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Taxer les bénéfices de guerre, ou confisquer les profits illicites, deux légitimités distinctes
L’imposition des bénéfices exceptionnels liés à la Grande guerre est introduite par la loi du 1er Juillet 1916. Née de la guerre, cette loi est d’abord l’objet d’un consensus relatif. Elle marque le début de la modernisation du système fiscal français. Le contexte de la guerre mais aussi les difficultés d’application tenant à la complexité de la loi et au manque d’empressement des assujettis limitent son rendement. L’expérience inédite de ce premier impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux français est pourtant riche d’enseignements. Elle oblige à définir les limites du droit des entreprises sur leur bénéfice, à discuter des limites du secret des affaires et à s’interroger sur la légitimité et sur les modalités de l’intervention de l’Etat dans la répartition des revenus. L’expérience ouverte en 1916 sert de repère aux grandes réformes fiscales de l’après guerre. Elle sert aussi à définir la fiscalité exceptionnelle introduite pour répondre aux nécessités du réarmement. La filiation se prolonge après la Libération. L’une des premières mesures d’autorité du Gouvernement provisoire de la République française est d’adopter une ordonnance prescrivant la confiscation des profits illicites. Il s’agit désormais de punir et non plus d’éliminer les enrichissements liés à la guerre. Il s’agit également d’asseoir une Autorité politique, et non plus de répondre aux aspirations des parlementaires. Il faut confisquer et taxer les profits illicites alors que le législateur de juillet 1916 introduisait une contribution exceptionnelle sur les bénéfices extraordinaires. Le choix du terme profit – qui a une mauvaise image en France – et celui du qualificatif illicite stigmatisent une faute. Il y a donc deux réactions fiscales distinctes aux sorties des guerres mondiales. Ces expériences montrent que les fondements juridiques de la fiscalité peuvent être davantage liés aux circonstances que le résultat d’une construction rigoureuse.Entreprises - Fiscalité – Impôts - Guerres mondiales - Histoire économique et financière de la France - Patronat
Le développement de la normalisation comptable et de la comptabilité nationale en France entre les années 1920 et les années 1960, des analogies singulières
Les particularités de la relation entre la comptabilité privée et la comptabilité nationale en France s'inscrivent dans leur histoire. Elles témoignent d'une conception singulière de l'information économique et des relations entre l'Etat, les entreprises, les économistes et les comptables. Ces particularités tiennent à l'histoire de la comptabilité nationale et de la normalisation des comptabilités générale privées entre les années 1920, quand apparaît l'idée d'un usage macro économique des données comptables, et le décret du 28 octobre 1965 qui, obligeant les entreprises à déclarer leurs bénéfices de façon normalisée, rend officielle et systématique l'usage de ces informations par la comptabilité nationale. Ce décret met un terme au bricolage des comptables nationaux qui se contentaient jusqu'alors de données éparses collectées auprès des comptables publics, des statisticiens de l'INSEE ou de la direction générale des impôts (DGI). Il témoigne d'une reconnaissance générale de la nécessité de l'information économique et du profond changement des mentalités des dirigeants politiques et économiques qui, avec Valérie Giscard d'Estaing son signataire, acceptent d'utiliser massivement des sources privées pour établir les comptes nationaux. Le décret officialise une collaboration qui se faisait discrète jusqu'alors pour ne pas heurter frontalement les défenseurs du secret des affaires, qui sont aussi les fournisseurs essentiels des données primaires. Bien que les fondateurs de la comptabilité nationale l'aient conçue par analogie à la comptabilité privée, cette collaboration n'a pas été spontanée. Les formulations pionnières de l'idée d'un usage macro économique des comptabilités privées avant 1940, puis la publication du premier plan comptable général français pendant l'Occupation introduisent les conditions d'une collaboration. La comptabilité nationale devient un moteur déterminant de la normalisation des comptabilités privées. Après la Libération, l'Etat réclame des indicateurs pertinents pour diriger l'action. Des économistes français et anglo-saxons poussent l'analogie entre la comptabilité privée et la comptabilité nationale. Les préoccupations théoriques sont ensuite marginalisées par les nouveaux experts de la comptabilité nationale, abrités par le Trésor et guidés par des objectifs pratiques et immédiats. Les comptables nationaux renforcent leurs liens avec les foyers de l'élaboration des statistiques et du plan comptable et exercent de fortes pressions pour accélérer la normalisation. Ils contribuent à faire adopter un nouveau plan en 1957, puis la loi de 1959 prévoyant sa généralisation progressive et le décret de 1965. Cette implication n'existe pas ailleurs, sauf en Belgique et en Allemagne, car les statisticiens comptables nationaux, qui n'ont pas accès aux données individuelles ne les utilisent pas, ou peu dans le cas des États-unis. La collaboration entre les comptables nationaux et les économistes distingue également la France des pays anglo-saxon où la comptabilité nationale entre dans la sphère d'influence des théories dominantes et des intérêts privés, où les économistes méconnaissent les réalités tangibles retenues par les comptables d'entreprises et nationaux et où ces deux comptabilités se développement de façon disjointe jusqu'à l'adoption récente des normes IASB / IFRS.Histoire, comptabilité, comptabilité nationale
Du métier à la profession d’expert-comptable et de comptable agréé
Ce texte vise à introduire le dossier en présentant rapidement les origines de l’Ordre. Il constitue la version longue de la partie rédigée pour l’ouvrage publié par le Conseil supérieur de l’Ordre des experts comptables à l’occasion de ses soixante-dix ans : Fabien Cardoni, Béatrice Touchelay, La marque expert-comptable au service de l’économie. 70 ans d’histoire, Paris, Cliomédia, 2013. http://www.boutique-experts-comptables.com/Histoire-de-la-profession. La comptabilité est aussi ancienne ..
De « guerres et statistiques » à « la genèse de la décision »
Les Français et la statistique : indifférence au mieux, rejet au pire… La tentative d’enquête industrielle de 1931 échoue car la Statistique générale de la France (sgf) ne récupère qu’un tiers des questionnaires transmis aux entreprises. Le 8 mai 1954, à l’avant-veille de la distribution des bulletins, le journaliste Robert Escarpit prend position contre le recensement démographique dans Le Monde. Dix ans après la Libération, l’hostilité à la statistique que trahit cette attitude ne peut plus..
Éditorial
Dans ce neuvième numéro de la Revue Comptabilité(s) Jean-Baptiste Santamaria, maître de conférence, Histoire médiévale (IHRiS, Univ. Lille-SHS), présente les communications de la journée d’études Les comptables au Moyen Âge : parcours collectifs et individuels qu’il a organisée à l’université de Lille 3 en juin 2014. Ce numéro témoigne du dynamisme de la recherche des médiévistes sur la thématique comptable. La richesse de cette journée est attestée par la qualité et par la diversité des comm..
Éditorial
Le 12e numéro de Comptabilité(s) présente les textes d’un colloque international organisé à Montpellier en juin 2017 par l’Université de Sherbrooke (Québec, Canada) et par le Centre d’études médiévales de Montpellier de l’Université Paul Valéry Montpellier 3 (France). Intitulé L’histoire des villes à travers leur comptabilité à la fin du Moyen Âge, ce colloque s’inscrit dans les recherches de Mme Geneviève Dumas (Université de Sherbrooke), subventionnées par le CRSH, visant à étudier les prat..
La monnaie dans les discours du CNPF entre 1947 et 1969 : un révélateur des relations entre le patronat et les gouvernements
L’élimination des protections douanières et la modernisation Ă©conomique constituent des faits majeurs pour la France des annĂ©es 1947 Ă 1969. Deux Âdiscours s’affrontent pour expliquer ces Ă©volutions. Le premier les attribue au volontarisme de l’Etat Ă partir des rĂ©formes structurelles de la LibĂ©ration. Le second considère que ces Ă©volutions s’imposent malgrĂ© l’intervention des pouvoirs publics. Le Conseil National du Patronat Français fondĂ© en 1946 dĂ©finit ses positions de façon pragmatique. ..
Éditorial
Dans ce neuvième numéro de la Revue Comptabilité(s) Jean-Baptiste Santamaria, maître de conférence, Histoire médiévale (IHRiS, Univ. Lille-SHS), présente les communications de la journée d’études Les comptables au Moyen Âge : parcours collectifs et individuels qu’il a organisée à l’université de Lille 3 en juin 2014. Ce numéro témoigne du dynamisme de la recherche des médiévistes sur la thématique comptable. La richesse de cette journée est attestée par la qualité et par la diversité des comm..
Un siècle d’indice des prix de détail français (1913‑ 2013) ou la métamorphose d’un pionnier de la politique du chiffre
Défini par la Statistique générale de la France en réaction aux poussées inflationnistes de la veille de la Première Guerre mondiale l’indice des prix de détail des 13 produits dits de consommation courante sert d’abord à indexer quelques contrats. Il s’étoffe et ses usages se diversifient entre les deux guerres, mais il faut attendre la création de l’INSEE en 1946 pour qu’il devienne une pièce essentielle de la régulation salariale. Objet de manipulations gouvernementales à la fin de la IVe République, l’indice est fortement critiqué par les syndicats de salariés dans les années 1970 et la CGT publie un indice alternatif. Instrument d’une politique fondée sur l’usage de statistiques publiques (la politique des grands nombres), l’indice subit de plein fouet le virage ultralibéral de la fin du XXe siècle. De puissants intérêts privés, menés par les syndicats de la grande distribution, cherchent à intervenir dans sa fabrication et les gouvernants en quête d’économies budgétaires ne s’y opposent pas.Defined by the General Statistics of France in response to inflationary pressures in the eve of the First World War the index of retail prices of 13 products known as consumer is first used to index some contracts. This material and its uses are diversified between the wars, but it was not until the creation of the INSEE in 1946 to become an essential piece of wage regulation. Subject to government manipulation at the end of the Fourth Republic, the index is heavily criticized by labor unions in the 1970s and CGT publishes an alternative index. Instrument of a policy based on the use of official statistics (the policy of large numbers), the index suffered the brunt of the ultra-liberal turn of the late twentieth century. Powerful private interests led by unions in the retail, seek to intervene in its manufacture and governments seeking budget savings does not object
Entretien avec Édouard Salustro, Paris, 17 février 2012
Édouard Salustro est une personnalité majeure de la profession comptable. Il devient comptable un peu par hasard (les vocations de comptables sont rares à cette époque, le métier est méconnu), il représente la génération des professionnels formés dans les années 1950, et reste profondément marqué par ses rencontres avec l’ancienne génération, celle des experts d’avant la création de l’Ordre auprès desquels il s’est formé. La carrière d’Édouard Salusto accompagne la profonde transformation du ..
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