l’illĂ©gitimation des Ĺ“uvres et des prĂ©venus. Ces derniers sont alors catĂ©gorisĂ©s via des assignations minorisantes qui les Ă©loignent du statut d’artiste pourtant reconnu dans les jurisprudences. Ă€ travers ces deux cas, on voit comment l’institution judiciaire construit l’« (il)lĂ©gitimitĂ© paradoxale » du rap, identifiĂ©e par Karim Hammou Ă l’orĂ©e des annĂ©es 2010 (2012, 2016) : genre artistique qui n’est ni complètement lĂ©gitimĂ©, ni complètement illĂ©gitime, mais qui est particularisĂ© comme minoritaire, ambivalence expliquant la coexistence de jurisprudences protectrices et de condamnations.A travĂ©s de una etnografĂa de dos juicios –el del rapero Jo le PhĂ©no, investigado por su canciĂłn “Bavure”, y el de Nick Conrad por “PLB”– este artĂculo analiza el papel de la instituciĂłn judicial en la construcciĂłn social del gĂ©nero rap. Mientras que los comentarios recientes de los especialistas en derecho insisten en la idea de un “escudo legal” concedido al rap, ambos artistas fueron condenados en primera instancia. Por lo tanto, este artĂculo propone dilucidar la paradoja entre una jurisprudencia aparentemente protectora y condenas que siguen siendo frecuentes. El análisis comparativo de ambos casos permite identificar los “asideros” a travĂ©s de los cuales la instituciĂłn judicial define el acceso de las canciones incriminadas al estatuto de obra de arte y al discurso comprometido legĂtimo y legal, apoyándose en interacciones, categorĂas y representaciones atravesadas por relaciones sociales de poder (edad, clase, sexo, raza). Las audiencias, vistas como espacios de violencia simbĂłlica, permiten documentar una dinámica comĂşn a ambos juicios: la inversiĂłn –por parte del tribunal– de la reivindicaciĂłn –por parte de los artistas– de la frontalidad y el anclaje en una vivencia real como elecciones artĂsticas en cuanto asideros para la deslegitimaciĂłn de las obras y de los acusados. Estos Ăşltimos entonces son categorizados mediante asignaciones minorizantes que los alejan del estatus de artista, reconocido sin embargo por la jurisprudencia. Con estos dos casos vemos cĂłmo la instituciĂłn judicial construye la “paradĂłjica (i)legitimidad” del rap, identificada por Karim Hammou en los albores de la dĂ©cada de 2010 (2012, 2016): un gĂ©nero artĂstico que no está ni completamente legitimado ni es completamente ilegĂtimo, pero que se particulariza como minoritario, una ambivalencia que explica la coexistencia de jurisprudencias protectoras y condenas
Le rap au prétoire : luttes politico-judiciaires autour de deux clips (Jo le Phéno et Nick Conrad)
Par l’ethnographie de deux procès, celui du rappeur Jo le PhĂ©no, mis en examen pour son titre « Bavure », et celui de Nick Conrad pour « PLB », cet article analyse le rĂ´le de l’institution judiciaire dans la construction sociale du genre rap. Alors que les commentaires rĂ©cents de spĂ©cialistes du droit insistent sur l’idĂ©e d’un « bouclier juridique » octroyĂ© au rap, les deux artistes sont condamnĂ©s en première instance. L’article propose donc d’élucider le paradoxe d’une jurisprudence apparemment protectrice et de condamnations encore frĂ©quentes. L’analyse comparĂ©e des deux affaires permet d’identifier des « prises » par lesquelles l’institution judiciaire dĂ©finit l’accès des titres incriminĂ©s au statut d’œuvre d’art et Ă la parole engagĂ©e lĂ©gitime et lĂ©gale en s’appuyant sur des interactions, catĂ©gories et reprĂ©sentations traversĂ©es de rapports sociaux de pouvoir (âge, classe, sexe, race). Les audiences, envisagĂ©es comme espaces de violence symbolique, permettent de documenter une dynamique commune aux deux procès : le retournement – par le tribunal – de la revendication – par les artistes – de la frontalitĂ© et l’ancrage dans un vĂ©cu rĂ©el comme choix artistiques en tant que prises pour l’illĂ©gitimation des Ĺ“uvres et des prĂ©venus. Ces derniers sont alors catĂ©gorisĂ©s via des assignations minorisantes qui les Ă©loignent du statut d’artiste pourtant reconnu dans les jurisprudences. Ă€ travers ces deux cas, on voit comment l’institution judiciaire construit l’« (il)lĂ©gitimitĂ© paradoxale » du rap, identifiĂ©e par Karim Hammou Ă l’orĂ©e des annĂ©es 2010 (2012, 2016) : genre artistique qui n’est ni complètement lĂ©gitimĂ©, ni complètement illĂ©gitime, mais qui est particularisĂ© comme minoritaire, ambivalence expliquant la coexistence de jurisprudences protectrices et de condamnations.Through the ethnography of two trials – of rapper Jo le PhĂ©no, under investigation for his track “Bavure”, and of Nick Conrad for “PLB” – this article analyses the role of the law in the social construction of the rap genre. While recent commentary by legal experts emphasizes the idea of a “legal shield” for rap, both artists were sentenced in the court of first instance. The article aims to shed light on the paradox of apparently protective case law yet still-frequent convictions. Comparative analysis of the two cases identifies the position taken by the legal institution by which it defines incriminated tracks’ access to the status of work of art and to legitimate and legal politically engaged speech, drawing from interactions, categories, and cross-representations of social relations of power (age, class, sex, and race). The hearings, perceived as a space of symbolic violence, document a dynamic common to both trials: the court’s reversal of the artists’ use of a confessional style and an anchoring in reality as artistic choices made to illegitimise the work and the defendants. The latter are then categorized via the assignment of marginalizing labels which devalue and distance them from the status of artist as it is nevertheless recognized in case law. Through these two cases, we see how the law constructs the “paradoxical (il)legitimacy” of rap, as identified by Karim Hammou in the 2010s (2012, 2016): a genre that is neither fully legitimized nor fully illegitimate, but which is singled out as a minority-group art form – an ambivalence that explains the coexistence of protective case law and convictions.A travĂ©s de una etnografĂa de dos juicios –el del rapero Jo le PhĂ©no, investigado por su canciĂłn “Bavure”, y el de Nick Conrad por “PLB”– este artĂculo analiza el papel de la instituciĂłn judicial en la construcciĂłn social del gĂ©nero rap. Mientras que los comentarios recientes de los especialistas en derecho insisten en la idea de un “escudo legal” concedido al rap, ambos artistas fueron condenados en primera instancia. Por lo tanto, este artĂculo propone dilucidar la paradoja entre una jurisprudencia aparentemente protectora y condenas que siguen siendo frecuentes. El análisis comparativo de ambos casos permite identificar los “asideros” a travĂ©s de los cuales la instituciĂłn judicial define el acceso de las canciones incriminadas al estatuto de obra de arte y al discurso comprometido legĂtimo y legal, apoyándose en interacciones, categorĂas y representaciones atravesadas por relaciones sociales de poder (edad, clase, sexo, raza). Las audiencias, vistas como espacios de violencia simbĂłlica, permiten documentar una dinámica comĂşn a ambos juicios: la inversiĂłn –por parte del tribunal– de la reivindicaciĂłn –por parte de los artistas– de la frontalidad y el anclaje en una vivencia real como elecciones artĂsticas en cuanto asideros para la deslegitimaciĂłn de las obras y de los acusados. Estos Ăşltimos entonces son categorizados mediante asignaciones minorizantes que los alejan del estatus de artista, reconocido sin embargo por la jurisprudencia. Con estos dos casos vemos cĂłmo la instituciĂłn judicial construye la “paradĂłjica (i)legitimidad” del rap, identificada por Karim Hammou en los albores de la dĂ©cada de 2010 (2012, 2016): un gĂ©nero artĂstico que no está ni completamente legitimado ni es completamente ilegĂtimo, pero que se particulariza como minoritario, una ambivalencia que explica la coexistencia de jurisprudencias protectoras y condenas
Approches du rap en français comme forme poétique
International audienceNé en tant que genre musical dans les années 1970 à New York, le rap se développe en France dès les années 1980, avant de prendre au milieu des années 1990 une place importante dans le paysage culturel du pays . Il se caractérise notamment par une base musicale (« l’instrumental ») marquée par les technologies de composition sonore nouvelles à cette époque (échantillonnage, boîtes à rythmes puis composition assistée par ordinateur) et par un rythme régulier le plus souvent en quatre temps alternant temps fort et faible. C’est cependant une autre caractéristique qui a frappé les esprits, jusqu’à donner son nom au genre : l’interprétation rappée, que l’on a parfois qualifiée de mi parlée mi chantée. Cette contribution propose une brève synthèse des acquis académiques dans l’analyse du rap en français comme forme esthétique, et s’attachant plus particulièrement aux aspects relevant de la poétique du genre
Le monde ou rien ?
Depuis leur apparition, les musiques hip-hop sont soumises à des questionnements relatifs à leur « légitimité » et leur « authenticité ». Pendant longtemps, journalistes et chercheurs se sont contentés d’observer ces musiques comme une expression « authentique » de populations en marge des agglomérations urbaines, qui se trouverait légitimées par un passage hypothétique du « ghetto » aux grandes institutions culturelles. Pourtant, les logiques qui structurent les musiques hip-hop et guident leur reconnaissance sont bien plus complexes. En mettant la lumière sur une nouvelle vague de recherche en Hip-Hop Studies, appuyée sur des terrains de recherche inédits et variés, ce numéro de Volume ! observe comment la question de la légitimité et de l’authenticité a influencé les pratiques et les réceptions des musiques hip-hop par une diversité d’acteurs, mais aussi leur inscription dans différents contextes spatiaux et leur évolution au cours du temps. Ce numéro offre ainsi un éclairage inédit sur des musiques qui ont depuis plusieurs décennies un impact considérable, à la fois en France et dans le reste du monde. Ever since the genre’s inception, questions of “legitimacy” and “authenticity” have been at the center of hip-hop narratives and analyses. For a long time, journalists and academics considered the genre as an “authentic” expression of marginalized, urban populations, which supposedly gained legitimacy when it escaped the ghettos and smuggled its way into major cultural institutions. However, the dynamics that structure hip-hop music and account for its recognition are much more complex. By shedding light on a new wave of hip-hop studies research based on original and diverse research fields, this issue of Volume! considers how such issues of legitimacy and authenticity have influenced the way this music has been practiced and received by a variety of agents, within different spatial and historical contexts, in France as well as in the rest of the world