Imed Elloumi

M Ghozlen

Moez Chakroun

S. Nicolle

Comptes Rendus Physique

C. R. Physique 10 (2009) 236–241Physique / BiophysiqueDétermination du module d’élasticité de la matière cérébraleMoez Chakroun a,b,∗, Med Hédi Ben Ghozlen a,b, Imed Elloumi a,b, S. Nicolle a,ba Laboratoire de physique des matériaux de la faculté des sciences de Sfax, Équipe physique & technologie médicale,Institut supérieur de biotechnologie de Sfax, 3038 Sfax, Tunisieb Laboratoire des systèmes biomécaniques et cognitifs de l’institut de mécanique des fluides et des solides de Strasbourg,Université Louis-Pasteur, 4, rue Blaise-Pascal, 67070 Strasbourg cedex, FranceReçu le 26 mai 2008 ; accepté après révision le 4 mars 2009Disponible sur Internet le 21 avril 2009Présenté par Jacques VillainRésuméPlusieurs tests vibratoires sur la matière cérébrale sont rapportés dans la littérature. Le but de ces tests a été toujours de caracté-riser cette matière et modéliser sa loi de comportement pour l’introduire dans le code de calcul des modèles EF.La courbe expérimentale du module de la fonction de transfert en fonction de la fréquence de vibration (entre 40 et 600 Hz) aété réalisée par vibromètrie laser. L’expression de la fonction de transfert associée au modèle multicouches du type Kelvin–Voigt(KV) a été aussi déterminée.L’approche semi-linéaire basée sur le modèle du type Maxwell n’a pas permis de décrire le comportement vibratoire de lamatière cérébrale dans l’intervalle comprise entre 340 et 500 Hz. Un modèle non linéaire du type KV a été alors proposé danscet article. Une nouvelle procédure de détermination des paramètres du modèle KV a été présentée. Ces paramètres ont permisde faire converger la fonction de transfert théorique vers la fonction de transfert expérimentale. L’approche non linéaire basée surle modèle de KV permet de modéliser la fonction de transfert sur toute la bande fréquence de notre étude. Ainsi, les variationsdu module d’élasticité et du coefficient d’amortissement interne en fonction de la fréquence ont été déterminées. Pour citer cetarticle : M. Chakroun et al., C. R. Physique 10 (2009).© 2009 Académie des sciences. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.AbstractDetermination of the elastic modulus of cerebral matter. Several cerebral matter vibratory tests are reviewed from the litera-ture; the goal of these tests was always the characterisation of this matter and the modelling of its behaviour law to introduce it inthe EF models calculation code.The experimental curve of the transfer module function according to the vibration frequency (between 40 and 600 Hz) has beenachieved with laser vibrometry. The transfer function expression associated to the multilayered model of Kelvin–Voigt (KV) typeshas also been determined.The semi-linear approach based on the Maxwell type model did not permit the description of the cerebral matter’s vibratorybehaviour in the interval between 340 and 500 Hz. A non-linear model of the KV type has been proposed in this Note. A newprocedure for the determination of the parameters of the KV model has been presented. These parameters permitted the convergenceof the theoretical transfer function toward the experimental transfer function. The non-linear approach based on the model of KVpermits one to model the transfer function over all the frequency band of our survey. Thus, elastic modulus variations and the* Auteur correspondant.Adresse e-mail : m.chakroun1@voila.fr (M. Chakroun).1631-0705/$ – see front matter © 2009 Académie des sciences. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.crhy.2009.03.010M. Chakroun et al. / C. R. Physique 10 (2009) 236–241 237internal amortisation coefficient depending to the frequency have been determined. To cite this article: M. Chakroun et al., C. R.Physique 10 (2009).© 2009 Académie des sciences. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.Mots-clés : Fonction de transfert ; Vibrométrie laser ; Modèle non linéaire ; Module d’élasticitéKeywords: Transfer function; Vibrometer laser; Non-linear model; Elastic modulus1. IntroductionLa tête est la partie du corps la plus menacée par les lésions mortelles au cours des accidents. Durant un accident,un chargement mécanique extérieur est transmis au cerveau. Ce dernier peut subir des dommages, via un mécanismede lésions, si sa réponse mécanique dépasse une certaine limite. Des informations sont donc nécessaires quant à cemécanisme afin d’améliorer les mesures de préventions, le diagnostic et le traitement des lésions cérébrales.Etant donnée que la détermination de tels mécanismes est impossible in vivo, des modèles numériques de typeéléments finis (EF) de la tête sont souvent utilisés [1–4]. Ces modèles sont tous basés sur l’hypothèse d’homogénéitéet d’isotropie de la matière cérébrale.Des tests vibratoires concernant la matière cérébrale sont rapportés dans la littérature. Le but de ces tests est decaractériser cette matière et de tenter de modéliser sa loi de comportement pour l’introduite dans le code de calcul desmodèles EF de la tête humaine [5–12].En 1969, Falleinstein [13] a mesuré à 9 et 10 Hz et à l’aide d’un transducteur électromagnétique le module decisaillement complexe de cerveaux humains. Les échantillons testés sont des échantillons de substance blanche deforme rectangulaire (I ×L×h = 2 cm×3 cm× (0,4 à 0,7) cm). Les tests ont été réalisés sur des cerveaux d’individusd’âges différents et entre 10 et 62 heures après leurs morts. Les valeurs du module de stockage G′ mesurés varient de600 à 1100 Pa et celles du module de perte G′′ de 300 à 650 Pa ce qui implique un module de cisaillement dynamiqueG∗ qui varie de 670 à 1277 Pa.La technique de vibromètrie laser permet d’étudier la vibration en situation de traction-compression d’un échan-tillon cylindrique de la matière cérébrale. Ce type de sollicitation est rarement étudié dans la littérature à cause desproblèmes techniques liés à l’application d’une déformation de traction à un matériau viscoélastique tel que la matièrecérébrale.Ainsi, peu de résultats [7,14,15] concernant le module d’élasticité E de la matière cérébrale sont présentés dans lalittérature.Le but de ce travail est de mettre au point un modèle permettant de caractériser la matière cérébrale en terme demodule d’élasticité et d’amortissement interne sur toute la gamme de fréquence (40–600 Hz).2. Méthode2.1. Fonction de transfertL’échantillon, d’un mélange de substances grise et blanche de cerveau de porc prélevé du cortex cérébral, est deforme cylindrique, de diamètre d = 2 cm, de hauteur h = 3 mm et de masse M = 1 g. Il est sollicité à sa surfaceinférieure avec un déplacement sinusoïdal x0 = a exp(j2πf t) procurée par un pot vibrant sur lequel l’échantillon estdéposé. Le déplacement de la face supérieure de l’échantillon xp est mesuré par un capteur de déplacement à laser.Un accéléromètre mis en contact avec le plateau vibrant du pot nous permet de mesurer l’accélération ẍ0 ; l’amplitudedu déplacement x0 correspondant à chaque fréquence d’excitation est déduit par double intégration.La fonction de transfert Hp(f ) de notre étude est le rapport du déplacement de la surface supérieure xp par ledéplacement imposé à la surface inférieure x0. La phase de la fonction de transfert Φp(f ) est déduite à partir descourbes de Lissajous xp = F(x0) relatives aux différentes fréquences d’excitation du pot.2.2. Dispositif et protocole expérimentalLe dispositif expérimental comprend un pot vibrant, un accéléromètre, un capteur de déplacement à laser (HéliumNéon) et un ordinateur avec sa carte d’acquisition. Notons que l’expérience a été réalisée 3 fois avec trois échantillonsdifférents, de mêmes dimensions, prélevées de la même région (cortex cérébral).238 M. Chakroun et al. / C. R. Physique 10 (2009) 236–241Fig. 1. Modèle de KV.Fig. 1. KV model.Le protocole expérimental comprend les étapes suivantes :- Branchement du montage ;- Mise en place de l’échantillon sur le plateau en plexiglas ;- Illumination de la surface supérieure de l’échantillon par le laser d’Hélium Néon ;- Lancement de la vibration du pot ;- Acquisition des données expérimentales sous HPVEE (logiciel d’acquisition) ;- Traitement des données par MATLAB et MAPLE.Plus de détails concernant le dispositif et le protocole expérimental se trouve à la référence [16].2.3. Modèle multicouchesPour la mise en équation de la vibration de l’échantillon d’étude nous lui avons associé un modèle mécaniquemulticouches de types Kelvin–Voigt (KV) (Fig. 1). Les ressorts et les amortisseurs modélisent respectivement l’élas-ticité et la viscosité de la matière cérébrale. La vibration de l’échantillon est assimilée à la vibration de p couchescylindriques superposées l’une sur l’autre. Chaque couche est alors de hauteur hp = h/p de masse mp = M/p et dediamètre d .kp et Cp sont reliés au module d’élasticité E et à l’amortissement interne μ par : E = hpkpS et μ = hpCpSL’expression théorique [17] du rapport xp/x0 relative au modèle de KV estHp(f ) = xpx0=[1 +p∑n=1(p + n)!(p − n)!(2n)!(jmp2πfCp − j kp2πf)n]−1Avec f est la fréquence de vibration du pot, kp est la raideur du ressort, Cp est le coefficient de viscosité de l’amor-tisseur et p le nombre de couches du modèle.2.4. Détermination des paramètres du modèleNous présentons dans ce qui suit une modélisation basée sur le modèle de Kelvin–Voigt. Dans ce modèle nousconsidérant que les propriétés de la matière cérébrale dépendent de la fréquence d’excitation du pot.Ce modèle de KV comprend 5 couches massiques (p = 5). Ses paramètres k5 et C5 sont ajustés de manière qu’ilspermettent d’obtenir le meilleur accord théorie/expérience. Pour déterminer les valeurs de k5 et C5 relatives à chaqueM. Chakroun et al. / C. R. Physique 10 (2009) 236–241 239Fig. 2. Superpositions de la courbe expérimentale et la courbe dumodèle non linéaire de KV (p = 5).Fig. 2. Superpositions of the experimental curve and the KV non-linear model’s curve (p = 5).Fig. 3. Variation de la phase de la fonction de transfert en fonction de lafréquence.Fig. 3. Variation with fréquency of the dephasage.fréquence de vibration et en conséquence déduire celle de E et μ, nous avons résolu des systèmes à deux équationsde types :G5(f, k5,C5) = Gexp,f ; Φ5(f, k5,C5) = Φexp,foù Gexp,f et Φexp,f sont respectivement la valeur expérimentale de |xp/x0| et celle de la phase de xp/x0 correspon-dantes à la fréquence f . G5 et Φ5 sont le module et la phase de la fonction de transfert théorique H5(f ) relatifs àp = 5.La résolution de ces systèmes est assurée à l’aide du logiciel MAPLE. Les résultats obtenus de E et μ déduites desvaleurs de k5 et C5 calculées sont présentés dans ce qui suit en Figs. 4 et 5. Notant que le choix de p = 5 provient dufait que, les valeurs de kp et Cp obtenu pour p inférieur à 5, sont des valeurs qui non pas de signification physique carils sont soit complexes soit négatifs. Les valeurs obtenus pour p supérieur à 5 sont presque les même pour p = 5. Cemême problème a été rencontré avec la modélisation semi linéaire relative au modèle de Maxwell.3. RésultatsLes Figs. 2 et 3 représentent les superpositions des courbes expérimentales du module et de la phase de la fonctionde transfert avec celles théoriques, relatives au modèle de KV, basé sur les valeurs calculées de kp et Cp . Notons ainsique les courbes relatives aux trois échantillons testés sont presque les mêmes.Nous présentons dans les Figs. 4 et 5 les variations de l’amortissement interne μ et du module d’élasticité E enfonction de la fréquence.La Fig. 6 représente la variation du module de la déformation |ε| = | xp_x0h| subite par l’échantillon en fonction dela fréquence d’excitation du pot vibrant.4. DiscussionOn note sur les Figs. 4 et 5 que les courbes des variations du module d’élasticité E et de l’amortissement interne μen fonction de la fréquence représentent chacune d’elles une discontinuité vers 260 Hz. Notons qu’à cette fréquencenous avons |xp| = |x0| (Fig. 6). La matière cérébrale de porc se comporte donc comme un matériau élastique à 260 Hz.Les propriétés mécaniques de cette matière se distinguent par deux zones fréquentielles. La première, entre 40 Hz et260 Hz, est caractérisée par une augmentation du module d’élasticité E en fonction de la fréquence. La deuxième,entre 260 Hz et 600 Hz, est particularisée par une diminution du module d’élasticité E en fonction de la fréquence.240 M. Chakroun et al. / C. R. Physique 10 (2009) 236–241Fig. 4. Variation de l’amortissement interne en fonction de la fré-quence.Fig. 4. Variation with frequency of the internal amortization.Fig. 5. Variation du module d’élasticité en fonction de la fréquence.Fig. 5. Variation with frequency of the elastic modulus.Fig. 6. La variation du module de la déformation en fonction de la fréquence.Fig. 6. The variation with frequency of the strain modulus.La courbe de variation de l’amortissement interne μ en fonction de la fréquence présente deux minimums ; lepremier vers 130 Hz alors que le deuxième est au alentour de 400 Hz. La courbe de variation du module de ladéformation subite par l’échantillon d’étude en fonction de la fréquence (Fig. 6) représente deux maximums auxalentours de ces deux fréquences.5. ConclusionsLe modèle semi-linéaire de type Maxwell (Tableau 1) considère que les propriétés mécaniques de la matière céré-brale sont linéaires par intervalle de fréquence. L’inconvénient de ce modèle semi-linéaire est qu’il ne peut pas décrirele comportement vibratoire de la matière cérébrale dans l’intervalle comprise entre 340 et 500 Hz.L’approche non linéaire de la matière cérébrale de porc basée sur le modèle de KV, semble apporter plus dedescription des propriétés mécaniques de ce matériau que l’approche semi-linéaire.La différence dans les conditions protocolaires des expériences réalisées par les différents auteurs dans la littératureempêche la comparaison des différents résultats présentés par ces auteurs.M. Chakroun et al. / C. R. Physique 10 (2009) 236–241 241Tableau 1Propriétés internes de la matière cérébrale : Modèle semi-linéaire [16].Tableau 1The cerebral matter’s internal properties of: Semi-linear model [16].Fréquence (Hz) 20–300 300–340 340–500 500–650k (N/m) 5900 6800 4000E (kPa) 28,170 32,467 – 19,098C (N s/m) 4,2 2,95 – 2,65μ (Pa s) 20,05 14,08 – 12,65La technique de vibromètrie laser est une technique prometteuse dans la caractérisation des matériaux visco-élastiques tel que la matière cérébrale en situation de traction-compression. Notons que ce type de déformation estrarement étudié dans la littérature.RemerciementCe travail a été effectué dans le cadre d’un projet CMCU (00F/1119) en collaboration avec le Laboratoire desSystèmes Biomécaniques et Cognitifs (LSBMC) de l’Institut de mécanique des fluides de Strasbourg (IMF) dirigé parle Pr. R. Willinger.Références[1] J. Ruan, T. Khalil, A. 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Détermination du module d'élasticité de la matière cérébrale

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