research

Filmer la colère des réfugiés du Darfour et faire émerger le concept de détournement humanitaire. Comment les émotions nous éclairent sur la politique humanitaire

Abstract

International audiencePrésentation des relations entre les affects et l'émergence de certains concepts { partir d'un film tourné en 2005 sur les réfugiés du Darfour au Caire. Insistant sur la valeur heuristique des images dans l'élaboration d'une problématique filmée. Cet article évoque les relations ambivalentes entre les exigences d'érudition de la recherche et l'implication émotionnelle du cinéma documentaire. Or le questionnement lié à la compatibilité de la science avec les données subjectives qui entourent sa production est loin d'être nouveau. L'interrogation est constante depuis les débuts de l'anthropologie visuelle, et les premiers films de Jean Rouch sont déjà des témoignages de cette tension entre connaissance et affects. Les films scientifiques n'arrivent pas { se démarquer ou { se détacher de formes visuelles esthétisantes et cet ancrage dans le beau est le signe manifeste de la présence d'une certaine subjectivité. Tant le beau, même comme produit construit d'une société donnée, échappe. Ce que d'aucuns appellent la magie du beau n'est rien d'autre qu'une expression de l'énergie subjective qui se dérobe à son producteur lui-même. Les peintres le disent assez souvent lorsqu'ils évoquent le processus créatif, en soulignant { quel point entraînés par la couleur, leur propre oeuvre les déborde. Cette absence de contrôle est opposée aux exigences cartésiennes du travail scientifique qui requiert une approche rationnelle du savoir et surtout l'application de certaines lois comme celle de la démonstration par la preuve. Nous pouvons retrouver la justesse d'un raisonnement et le justifier alors qu'il est beaucoup plus difficile d'établir la beauté d'une chose. Nous savons que les objets sont beaux sans pour autant être capables de rentrer dans une explication savante. Là réside toute la difficulté des discours sur l'art, qui ne sont que des mises en organisations rationnelles d'un objet qui par essence ne l'est pas. Le cinéma dit « scientifique », tel qu'il a été conçu { ses origines, est un cinéma éminemment irrationnel, puissamment émotif et, qui, grâce à cette puissance, transmet un savoir inédit par une expression formelle qui déconcerte encore les Sciences Humaines, malgré les avancées des neurosciences et des travaux sur les zones du cerveau (Maclean, 1984)[1]. Des expériences qui ont maintenant plus de 20 ans demeurent souvent boudées par les Sciences Humaines, alors même que les résultats de ces travaux sont le produit d'une expérimentation administrant la preuve

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