Thèse écrite grâce au financement du Fonds Québécois de la Recherche sur la Société et la Culture (FQRSC)De nature essentiellement théorique, la présente thèse porte sur un sujet peu étudié dans le milieu universitaire francophone, que ce soit en Europe ou au Québec. Il s’agit du fan. Bien que les fan studies constituent un champ disciplinaire très actif dans les universités anglo-saxonnes (voir entre autres Henry Jenkins et Matt Hills), il n’existe aucun ouvrage dans la langue de Molière s’affairant à synthétiser et théoriser l’expérience affective du fan. Ma thèse entend combler cette lacune. Fortement inspiré par la notion de hiérophanie du célèbre historien des religions Mircea Eliade, j’ai créé le néologisme cinéphanie pour désigner un concept que je résume comme suit : toute manifestation affective s’échelonnant sur une courte période de temps, qui suscite un haut degré de satisfaction affective. À partir de ce concept, je déclinerai une typologie qui servira à illustrer les types d’expériences cinéphaniques qui peuvent motiver le spectateur et le fan à s’engager dans des activités de réappropriation culturelle (seul ou au sein d’un fandom) afin de réactualiser les émotions liées à l’objet culturel source. À l’aide des travaux de l’anthropologue Victor Turner portant sur l’activité rituelle, je proposerai l’organisation tripartite de l’expérience cinéphanique comme suit : la cinéphanie préliminale, la cinéphanie (liminale) et la cinéphanie post liminale.
L’ensemble de mon travail répondra à trois objectifs. Le premier voudra théoriser de manière diachronique et synchronique le rapport affectif intense pouvant naître d’une relation entre le consommateur et un objet culturel issu de la culture populaire. De plus, il n’existe pour l’instant aucun ouvrage qui va dans ce sens, même chez les chercheurs anglo-saxons. Ma seconde ambition sera de séculariser la terminologie servant à décrire une expérience intense chez le fan. Certains d’entre eux se servent encore de l’analogie religieuse avec, entre autres, les termes d’épiphanie et de révélation pour souligner le plus adéquatement possible l’importance qu’ils accordent aux émotions qu’ils ressentent à l’endroit d’un objet culturel spécifique. Enfin, mon dernier objectif sera de synthétiser, dans une perspective ouvertement transdisciplinaire, les travaux provenant de disciplines variées liés à la question des affects médiatiques. Cela me permettra d’esquisser un portrait suffisamment précis qui visera à mettre en relief l’existence de traces théoriques du concept de la cinéphanie en filigrane dans les travaux d’autres chercheurs.Mostly theoretical in nature, this thesis looks into a subject that has been little researched by the francophone academia both in Europe and in Québec: fans. Though fan studies are an active field of study in English-language universities (see Henry Jenkins and Matt Hills, among others), there exists no body of work in French that summarizes and speculates about the affective experience of fans. My thesis intents to fill this gap. Inspired by the concept of hierophany that was formulated by the famous religious historian Mircea Eliade, I created the neologism cinephany to describe the following concept: any affective expression spreading over a short period of time which culminates into a high level of emotional satisfaction. From this concept, I will define the typology which will illustrate the various types of cinephanic experiences that can drive viewers and fans to get emotionally involved in cultural reappropriation activities (alone or within a fandom) in order to adapt the emotions linked to the source cultural object. Using anthropologist Victor Turner's work on rituals, I suggest a tripartite organization of the cinephanic experience into the following phases: premilimal cinephany, cinephany (liminal) and post-liminal cinephany.
My research objectives are threefold. The first is to speculate about the intense affective relationship between consumers and a pop culture object in a diachronic and synchronic manner. There currently exists no such body of work in the world, including among English-language researchers. My second aspiration is to secularize the terminology used to describe the intense episodes fans experience. Some still use religious analogies with words such as epiphany and revelation to adequately illustrate the importance fans attach to the emotions they feel towards a specific cultural object. Finally, my last objective is to synthesize – in an openly transdisciplinary perspective – the work from various disciplines in regards to media affect. This will allow me to paint a clear picture highlighting the implicit existence of theoretical traces of cinephany within the work of other researchers