Contrairement à l’idée reçue qui fait de la Lorraine un lieu d’importants combats de la guerre franco-allemande, l’ancien duché ne constituait guère un cadre de référence pour les journalistes et les auteurs contemporains pour parler de la violence guerrière de l’été 1870. L’analyse de témoignages contemporains, d’articles de presse, mais aussi de la littérature de souvenir montre en effet la dominance d’un regard local et topographique dans les récits sur la violence des combats autour de Metz et dans la région du Nord-Est de la France. La progressive association de la Lorraine avec l’histoire des violences de 1870-1871 ne vient pas tant de l’expérience des combats eux-mêmes que de l’occupation et puis de l’annexion d’une partie de la Lorraine par l’Allemagne. La construction d’une mémoire « Lorraine » de la guerre a donc plutôt été le résultat d’un processus relativement lent de travail de mémoire, qui n’a été terminé qu’une génération après 1870 avec l’influence grandissante d’une « génération de témoignage » de Lorrains, dont l’incarnation était Raymond Poincaré, président de la République française à partir de 1913.Contrary to the widespread notion that Lorraine was the scene of significant fighting during the Franco-Prussian War, the former duchy was largely absent from contemporaneous discussions of the violence of war in the summer of 1870. Indeed, an examination of contemporary testimony, including articles in the press and memoirs, reveals that a local and topographic perspective dominates accounts of the violence of fighting around Metz and elsewhere in northeastern France. Lorraine’s gradual association with the history of violence in 1870-71 has less to do with the experience of combat in itself than with the occupation and subsequent annexation of a portion of Lorraine by Germany. The construction of a “Lorraine” memory of the war was therefore the result of a relatively slow process of elaborating memory. This process only ended a generation after 1870, with the growing influence of a “witness generation” of Lorrainers epitomized by Raymond Poincaré, who became President of the Republic in 1913