3 research outputs found
« Le bilinguisme est avant tout une expérience physique »
Le Prix littéraire de la Porte Dorée a été décerné cette année à Polina Panassenko pour Tenir sa langue, publié aux éditions de l’Olivier en 2022. Un premier roman drôle et frondeur qui dit toute la complexité d’une enfance prise entre deux pays, deux langues, deux prénoms. Pour le jury, présidé cette année par Mohamed Mbougar Sarr, « l’autrice signe le récit léger et grave, absurde et tendre, d’une lutte intime pour garder ce qui menace de se perdre dans l’expérience d’un déplacement – une langue, une histoire, un héritage ou même un prénom. Tenir, retenir, appartenir : entre deux pays, Polina Panassenko interroge ces trois verbes de l’exil, auxquels elle ajoute un quatrième : aimer, aussi bien la Datcha que Saint-Étienne, sans devoir se renier »
Polina Panassenko, Tenir sa langue
Ah ! les prénoms. Très exactement les prénoms des métèques dans une France tellement propre sur elle que le moindre rastaquouère se doit de passer à la machine à laver nationale : tu entres étranger et tu ressors franç… non, non : « immigré » ! Comme dit Fellag dans Djurdjurassique Bled, plongé dans l’eau bénite, « Tu rentres Mohamed et tu sors Jean-Pierre, amen, alléluia ! » Car, bien sûr, pour les agités du petit écran, c’est bien Mustapha qui doit devenir Daniel – tout comme, pour le minis..
« Dedans-dehors : Postures translingues chez Polina Panassenko et Olga Grjasnowa »
International audience« L’accent est ma langue maternelle » dit Polina Panassenko, écrivaine française, née en 1989 à Moscou (URSS). Son premier roman "Tenir sa langue" (2022) retrace dans une perspective autofictionnelle les démarches de la protagoniste pour récupérer de droit l’orthographe de son prénom Polina, francisé en Pauline lors de l’immigration de ses parents en France au début des années 1990. Pour la narratrice-protagoniste, le processus de l’appropriation de la langue du pays d’accueil se décline en un incessant va-et-vient entre un « dedans » et un « dehors ». La réappropriation de son prénom russe de naissance au moment de l’accomplissement de son ‘intégration’ en France à l’âge adulte symbolise pour elle l’aboutissement d’une identité plurielle et entière. « Je suis sûr d’une chose : j’écris assurément sans accent » note l’écrivaine allemande Olga Grjasnowa dans son essai autobiographique "Le pouvoir du plurilinguisme" (2021). Née en 1984 à Bakou en Azerbaïdjan (URSS) dans une famille juive russophone, émigrée en Allemagne en 1996, elle écrit en allemand, parle également couramment l’anglais et dispose de notions solides d’espagnol, de français, de polonais, d’hébreux, de turque et d’arabe. Son premier roman "Le russe aime les bouleaux" (titre original : "Der Russe ist einer der Birken liebt", 2012) l’a rapidement fait connaître au-delà de l’Allemagne ; la traduction française est parue en 2014. Pour elle, le plurilinguisme n’est « ni un privilège, ni un problème » ; dans son essai, elle plaide pour qu’il soit reconnu comme « état normal » dans un monde de plus en plus globalisé. Ma contribution propose d’étudier la posture de ces deux autrices revendiquant une place au centre même de la littérature française (pour Panassenko), voire de la littérature allemande (pour Grjasnowa) sans que cet espace soit pour elles délimité par les critères d’un patrimoine culturel national
