Effet de l'inactivité physique sur les balances énergétique et oxydative : inférences sur le rôle de la sédentarité dans l'étiologie de l'obésité

Abstract

L'obésité est une maladie du stockage des lipides et une vision classique de son étiologie repose sur une incapacité à utiliser les lipides qui serait causale dans la prise de poids. Or l'observation relativement récente d'un alignement étroit de la balance lipidique sur la balance énergétique suggère fortement que le niveau d'activité physique, en tant qu élément le plus modulable de la dépense énergétique totale, pourrait jouer un rôle clef dans le devenir des lipides alimentaires. Le corollaire direct de cette observation est que l'incapacité à utiliser les lipides en tant que substrat, observée chez les sujets obèses et post-obèses, pourrait être secondaire à l'adoption généralisée d'un mode de vie sédentaire. Toutefois, nous disposons à ce jour de peu de données concernant la physiologie de l'inactivité physique. Le but majeur de ce travail de thèse a été de déterminer chez l'homme et la femme normo-pondérés si l'inactivité physique altère la régulation des balances énergétique et oxydative des lipides impliquées dans la régulation du poids et de caractériser les mécanismes sous-jacents. Pour cela, nous avons soumis des sujets femme et homme sains sans aucune prédisposition génétique à l'obésité à 2 et 3 mois d'inactivité physique, respectivement, en utilisant le modèle de l'alitement prolongé. Nous avons montré que lors de longues périodes d'inactivité physique, l'énergie ingérée est diminuée proportionnellement à la dépense énergétique totale sous l'effet de signaux satiétogènes dont la leptine. Ainsi la balance énergétique peut-être maintenue sur le long terme. Néanmoins, l'inactivité physique altère l'homéostasie des macronutriments avec une répartition des lipides au profit du stockage et entraîne le développement d'une insulino-résistance. Cette diminution de l'oxydation lipidique totale est probablement due, en partie, à la diminution du transport des acides gras dans le myocyte et la mitochondrie. L'inactivité physique induit aussi une augmentation de l'absorption intestinale et/ou une diminution de la clairance plasmatique des acides gras exogènes résultant en une hypertriglycéridémie et un spill-over accru des acides gras libres provenant de l'hydrolyse des lipoprotéines par la lipoprotéine lipase. De manière intéressante, l'inactivité physique diminue l'oxydation des acides gras alimentaires saturés (palmitate) mais pas celle des acides gras monoinsaturés (oléate). Puisque les acides oléique et palmitique alimentaires semblent avoir une absorption, un acheminement et une captation par les tissus périphériques similaires, l'inactivité physique altèrerait la répartition des acides gras saturés au profit d'un stockage au niveau musculaire. Cette hypothèse semble étayée par la relation négative obtenue entre la réduction d'oxydation du palmitate et la quantité de lipides au niveau musculaire. Ce résultat est d'autant plus intéressant lorsque l'on considère la relation établie entre l'insulino-résistance et les triglycérides intramusculaires. Ainsi, l'inactivité physique, indépendamment des changements de la balance énergétique, induit chez des individus sains des caractéristiques physiologiques proches de celles que l'on observe chez des sujets obèses. Ces observations soutiennent notre hypothèse selon laquelle la sédentarité serait une des causes majeures de l'étiologie de l'obésité. De plus amples études sur les mécanismes impliqués dans le stockage préférentiel des acides gras saturés dans les triglycérides intramusculaires et l'impact sur la réponse à l'insuline en conditions d'inactivité physique sont cependant requises afin d'étendre notre compréhension sur l'interaction entre régime alimentaire et activité physique dans le développement de l'obésité et du diabète. En testant l'efficacité de deux protocoles d'entraînement d'exercice physique (résistif versus résistif et aérobic) pour contrer les effets délétères de l'inactivité physique, nos résultats ont mis en avant le rôle clef de la dépense énergétique dans la régulation de l'oxydation lipidique totale. Toutefois, nous pensons que l'inefficacité de l'entraînement physique observée sur le maintien de l'oxydation des acides gras exogènes serait plutôt due à une faible activité de type spontanée (tout type de mouvement) qu à une dépense énergétique insuffisante induite par l'exercice physique. Ainsi, l'activité physique de type structurée ou spontanée influencerait différemment le métabolisme lipidique. Ceci ne représente qu une hypothèse à ce jour et des études supplémentaires sur la physiologie de l'exercice, de l'activité physique non structurée mais aussi de l'inactivité physique sont clairement requises. Le modèle de l'alitement prolongé semble approprié pour de telles investigations.Obesity is a fat storage disease and its aetiology is classically viewed as the result of an incapacity to use fat as fuel. However, the recent observation of the tight relationship between energy and lipid balances strongly suggests that the physical activity level, which represents the main variable component of the total energy expenditure, may play a key role in the dietary lipid fate. The direct corollary of this observation is that the incapacity to use fat as fuel observed in both obese and post-obese individuals may be secondary to the generalised adoption of sedentary behaviours in the general population. Nevertheless, our current knowledge on the physical inactivity physiology is very poor. The main aim of this present thesis was to determine in normal-weight men and women whether the physical inactivity impairs the regulation of both energy and lipid balances, both involved in the body weight regulation and to delineate the related mechanisms. To do so, we used the long-term bed rest model to submit healthy lean women and men without any genetic predisposition to obesity to 2 and 3 months of physical inactivity, respectively. We showed that during long periods of physical inactivity, energy intake is spontaneously decreased under the control of satietogenic signals (i.e. leptin) and matches the reduced energy expenditure. Energy balance can thus be maintained on the long-term. However, physical inactivity alters the macronutrients homeostasis. Indeed, it induces a preferential channelling of lipids towards storage associated with a reduced fat oxidation and a development of an insulin resistance. This decrease in total lipid oxidation is likely due, at least in part, to a reduced transport of fatty acids into myocyte and mitochondria. Physical inactivity also induces an increase in intestinal absorption and/or a drop in the plasmatic clearance of exogenous fatty acids, which results in a hypertriglyceridemia and an elevated spill-over of the fre fatty acids released by the hydrolysis of the triglyceride-rich lipoproteins by the lipoprotein lipase. Interestingly, physical inactivity decreases the oxidation of the dietary saturated fatty acids (palmitate) but not that of the dietary monounsaturated fatty acids (oleate). Since saturated and monounsaturated fatty acids have a similar absorption rate, trafficking and uptake by the peripheral tissues, physical inactivity seems to impact the partitioning of saturated fatty acids towards storage versus oxidation likely via a preferential accumulation of palmitate in muscle fat. This hypothesis is supported by a negative relationship between the physical inactivity-induced reduced palmitate oxidation and the muscle lipid content. This result is of particular interest when considering the clear relationship observed between intra-muscular triglycerides and the development of insulin resistance. Therefore, physical inactivity, independent of energy balance changes, triggers the development of metabolic features close to what is observed in both obese and diabetic individuals. These observations support our hypothesis, which places sedentary behaviours as one of the major causes responsible for the aetiology of obesity. Further studies on the mechanisms involved in the preferential storage of saturated fatty acids towards intra-muscular triglycerides and on the related insulin response under physical inactivity conditions are, however, required in order to gain a better understanding on the interaction between diet and physical activity in the development of both obesity and diabetes. The second aim of this thesis was to test the efficiency of two physical exercise training programs (resistive vs. resistive and aerobic) to counteract the deleterious effects induced by physical inactivity. Our results highlighted the key role of the total energy expenditure in the regulation of total lipid oxidation. Nevertheless, we think that the inefficacy of the exercise trainings to maintain the exogenous fatty acid oxidation would be rather due to a low spontaneous physical activity (any bodily movement) than to an insufficient exercise-induced energy expenditure. Thus, structured and spontaneous physical activity may differently affect the lipid metabolism. This only represents a hypothesis and further studies on the physiology of exercise, of non-structured physical activity but also of physical inactivity are clearly required. The model of the long-term bed rest seems to be highly relevant for such nvestigations

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